Introduction générale 1

1979. Un colloque sur les relations entre la ville et l’université. Le président de Lyon II, Philippe Lucas, prend la parole :

‘« Vous savez que nous faisons des efforts appréciables pour nouer des contacts avec les communes voisines : ainsi, nous avons plusieurs fois organisé des manifestations culturelles en soirée, mais la participation des habitants de ces communes est restée très faible – ce qui n’est pas nécessairement la faute des habitants. Vous savez aussi que l’on reparle de la ZAC de Bron/Saint-Priest : nous nous en réjouissons. (…) nous allons enfin avoir des voisins immédiats. Mais savez vous quels seront nos plus proches voisins ? Ce seront les habitants, certes très paisibles, d’un cimetière paysagé. Bien entendu, je ne conteste nullement que ce cimetière ait sa nécessité : vous comprendrez cependant que nous ne pouvons en rester là. » 2

Dix ans plus tard, le vœu exprimé par Philippe Lucas est exaucé : quatre mois après son élection à l’hôtel de ville de Lyon, Michel Noir lance le projet de la réhabilitation de la Manufacture des Tabacs qui participe à la réintégration de l’université en centre-ville. En une décennie le contraste est saisissant : les universités lyonnaises deviennent l’une des priorités d’intervention des collectivités locales. Dans un domaine traditionnel d’intervention de l’Etat qui n’est pas affecté par les transferts de compétence issus des lois de décentralisation, les équilibres qui gouvernent l’action publique semblent changer. C’est d’un intérêt pour la mesure du changement dans les relations entre l’Etat et les collectivités territoriales qu’est né ce projet de recherche. Expliciter sa construction consiste donc tout d’abord à démêler les fils de sa genèse.

Le choix d’un objet d’étude prend place dans un parcours de recherche, qui aussi modeste soit-il, contribue à structurer les questionnements utilisés. Notre mémoire de diplôme d’études approfondies portant sur l’application de la loi Administration Territoriale de la République du 6 février 1992 3 , nous nous sommes longtemps nourris de travaux sur les relations entre l’Etat et les collectivités territoriales et sur les conséquences de la décentralisation. Ces derniers semblent traversés d’incertitudes quant à la qualification de l’Etat. Si globalement les travaux s’accordent sur le constat d’un changement de la place de l’Etat dans le pilotage de l’action publique, il n’y a pas de consensus sur le sens à lui donner 4 .

Un bref détour vers les travaux socio-historiques tempère en effet la tentation hâtive à conclure à la radicalité des changements en cours. La place de l’Etat dans la conduite de l’action publique n’a pas toujours été dominante. Les niveaux infra-nationaux, notamment au cours de la IIIème République 5 , sont des lieux d’innovation importants et devancent parfois la mise en place de services publics nationaux. Si changement il y a, c’est donc avant tout par rapport au début de la Vème République. Patrick Hassenteufel et Joseph Fontaine 6 ont raison d’insister sur la nécessaire précision des échelles temporelles par rapport auxquelles le changement est constaté. En omettant cette prudence méthodologique, les études concluant à la radicalité des changements en cours participent à la célébration d’un état antérieur de l’Etat, plus postulé que réellement connu. Elles contribuent à donner l’illusion d’un « Etat fort » quelques soient les domaines d’intervention et les périodes envisagées 7 .

S’il se centre sur la Vème République, l’apprenti chercheur en sciences sociales ne dispose que d’un nombre limité de gradations sur son étalon de mesure du changement. Sans en dresser une liste exhaustive, plusieurs raisons cumulatives expliquent ce déficit. Tout d’abord, les analyses portant sur le rôle de l’Etat dans l’action publique au début de la Vème République ne sont pas légions. Les remarques formulées il y a quelques décennies par Robert K. Merton sur la jeunesse de la sociologie s’appliquent a fortiori pour l’analyse de l’action publique 8 . Ensuite, l’agenda de recherche et les problématiques ont en partie changé ce qui restreint la possibilité de mettre en regard les résultats empiriques actuels avec ceux obtenus antérieurement. Sans que leur qualité ne soit nullement remise en cause, la convocation des résultats antérieurement acquis dans d’autres contextes problématique et intellectuel n’est pas sans poser problèmes.

