Entretien avec Michel LAFERRERE – Assesseur du doyen de la faculté des lettres de 1962 à 1965 - 21 janvier 2003

L’entretien se déroule après une réunion de l’académie de Lyon. Il dure une heure. Michel LAFERRERE, s’il est disposé à parler du projet de Lacroix Laval, l’est beaucoup moins pour aborder la période de l’après 1968. Sur notre insistance, il répond cependant à nos questions.

En 1962, j’étais deuxième assesseur du doyen de la faculté des lettres de Lyon chargé justement du problème posé par l’augmentation des effectifs c’est à dire recherche de terrain et de bâtiments pour accueillir les étudiants qui arrivaient fort nombreux à cette époque là. J’étais chargé des statistiques et puis de chercher des solutions d’urgence et également d’essayer de voir un peu plus loin. Et de voir ce qui était nécessaire pour faire face à cet afflux d’étudiants. C’est un phénomène qui date du début des années 1960, l’afflux d’étudiants dans les universités et plus spécialement au sein de la faculté des lettres. Parce que l’entrée dans la faculté des lettres est plus abordable que dans les sciences ou la médecine et moins rébarbative que le droit. Par ailleurs, dans les carrières littéraires, les femmes pouvaient progresser plus vite que dans les autres facultés. Très vite il y a eu des professeurs féminins dans les carrières littéraires et y compris dans les universités. Alors qu’à cette période en médecine, en sciences et en droit il y en avait très peu. On a eu donc un afflux d’étudiants coïncidant avec la démographie, mais également un afflux d’étudiantes représentant la promotion féminine dont on parle beaucoup maintenant mais cela a commencé à ce moment là. C’est surtout dans les facultés des lettres que cela s’est manifesté. En moyenne autant que je me souvienne dans ces années du début 1960, la progression des effectifs en lettres étaient de 7% en moyenne. Il y a eu des pointes plus considérables. Je passe sur toutes les solutions provisoires que j’ai essayé de mettre en œuvre : récupération de bâtiments désaffectés, des choses comme cela, construction d’un nouveau bâtiment à La Doua avec l’architecte FAYOLLE. Cela a été une opération bien menée. La décision était prise au mois de mars et le bâtiment était prêt au mois d’octobre. On avait fait vite. C’était un programme d’urgence. Mais j’ai pensé qu’il fallait voir plus loin et qu’il fallait trouver un terrain qui soit susceptible d’accueillir ces étudiants qui venaient par dizaine de milliers. Comment est ce que le dossier de Lacroix Laval est arrivé sur le tapis, je n’en sais plus rien. Je pense que ce domaine a été mis en vente et qu’au ministère de l’Equipement, il y a des gens qui ont pensé qu’il serait utile de l’acheter. Je crois que le ministère de l’Equipement a joué un rôle déterminant là dedans. En tous les cas, je m’entendais très bien avec le responsable des constructions scolaires et universitaires de l’équipement. J’avais fait sa connaissance quand je travaillais à la CCI entre 1954 et 1960. Nous nous connaissions donc. J’ai essayé de préparer ce qu’on appelle un programme pédagogique de façon à ce que le dossier passe devant la commission centrale des opérations immobilières, la CCOI. Ce dossier représentait tout de même une somme importante de travail parce qu’il fallait demander à tous les collègues de la faculté des lettres leurs effectifs, leurs progressions dans les années précédentes et comment on pouvait prévoir l’évolution pour les années à venir. Alors, le dossier a abouti puisque la CCOI a donné un avis favorable et le domaine a été acheté. Il a été acheté 450 Millions. Dans cet article du Progrès, je regrette l’abandon de ce projet. Cela a été à mon avis une erreur très grave. Une très grave erreur. L’emplacement était excellent. Il permettait de prévoir un grand avenir, l’environnement était merveilleux avec un parc entièrement aménagé. Que dire encore ? L’opération a été assez vite. Le préfet de l’époque, qui était le préfet RICARD, soutenait beaucoup le projet.

Vous m’avez parlé d’un responsable du ministère de la reconstruction et du logement à l’époque. Vous sentiez un soutien de ces fonctionnaires ?

Oui, oui.

Il y a eu un programme pédagogique pour Lacroix Laval. Qu’est ce qui a fait que les travaux n’ont jamais véritablement démarré ?

