Entretien avec Charles DELFANTE – Responsable de l’atelier d’urbanisme de la Ville de Lyon dans les années 1960 –27 juillet 2004

L’entretien se déroule au domicile de l’interviewé dans le 2ème arrondissement lyonnais. Charles DELFANTE nous reçoit une demi-heure. Il évoque avec nous de nombreux sujets en s’écartant souvent du dossier de Lacroix Laval pour parler de la politique de grands travaux menés sous Louis PRADEL.

Charles DELFANTE est lyonnais. Il a entamé une carrière d’urbaniste au ministère de la Construction. Au début des années 1960, il revient à Lyon et devient le responsable de l’Atelier d’urbanisme de la Ville de Lyon. Son activité professionnelle ne se limite cependant pas au site lyonnais : il fait des plans d’aménagement pour de nombreuses villes de France (Clermont-Ferrand…) et mène parallèlement une carrière de conseil urbanistique sur le plan international. Il donne des cours d’urbanisme aux Etats-Unis. Il exerce des activités de conseil jusqu’au mandat de Michel Noir qui le renvoie de l’agence d’urbanisme.

Il s’entend très bien avec Louis PRADEL et devient son conseiller urbanistique l’ensemble de son mandat. La municipalité lyonnaise est engagée dans une série de grands travaux : Edouard HERRIOT a en effet laissé une Ville en bonne santé financière en 1957. Louis PRADEL a donc « des projets et de l’argent ». Charles DELFANTE tente donc de structurer les projets du maire qui est décrit comme un grand bâtisseur. Charles DELFANTE développe rapidement une relation de confiance avec le maire de Lyon. Louis PRADEL est décrit comme quelqu’un qui a une grande admiration pour les « savants ». Il a des projets propres pour l’université : il veut ainsi réserver des terrains militaires à la caserne Sergent BLANDAN pour y implanter des facultés. Le ministère de l’Education nationale ne débloque cependant jamais les fonds nécessaires. Charles DELFANTE nous décrit les services centraux comme formalistes, bureaucratiques et complètement dépourvus d’initiative. Il nous donne l’exemple d’un retrait de subvention pour la bibliothèque de la Part-Dieu. En raison d’un problème de plan mineur, le ministère de la Culture refuse dans un premier temps d’attribuer la subvention. Il faut l’intervention du maire de Lyon pour que le problème soit solutionné. Il avait proposé à Edgar PISANI une réforme importante qui consistait à regrouper l’ensemble des crédits budgétaires des différents ministères sur une ligne budgétaire unique. L’initiative aurait permis de considérablement accélérer l’engagement des crédits et des travaux. La mesure est cependant refusée par Bercy qui tient au découpage ministériel du budget de l’Etat.

Charles DELFANTE dans cette période n’entretenait que peu de contacts avec les universitaires lyonnais. Il nous décrit des professeurs très replié sur leur faculté, leur cours et leur activité de recherche, « ne s’intéressant guère à ce qui se passe en ville ». Il pense d’ailleurs que cela n’a pas changé. Il avait dans les années 1960 tenté de rencontrer les universitaires lyonnais en organisant une grande réunion. Si la manifestation avait eu un relatif succès, les contacts n’avaient cependant pas duré. Charles DELFANTE avait quelques contacts essentiellement avec les professeurs de géographie comme Jean PELLETIER, qui étaient associés aux travaux de l’Atelier d’urbanisme. Ses contacts ne débordaient cependant pas ce cercle de spécialistes de l’urbanisme. Il nous décrit Bron-Parilly comme « l’équivalent d’un grand ensemble au niveau universitaire ». Coupé de la ville, isolé du cœur de l’agglomération, il met en cause l’architecte René DOTTELONDE qui a élaboré les plans de construction sans s’intéresser à l’aménagement du site. Lacroix-Laval lui semble, en comparaison, présenter de nombreux avantages. Il fallait simplement l’aménager mais eu égard aux disponibilités financières des communes de l’ouest lyonnais cela n’aurait pas posé de problèmes (Charbonnières-Les-Bains commune sur laquelle est la quasi-totalité du domaine est des plus riches : elle dispose en effet d’un casino qui lui assure de remarquables revenus fiscaux). Il regrette l’absence d’implantation dans l’ouest lyonnais. Il note que la décision de faire Bron-Parilly a été prise dans le tumulte de l’après –1968. Un inspecteur général de l’Education nationale (Mr RENARD) voulait mettre les facultés à Bron-Parilly parce « les étudiants voulaient aller dans l’est lyonnais ».