L’évolution des problématiques a conduit à disqualifier des pans importants de la production scientifique des années soixante-dix. Ainsi, les analyses marxistes du local ne sont aujourd’hui que rarement citées dans la littérature, pourtant abondante, traitant de cet objet. La négation de toute autonomie 9 accordée par ces analyses à la « scène politique locale » et la surdétermination de la politique par l’économique 10 discréditent largement ces recherches notamment dans le cadre d’études qui mettent aujourd’hui en avant le retour des villes en Europe 11 . Si ces références marxistes sont mobilisées, c’est avant tout pour critiquer leur approche théorique et non pour convoquer leurs résultats empiriques et mettre en regard les résultats obtenus dans les analyses contemporaines. L’évolution dans les problématiques utilisées est donc un obstacle redoutable à la mobilisation des références passées pour évaluer le changement. Moins embarrassant, le changement dans les questions portées à l’agenda de recherche pose également quelques difficultés.

Si, malgré les critiques 12 , les travaux développés au sein du Centre de Sociologie des Organisations (CSO) sur le local ne souffrent pas d’un tel ostracisme théorique, il n’en reste pas moins qu’ils répondent aux enjeux du débat scientifique et politique des années 1960-1970. En réhabilitant l’influence de la périphérie dans la mise en œuvre des programmes publics, les travaux de Pierre Grémion 13 , Jean-Pierre Worms 14 , Jean-Claude Thoenig 15 et Michel Crozier 16 partagent la volonté de prendre le contre-pied d’une vision centralisatrice et jacobine de l’Etat français, dominant à la fois les études juridiques et politologiques sur le sujet 17 . Les enjeux politiques et scientifiques ont aujourd’hui largement changé. Le passé n’est interrogé qu’au regard des questions que le présent lui pose. La recherche scientifique, notamment en analyse des politiques publiques, ne fait pas ici exception. Liée notamment aux commandes publiques 18 , elle n’est pas sans lien avec l’agenda des problèmes sociaux et politiques. Comprendre les changements en cours en mobilisant les études antérieurement réalisées comme point d’appui comparatif ne va donc pas sans poser des problèmes méthodologiques et épistémologiques. L’apprenti chercheur en sciences sociales dans la formalisation de son projet de recherche dispose cependant d’une autre voie : établir lui-même l’étalon de mesure en investiguant la période passée. C’est la démarche qui est ici adoptée. Ce projet de recherche part donc d’une volonté de prendre la mesure des changements qui affectent la conduite de l’action publique depuis les débuts de la Vème République à partir d’un observatoire précis et délimité.

L’allongement de la période d’analyse interdit de choisir un domaine émergent de l’action publique. Pour que l’analyse soit rigoureuse et qu’elle évite « l’effet d’objet » 19 , le domaine d’intervention retenu doit être un champ traditionnel d’intervention de l’Etat et donc permettre la comparaison terme à terme des conditions du pilotage de l’action publique. Notre attention a été retenue par les politiques d’implantation universitaire. Par leur ancienneté, elles permettent une approche diachronique et elles ont la particularité d’être affectées par les tendances souvent décrites comme marquant les évolutions récentes de l’action publique. Ainsi, la DATAR dans son rapport d’évaluation du plan Université 2000 note que :

‘« les politiques d’aménagement universitaire apparaissent comme caractéristiques des « nouvelles » politiques publiques qui ont été instaurées dans un contexte de remise en cause de l’Etat providence d’une part, d’après décentralisation, d’autre part. Ces politiques sont en effet élaborées et mises en œuvre dans des contextes de décision qui associent une pluralité d’acteurs (institutionnels et non institutionnels) et qui accordent une visibilité nouvelle et un surcroît de légitimité à la négociation. » 20