Alors en 1967, le doyen de la Faculté des Lettres ne s’est pas représenté et on a changé d’équipe. Alors je dois dire que ce qui m’a également déçu, c’est que la Faculté de droit et la Faculté des sciences qui étaient également partie prenante ont laissé tombé tout cela. Le programme pédagogique, moi je l’ai fait pour la Faculté des lettres mais je crois qu’il y avait aussi un programme pour la faculté de droit et des sciences. Vous l’avez retrouvé ce programme dans les archives ?

Moi j’ai retrouvé des traces de programmes pédagogique. Ils devaient associer des enseignement de lettres et sciences humaines, sciences économiques et droit, sciences.

Droit et sciences économiques c’était lié. Les sciences étaient aussi partie prenante. Oui, et tout le monde a laissé tomber. Ceci s’explique pour les scientifiques qui avaient trouvé leur affaire à La Doua, Lacroix Laval ne les intéressait donc pas vraiment. Ce n’était pas urgent pour eux. Et puis la croissance de leurs effectifs était tout de même beaucoup moins forte que pour nous. En revanche, pour le droit, je n’ai pas compris qu’ils laissent tomber. Mais il faut se remettre dans les mentalités de l’époque. A ce moment là, les patrons des lettres et du droit étaient assez conservateurs. Ils avaient l’habitude de faire leur cours à proximité de leur résidence en général. C’était en plein centre de Lyon, cela leur plaisait bien et ils ne voyaient pas la nécessité d’aller à Charbonnières. Et puis, vous savez dans ce milieu universitaire, il y a énormément de questions de personnes, de petites jalousies qui jouent à plein. Je dois dire qu’à la Faculté des lettres le doyen a été débarqué avec ses assesseurs et puis voilà, cela en est resté là. Mais cela a été une grave erreur. Ce qui a définitivement enterré le projet c’est 1968. Personne ne s’occupait plus du projet alors qu’il existait toujours. Les terrains avaient été achetés et donc en principe les choses auraient du suivre leur cours. 1968 a tout balayé. A ce moment-là, il en a été question du domaine de Lacroix Laval et les étudiants rêvaient que d’une chose, c’était de fraterniser avec les ouvriers de chez Berliet. Donc voilà. Quand l’idéologie s’y met, vous savez, il est extrêmement difficile de faire quoique ce soit. L’inconvénient tout de même c’est tout de même la faillite des autorités départementales. Parce que tout de même, la DDE avait des relations étroites avec le conseil général. Les élus du département auraient pu faire quelque chose. Et puis, le rectorat aurait pu également faire quelque chose.

Qu’est-ce qui explique que les élus et les fonctionnaires n’aient rien fait ?

La peur. 1968 leur a fait peur. Ils n’ont rien compris. Encore qu’il n’y avait pas grand chose à comprendre, le mouvement était assez stupide finalement. Et dans ces cas là quand on détient une parcelle d’autorité, il faut s’en servir. Ils ont complètement capitulé. Ils se sont dits : « les étudiants veulent aller à Bron Parilly eh bien, très bien, envoyons les à Bron ». Surtout qu’ils nous fichent la paix. C’était d’autant plus absurde que le terrain de Bron Parilly n’a rien de séduisant dans un enchevêtrement de voirie assez impressionnant. Le parc de Parilly n’a plus beaucoup d’intérêt non plus. Et par ailleurs c’était très cher ; c’était le même prix à quelque francs près que Lacroix Laval. Je me souviens très bien du chiffre. On a acheté 8,5 ha pour la même somme que celle qui avait été consacrée à l’achat de 120 ha dont 35 ha étaient vraiment utilisables. Dans les 120 ha, il y avait beaucoup de ravins, bon, pas des ravins très profonds. C’est dans un rapport de 1 à 10. C’est pas glorieux, cette affaire et vous pouvez le dire dans votre thèse. C’est un effondrement de l’autorité. Une absence totale de responsabilité du milieu universitaire, cela ne m’étonne pas beaucoup. J’ai toujours eu beaucoup de mal à le comprendre et je ne l’ai pas encore complètement compris.

Ce que montrent les archives, c’est qu’il n’y a pas que les étudiants qui soutiennent le projet. Mais il y a également les gens de la faculté des lettres.

Ah ben, bien sûr. Ce n’est pas à mettre à leur crédit. Les professeurs, les assistants, les maîtres assistants soutenaient le projet, pas tous quand même. Certains ont essayé de résister. Ce n’est pas à des étudiants jeunes, quelque peu farfelus, de peser comme cela sur les décisions. S’ils ont obtenu satisfaction, c’est parce que ceux qui auraient dû dire : « cette implantation est ridicule et sans intérêt » ne l’ont pas dit. Ils ont fait l’inverse, ils ont dit aux étudiants : « vous avez bien raison de soutenir un projet dans la banlieue ouvrière de Lyon ! ». J’ai même entendu dans ces assemblées générales de 1968 dont je garde un très mauvais souvenir parce que je n’ai jamais entendu autant de bêtises que dans cette période-là, j’ai entendu des professeurs dire : « Bron Parilly ce n’est pas mal parce que si nous ne faisons rien à l’est, c’est l’université de Grenoble qui va capter les étudiants de l’est lyonnais. » Mais 1968, c’est cela, n’importe qui disait n’importe quoi. Et les autorités responsables capitulaient. Donc on a fait Bron, dans la précipitation.

Il y a une partie des universitaires qui soutenaient Lacroix Laval à la Faculté de droit…

Ils ne se sont pas beaucoup manifestés. Ou alors ils le faisaient dans un esprit politique en disant : « Bron c’est le projet de la gauche et nous, nous sommes la droite ». Mais tout cela, c’est de l’habillage. En réalité ils n’ont strictement rien fait. Ils n’avaient déjà pas fait grand chose pour préparer le programme pédagogique. Cela, je peux vous le dire.

Cela a été difficile de faire collaborer ces différentes facultés quand vous avez voulu élaborer le programme pédagogique ?

Non, non. J’ai travaillé beaucoup à prendre des rendez-vous à essayer d’obtenir des avis. Mais cela n’a jamais fait l’objet d’une véritable commission de travail. Il y a quelque chose que j’avais oublié : il n’y avait pas de services constructeurs au rectorat quand j’ai commencé à m’occuper de cela. Le service constructeur du rectorat a été créé plus tard vers 1963, 1964. On a recruté des gens bien sympathiques mais qui n’étaient pas d’une compétence extraordinaire : c’est moi qui les ai initiés à pas mal de choses. Je me suis beaucoup appuyé sur le doyen de la faculté des sciences, le doyen Braconnier. Voilà un universitaire qui savait prendre ses responsabilités. Il connaissait très bien les services du ministère. Chaque fois que j’avais un problème, j’allais le voir. Mais bon, les scientifiques, ils avaient La Doua, ils avaient l’oreille du ministère parce que c’est l’époque où la France fait tout de même un gros effort scientifique et industriel. C’est l’époque des trente Glorieuses. La France investit beaucoup dans des applications de physique notamment l’énergie nucléaire. Ils ont eu des masses énormes de crédits et un très grand nombre de postes. Ce domaine de La Doua était de toute façon magnifique. Mais je dois dire que le doyen Braconnier m’a beaucoup aidé. Il est mort prématurément. Sans lui, je ne sais pas trop comment je m’en serai tiré. Si en m’appuyant sur les services de l’Equipement. Mais c’était tout de même un collègue Braconnier. J’avais également un bon ami à la direction régionale de l’INSEE. Il m’avait montré comment présenter les statistiques, comment faire des courbes, comment faire des projections… La CCOI a donné un avis favorable. Mais je n’ai pas fait un programme pédagogique uniquement pour Lacroix Laval, j’en ai fait un également pour La Doua. Là aussi il a fallu faire un programme pédagogique. La récupération d’un ancien hôpital Rue Pasteur. Le service constructeur du rectorat m’a même demandé un programme pédagogique pour le remplacement d’une chaudière ! Bon, je leur ai répondu qu’il ne fallait pas exagérer. Je n’allais pas faire un programme pédagogique pour le remplacement d’une chaudière. Mais c’était pour vous donner un exemple du climat d’improvisation de cette époque là. J’ai ensuite regretté que mes collègues de la faculté des lettres et surtout ceux de la faculté de droit se soient beaucoup impliqués dans le programme de Lacroix Laval. Il faut dire que le climat de la faculté des lettres était un climat dominé par les langues anciennes, la formation classique, latin, grec, archéologie. Et puis alors, l’histoire et la géographie commençaient à se développer un peu et puis surtout les langues vivantes qui se développaient beaucoup. Et puis les lettres modernes. Mais les achats de locaux, de matériels, cela ne les passionnait pas. Quitte d’ailleurs à protester périodiquement en disant : « mais les amphis sont pleins, comment se fait il que nos locaux soient surchargés. On manque de salles, on ne s’occupe pas de nous.» Quand on leur a proposé cette solution, ils n’ont dit ni oui ni non. Certains se sont mobilisés mais ils ne se sont pas vraiment engagés. Le projet de Lacroix Laval, mais déjà celui de La Doua, ils n’avaient pas l’habitude de se déplacer. Ils avaient l’habitude de faire leur cours sur les quais. Cela leur convenait très bien : la plupart habitait dans le centre de Lyon, ce qui leur permettait d’aller à pied faire leurs cours et ils ne voyaient pas du tout que les choses allaient complètement changer avec la massification de l’enseignement supérieur. Cette massification, on ne peut pas dire qu’elle leur plaisait beaucoup. Mes collègues qui enseignaient le grec, le latin, la linguistique, l’archéologie ne s’intéressaient absolument pas à cela.