A la faveur du lancement du plan Université 2000, les politiques d’implantation universitaire ont vu tout d’abord, avec l’implication des collectivités territoriales, le nombre de partenaires participant à leur financement augmenter. Elles sont également marquées par le recours croissant à la contractualisation pour formaliser les liens entre les partenaires. Elles sont enfin caractérisées par des mouvements de décentralisation-déconcentration des lieux de décision liés en particulier à leur intégration dans les contrats de plan Etat-région. Les politiques d’implantation universitaire sont donc un champ traditionnel d’intervention de l’Etat qui semble connaître des évolutions importantes. Elles permettent également d’envisager la période pré et post-décentralisation. Les politiques d’implantation universitaire nous apparaissent donc comme un laboratoire pertinent d’analyse de l’évolution du pilotage de l’action publique depuis les années 1960. Ce n’est cependant pas là leur seul apport scientifique potentiel. Les politiques d’implantation universitaire, si elles ne sont pas un terrain d’enquête complètement vierge, n’ont été que relativement récemment investiguées par les chercheurs en sciences sociales. La présente analyse s’intègre aussi dans un champ de recherche encore largement en voie de constitution.

Depuis longtemps en France, de nombreux chercheurs prenant pour objet l’université ne l’appréhendent pas comme un univers clos. Déjà en 1971, Terry N. Clark met l’accent sur l’importance de l’inscription dans des cercles débordant les frontières organisationnelles des facultés dans la réussite de la carrière enseignante 21 . Les travaux de Christine Musselin 22 et de Erhard Friedberg et Christine Musselin 23 mettent tous l’accent sur le fait que le gouvernement des universités ne peut s’appréhender qu’inscrit dans les relations tissées avec la tutelle et les disciplines. Comprendre le fonctionnement des universités, c’est alors régler la focale d’observation sur les établissements et leurs relations avec les instances disciplinaires et ministérielles. Au début des années 1990, toutefois un déplacement problématique s’opère. Si l’université n’est toujours pas appréhendée comme un univers clos, l’objectif du microscope se déplace vers les interactions qui existent entre les établissements et leurs multiples environnements locaux. Que les études prennent pour objet les bâtiments universitaires, les pratiques étudiantes, les pratiques de recherche ou les modes de financement des implantations, ce déplacement de la focale d’analyse est sensible dans de nombreuses disciplines des sciences humaines et sociales.

Ainsi, urbanistes et géographes interrogent l’insertion de l’université dans les quartiers urbains qui lui sont proches 24 et les interactions qui se nouent avec les populations 25 . Certaines études se centrent, quant à elles, sur les usages que font les étudiants de la ville 26 et sur les effets de la multiplication des sites universitaires sur les bassins de recrutement étudiant 27 . Des sociologues mènent des recherches sur l’insertion des diplômés dans le milieu économique local et sur l’influence de la présence de main d’œuvre qualifiée sur le dynamisme des entreprises ou des technopoles locaux 28 . D’autres études tentent de comprendre l’éventuelle insertion des pratiques de recherche dans l’environnement local 29 . Un dernier champ de recherche s’efforce enfin d’enquêter sur les logiques et les effets des relations tissées entre les institutions politiques locales, l’Etat et les universités dans le financement des bâtiments universitaires. C’est de ce dernier axe de recherche que nous sommes le plus proche. Bien que les recherches entreprises dans cette perspective ne datent que d’une quinzaine d’années, le champ de recherche est déjà balisé par des travaux fondateurs. Si elle partage de nombreux intérêts avec ces analyses, il nous semble que la recherche ici initiée présente une double altérité qui tient au choix du cas d’une grande ville comme terrain empirique et à celui de la période d’analyse retenue. Loin de vouloir à tout prix nous singulariser par rapport à la littérature déjà existante, nous cherchons ici avant tout à préciser notre démarche.

Le projet scientifique élaboré dans la thèse de Daniel Filâtre 30 met la question de l’autonomie locale au cœur de l’analyse. Les collectivités territoriales sont décrites comme porteuses d’une demande sociale locale. La décentralisation, en sanctionnant dans la sphère publique des évolutions sociales plus larges, participe selon l’auteur à la redéfinition des relations entre Etat et société civile et à la recomposition de la sphère publique. L’action des collectivités territoriales participe ainsi à la transformation sociale et à l’apparition de nouvelles formes de régulation 31 . Dans le cadre de cette problématique, les politiques d’implantation universitaire sont mobilisées pour comprendre comment les collectivités territoriales se saisissent d’enjeux novateurs pour s’approprier de l’autonomie. Cette entrée problématique conduit cependant à mettre l’accent sur l’action des collectivités territoriales. Elle amène également l’auteur à retenir prioritairement comme terrain des villes moyennes qui ont été particulièrement en pointe au milieu des années 1980 dans la revendication de leur légitimité à accueillir des « antennes universitaires » 32 . Nous choisissons nous à l’inverse d’investiguer sur le cas d’une grande ville et sur une période plus longue. Les travaux postérieurs de Daniel Filâtre 33 et ceux de François Baraize 34 , n’interrogent eux-aussi que la période récente. Il ne s’agit donc pas de prendre la mesure des changements dans la conduite de l’action publique au cours du temps.

La prise en compte du temps long n’est pas absente de l’axe problématique défini plus haut. Elle est au cœur de la démarche de certains travaux de Michel Grossetti. Le sociologue montre que les villes en participant, notamment à la charnière du XIXe et XXe siècle, au financement des activités d’enseignement supérieur et de recherche contribuent à façonner les systèmes locaux d’enseignement supérieur 35 . Il s’agit moins ici cependant de comparer des périodes que d’intégrer le temps long et de montrer la logique cumulative des interventions locales dans la structuration d’un système local d’enseignement supérieur et de recherche. On retrouve cette perspective dans la démarche initiée par Michel Grossetti, Martine Azam et Patricia Vannier 36 . Partant de la création de l’université toulousaine au Moyen-Âge, les auteurs retracent la complexification croissante des relations entre les établissements d’enseignement supérieur et l’alternance entre implication et retrait des collectivités territoriales et de l’Etat. Là encore, les auteurs cherchent bien à comprendre dans le temps long les étapes qui conduisent à la situation présente. A la différence de cette perspective, il ne s’agit pas de développer dans cette thèse une démarche purement diachronique mais plutôt de tenter de comparer deux projets d’abord compris synchroniquement.

Cette perspective, nous l’avons vue, en constituant un point de repère historique à la comparaison tente d’appréhender la portée exacte du changement dans la conduite de l’action publique. A trop se centrer sur l’implication récente des collectivités territoriales dans le développement universitaire, les chercheurs concluent parfois un peu vite à la radicalité des changements en cours 37 , perdent en recul historique et donc en capacité d’analyse. Ainsi, avant que la question des implantations universitaires ne redevienne un enjeu au cours des années 1990, elle a été l’objet de concurrence importante entre des villes au Moyen-Âge. Les cités de Nantes et Rennes se sont ainsi disputées l’université de Bretagne dès le XVe siècle 38 . Sans remonter aussi loin, les villes contribuent souvent au financement des bâtiments construits pour les universités à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle 39 . La précision de la période de référence dans la comparaison permet ainsi d’éviter d’inutiles confusions. Si changement il y a, ce serait donc avant tout par rapport aux programmes de construction universitaire réalisés dans les années 1960.

L’emploi d’une forme conditionnelle est volontaire. Alain Bourdin insiste bien sur la prudence qu’il convient d’observer avant de conclure aux relations croissantes entre l’université et son environnement :

‘« il existe donc en France une véritable mode, qui consiste à attribuer à l’université une « vocation » locale, alors que celle-ci n’est nullement démontrée, même si par ailleurs certaines universités entretiennent des relations très riches avec leur voisinage. Cette mode est d’autant plus redoutable qu’elle laisse supposer que dans d’autres pays cette vocation locale est établie depuis longtemps. Cela n’est pas démontré non plus et nécessiterait au moins de nombreuses nuances et explications. » 40

Si le déplacement de la focale d’analyse est heuristique, le repérage de l’insertion de l’université dans son milieu local doit être envisagé comme une question de recherche et non comme un résultat empirique valide. Le désintérêt local pour l’université objectivé dans la relégation de son implantation à la périphérie des agglomérations est un présupposé qui, s’il est socialement répandu, n’est pas scientifiquement prouvé. Le respect de cette nécessaire prudence nous conduit à formuler une question de départ des plus ouvertes. Pour paraphraser l’ouvrage célèbre de Robert A. Dahl 41 , elle peut se résumer dans un Qui gouverne les politiques d’implantation universitaire dans la décennie 1960 puis 1990 dans l’agglomération lyonnaise ? L’analyse ici développée tente donc de s’intégrer dans une réflexion sur l’évolution de la répartition du pouvoir des débuts de la Vème République à la période contemporaine à travers l’exemple des politiques publiques considérées.

Ce questionnement général s’appuie sur l’analyse de deux projets d’implantation universitaire sur le site lyonnais, l’un conduit dans les années 1960, Lacroix Laval, l’autre dans la période contemporaine, la Manufacture des Tabacs. C’est à partir de ces deux terrains clairement circonscrits que nous cherchons à proposer des éléments de réponse à la question de départ. C’est une option microscopique qui est ici choisie, revendiquée et assumée. Le parti pris intellectuel reste très inductif. Il n’élude cependant pas les questionnements qui ont conduit à la formalisation du projet de recherche et à la définition des dimensions de la réalité sociale qui ont été investiguées. Si la démarche promue accorde une place importante à la restitution des données de première main, elle est également sous-tendue par un questionnement problématique.

Notes
1.

Cette thèse a bénéficié d’une allocation de recherche du ministère de l’Education nationale pendant trois ans. Elle a ensuite été soutenue par l’attribution d’un poste d’attaché temporaire d’enseignement et de recherche à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon. C’est largement grâce au soutien de ces deux institutions que ce travail doctoral pu être mené à son terme.

2.

Le Groupe Paris Lyon et les amis de l’Université, Relations entre la cité, les universités et les grandes écoles, Actes du colloque tenu à Lyon le 29 novembre 1979, pp. 26-27.

3.

Jérôme Aust, Intercommunalité et politique locale. Le cas de la communauté de communes des Amognes, Mémoire de DEA de science politique, Institut d’Etudes Politiques de Lyon, 1999, 103 p.

4.

Comme l’illustre bien la parution de deux articles aux titres inversés dans la Revue française de science politique à quelques années d’intervalle. Patrick Le Galès, « Du gouvernement des villes à la gouvernance urbaine », Revue française de science politique, vol. 45, n°1, 1995, pp. 57-91 ; Bernard Jouve et Christian Lefèvre, « De la gouvernance urbaine au gouvernement des villes ? Permanence ou recomposition des cadres de l'action publique en Europe », Revue française de science politique, vol. 49, n°6, décembre 1999, pp. 835-853.

5.

Bruno Dumons et Gilles Pollet, « Espaces politiques et gouvernements municipaux dans la France de la IIIème République. Eclairages sur la sociogenèse de l’Etat contemporain », Politix, vol. 14, n°53, 2001, pp. 15-32.

6.

Joseph Fontaine et Patrick Hassenteufel, « Quelle sociologie du changement dans l’action publique ? Retour au terrain et refroidissement théorique » dans Joseph Fontaine et Patrick Hassenteufel (dir.), To change or not to Change. Les changements de l’action publique à l’épreuve du terrain, Rennes, PUR, 2002, p. 11.

7.

La tendance n’est cependant pas contemporaine. A la fin des années 1970, Pierre Birnbaum et Bertrand Badie dans leur Sociologie de l’Etat décrivent le processus de construction de l’Etat français, idéal-type de l’Etat, comme un processus continu d’institutionnalisation et de différenciation de la société civile sans distinguer des périodes ou des domaines de plus ou moins grande autonomie de la sphère étatique. Les deux auteurs notent ainsi que « contrairement à des idées reçues, il n’existe nulle rupture entre la centralisation de l’Ancien Régime, celle du XIXe siècle et celle de l’époque contemporaine. » Pierre Birnbaum et Bertrand Badie, Sociologie de l’Etat, Paris, Grasset, 1982 (1ère édition 1979), p. 182.

8.

Robert K. Merton note que « nous [les sociologues] ne sommes peut-être que des pygmées intellectuels, mais à la différence du trop modeste Newton, nous ne sommes pas portés par des épaules de géants. La tradition accumulée est encore si mince que les épaules des géants de la sociologie ne nous fournissent pas une base très solide. ». Robert K. Merton, Eléments de théorie et de méthode sociologique, Paris, Plon, 1965, p.13.

9.

Par exemple, dans une réponse polémique à Pierre Birnbaum, Manuel Castells note que « Quelle est la critique qu’on [les sociologues marxistes] adresse à la sociologie du pouvoir local ? Très simple : faire la sociologie de quelque chose qui n’existe pas. Car il n’y a pas de pouvoir local. » (Manuel Castells, « Remarques sur l’article de Pierre Birnbaum », Revue française de sociologie, vol. 15, n°2, avril-juin 1974, p. 239 ; sur la critique de la sociologie du pouvoir local voir aussi Manuel Castells, La question urbaine, Paris, Maspero, 1977, p. 309 et suivantes). Le degré d’autonomie reconnue à la « scène politique locale » est cependant variable selon les cas empiriques envisagés et les auteurs. Ainsi, chez Jean Lojkine, les études sur la métropole lyonnaise concluent à une indifférenciation du pouvoir central et du pouvoir local (Jean Lojkine, La politique urbaine dans la région lyonnaise. 1945-1972, Paris, Mouton, 1974, 294 p.) alors que l’étude sur Lille relève des oppositions dans les stratégies locales (Direction Départementale de l’Equipement, Ville de Lille…) et nationales (DATAR notamment). (Jean Lojkine, « Politique urbaine et pouvoir local », Revue française de sociologie, vol. 21, n°4, octobre-décembre 1980, pp. 633-651).

10.

Pour Manuel Castells, « l’économique est en dernière instance déterminante ». (Manuel Castells, La question urbaine, op. cit., p. 306).

11.

Patrick Le Galès et Arnaldo Bagnasco (dir.), Villes en Europe, Paris, La Découverte, 1997, 280 p. ; Patrick Le Galès, Le retour des villes européennes : sociétés urbaines, mondialisation, gouvernement et gouvernance, Paris, Presses de Sciences Po, 2003, 454 p.

12.

Jean Leca et Bruno Jobert, « Le dépérissement de l’Etat. A propos de l’Acteur et le système de Michel Crozier et Erhard Friedberg », Revue française de science politique, vol. 30, n°6, 1980, pp.1125-1167 ; Renaud Sainsaulieu, « Du système à l’acteur », L’année sociologique, vol. 31, 1981, pp. 447-458.

13.

Pierre Grémion, Le pouvoir périphérique. Bureaucrates et notables dans le système politique français, Paris, Seuil, 1976, 477 p. ; Pierre Grémion, « Résistance au changement dans l’administration territoriale : le cas des institutions régionales », Sociologie du travail, n°3, 1966, pp. 276-295. ; Pierre Grémion, « Introduction à une étude du système politico-administratif local », Sociologie du travail, vol. 12, n°1, janvier mars 1970, pp. 51-73.

14.

Jean-Pierre Worms, « Le préfet et ses notables », Sociologie du travail, n°3, 1966, pp. 249-275.

15.

Jean-Claude Thoenig, « La relation entre le centre et la périphérie. Une analyse systémique », Bulletin de l'IAAP, vol. 36, octobre-décembre 1975, pp. 77-123.

16.

Michel Crozier et Jean-Claude Thoenig, « La régulation des systèmes organisés complexes. Le cas du système politico-administratif local en France », Revue française de sociologie, n°1, janvier 1975, pp. 3-32.

17.

Albert Mabileau, « Variations sur le local » dans Albert Mabileau (dir.), A la recherche du local, Paris, L’Harmattan, 1993, pp. 21-28 ; Pierre Grémion, Le pouvoir périphérique…, op. cit., pp. 157-160.

18.

Francis Godard, « Recherche sur la ville : clercs ou experts ? », Sociologie du travail, vol. 37, n°2, juin 1995, pp. 317-326.

19.

Dominique Lorrain, « Gouverner, administrer, réguler », Les annales de la recherche urbaine, n°80-81, décembre 1998, p. 89.

20.

DATAR, Développement universitaire et développement local. L’impact du plan U2000. (1990-1995), Paris, La Documentation française, 1998, p. 75.

21.

Terry N. Clark, « Le patron et son cercle : clef de l’Université française », Revue française de sociologie, vol. 12, n°1, 1971, pp. 19-39.

22.

Ainsi la notion de configuration universitaire récemment développée se définit comme « le cadre au sein duquel s’inscrivent, prennent sens et se répondent le type de gouvernement développé par les établissements, le style de pilotage adopté par la tutelle et les modes de régulation internes des disciplines. » Christine Musselin, La longue marche des universités françaises, Paris, PUF, 2001, p. 170-171.

23.

Par exemple Erhard Friedberg et Christine Musselin, « Avant-propos », Sociologie du travail, vol. 31, n°4, 1989, pp. 422-423. ; Erhard Friedberg et Christine Musselin, « Conclusion » dans Erhard Friedberg et Christine Musselin (dir.), Le gouvernement des universités. Perspectives comparatives, Paris, L’Harmattan, 1992, p. 345. 

24.

Voir par exemple Magali Laurencin et Bernard Pouyet (dir.), L’université et la ville. Actes du colloque des 31 mai et 1 er juin 1990, Paris, Plan urbain, 1991, 250 p. ; Pierre Merlin, « L’université de masse et la ville »,  Espaces et sociétés, n°80-81, 1995, pp. 47-71 ; Nicole Commercon (dir.), Etude d'impact d'un nouveau site universitaire en centre-ville : la Manufacture des Tabacs à Lyon, Lyon Maison Rhône-Alpes des sciences de l'homme, 1994, 388 p. ; Serge Vassal, L’Europe des universités, Caen, LITEC, 1988, 625 p. 

25.

Raymond Curie, Banlieues et universités en Ile-de-France. Pouvoirs, intérêts et conflits entre institutions et habitants, Paris, L’Harmattan, 2001, 244 p. 

26.

Christian Pihet, « Dynamique universitaire et pratiques urbaines : les étudiants et Angers » dans Raymonde Suchet (dir.), Université droit de cité, Rennes, PUR, 1994, pp. 103-130 ; Rémy Allain, « Entre le campus et la ville. Etude des pratiques et perceptions de la ville par les étudiants des universités rennaises » dans Raymonde Suchet (dir.), Université…, op. cit., pp. 131-153.

27.

Par exemple Jean Pihan, « Le système des localisations universitaires et ses modes de régulation » dans Raymonde Sechet (dir.), Université…, op. cit., pp. 335-368 ; Jean-Luc Marchais, « Influence des délocalisations universitaires sur le recrutement des étudiants en Poitou-Charentes » dans Raymonde Suchet (dir.), Université…, op. cit., pp. 57-78.

28.

Michel Grossetti, « Enseignement supérieur et technopole. Le cas de l'informatique à Toulouse », Revue française de sociologie, vol. 31, n°3, juillet-septembre 1990, pp. 463-482.

29.

Josée Jeanneret, « Territorialisation des savoirs, savoirs territorialisés ? », Politiques et management public, vol. 12, n°2, juin 1994, pp. 53-74.

30.

Daniel Filâtre, Autonomie locale et décentralisation, Thèse pour le doctorat de sociologie sous la direction d’Alain Bourdin, Université de Toulouse Le Mirail, 1992, 483 p.

31.

« La décentralisation sanctionne par des mesures institutionnelles les évolutions sociales et leurs référents politiques. Elle accorde aux institutions locales de nouveaux modes d’action. Nous avons vu comment les collectivités locales pouvaient répondre à la demande sociale. Acteurs institués du milieu local, elles se placent à la charnière entre la sphère publique et la sphère privée. Ce faisant, leur capacité de communalisation les autorisent à assurer une part de l’action publique et de la régulation sociale, sous des formes qui dépendent de la relation entre l’état politique et l’état social. Elles trouvent là la source de leur autonomie ». Ibid.,p. 451.

32.

L’accent porté sur les villes moyennes se retrouve dans d’autres études. Par exemple Elisabeth Auclair et François Aballea, « Enjeux universitaires et stratégies municipales », Recherche sociale, n°119, juillet-septembre 1991, pp. 3-86 ; Elisabeth Auclair et François Aballea, Développement de la fonction universitaire et scientifique dans les stratégies municipales, Paris, Fondation pour la recherche sociale, 1991, 114 p.

33.

Daniel Filâtre, « Développement des universités et aménagement des territoires universitaires » dans François Dubet, Daniel Filâtre et François-Xavier Merrien, (dir.), Universités et villes, Paris, L’Harmattan, 1994, pp. 15-81.

34.

François Baraize, « La notion de secteur est elle encore centrale ? La négociation du sens dans l’enseignement supérieur », Pôle sud, n°4, mai 1996, pp.107-122 ; François Baraize, « L’entrée de l’enseignement supérieur dans les contrats de plan Etat-régions : la mise en réseau de la décision universitaire » dans CEPEL, La négociation des politiques contractuelles, Paris, L’Harmattan, 1996, pp. 133-168.

35.

Michel Grossetti, « Villes et institutions scientifiques : genèse des pôles scientifiques français », Les annales de la recherche urbaine, n°62-63, juin 1994, pp. 6-15.

36.

Michel Grossetti, Martine Azam et Patricia Vannier, « Généalogie »dans Michel Grossetti (dir.), Université et territoire. Un système local d’enseignement supérieur, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1994, pp. 15-114.

37.

A ce titre, le rapport conduit sous l’égide de la DATAR n’est pas exempt de tout reproche. L’un de ces auteurs note ainsi que « l’intervention des collectivités locales dans le champ universitaire et le processus de territorialisation des universités qui en découle constituent un changement radical ». Daniel Filâtre, « Territorialisation des universités et systèmes régionaux d’enseignement supérieur » dans DATAR, Développement universitaire et développement territorial..., op. cit.,p. 113. 

38.

Daniel Le Couedic note ainsi que « l’intérêt brusquement porté aux implantations universitaires ces dernières années a pu laisser croire qu’un rôle nouveau leur était dévolu. La chose est peu sûre. Cinq siècles durant, en Bretagne, l’enseignement supérieur a été tantôt le prétexte à de vastes et conquérantes élaborations géopolitiques, tantôt l’otage de ceux qui étaient les victimes réelles ou supposées de ces manœuvres. » Daniel Le Couedic, « L’université et ses Bretagnes. Rivalités entre Nantes, Rennes, Brest et Lorient », Les annales de la recherche urbaine, n°62-63, juin 1994, p. 29.

39.

Par exemple, la Ville de Paris apporte les terrains nécessaires et finance à hauteur de la moitié de son coût la construction de la Sorbonne nouvelle. (René Blanchet, « Discours d’accueil » dans Ministère de l’Education nationale, de la recherche et de la technologie, Quelle université pour le troisième millénaire ? de U2000 à U3M. Actes du colloque, 3 et 4 décembre 1998, Paris, La Sorbonne, p. 5.) La Ville de Lyon, au début du XXe siècle, a également financé les bâtiments universitaires situés sur le quai Claude Bernard.

40.

Alain Bourdin, « Université et ville : les termes d’une question », Espaces et sociétés, n°80-81, 1995, p. 17.

41.

Robert A. Dahl, Qui gouverne ?, Paris, Armand Colin, 1971, 374 p.