Et vous étiez en lien avec le rectorat ?

Ah bien sûr. J’ai eu de bons rapports avec le recteur LOUIS qui m’a quand même soutenu. Mais la décision a été prise : on a acheté le terrain. Mais ensuite, le recteur à l’époque, il présidait un conseil de l’université qui réunissait les doyens des quatre facultés qui venaient présenter leurs budgets, une fois par an. Et puis c’est tout : il n’avait pas d’autorité sur les facultés. Chaque faculté était un établissement indépendant. Le doyen était vraiment un chef d’établissement.

Arrive la crise de 1968. Le futur du domaine de Lacroix Laval est lié à la recomposition des universités. Cette loi d’orientation, elle a été ressentie comment au sein de la Faculté de lettres ?

Vaste sujet. Je ne peux pas aborder complètement ce sujet. Je ne pense pas que la loi d’orientation ait été une bonne idée. Elle a introduit la politique au sein des facultés. Sans doute, fallait il faire évoluer les choses. Mais pff. Sur le plan de l’enseignement en tous les cas, cela n’a pas été bon. En tous les cas, en ce qui concerne les lettres. En lettres, le système était organisé par des certificats d’études supérieures, dans chaque certificat, il y avait au moins trois ou quatre professeurs responsables qui faisaient des cours magistraux avec des assistants chargés des travaux pratiques en général la licence était composé de 4 certificats avec un jury pour chaque certificat. Il y avait deux sessions. Cette organisation collective m’a toujours paru pour moi satisfaisante. La décision se faisait dans les jurys, les notes étaient mises et le jury prenait sa décision. Avoir remplacé tout cela par des unités de valeur sur un modèle vaguement américain. On s’est orienté vers des licences de 8, 12, 15 certificats, cela était laissé à l’appréciation des universités. C’était une vraie balkanisation de l’enseignement supérieur qui a donné de très mauvais résultats. Dans la structure en certificats , il y avait trois éléments : le cours magistral de chaque professeur participant aux certificats, en général l’écrit portait là-dessus, les assistants faisaient les travaux pratiques qui, en histoire, avaient une grande importance, et puis les étudiants devaient travailler eux-mêmes un programme plus vaste sur lequel ils étaient interrogés à l’oral. Ce programme, ils le travaillaient sur une bibliographie qui leur était donnée. On avait donc, quand on faisait un certificat d’histoire du Moyen-Age, un cours très approfondi sur un aspect précis de l’histoire du Moyen Age mais on devait aussi acquérir l’ensemble des connaissances nécessaires à la connaissance de la période. Et puis on devait aussi savoir déchiffrer des manuscrits, des textes anciens et savoir aussi un peu de latin pour être capable de lire ces documents. Cela vous donnait une culture générale, si vous additionnez, l’histoire du Moyen-Age, l’histoire ancienne, l’histoire moderne et contemporaine et quelques certificats de géographique, vous aviez une culture générale en histoire géographie qui était à mon avis tout à fait intéressante. En géographie, on avait deux certificats d’histoire et deux certificats de géographie, et là aussi on avait une culture générale. Récemment Luc FERRY a publié dans Le Monde l’absence de culture générale chez les étudiants qui sortent de l’université. Et il en indique la cause d’ailleurs ; les gens, quand ils arrivent dans les universités, tombent dans des spécialisations qui sont beaucoup trop étroites. Ils tombent dans des unités de valeur où on enseigne La princesse de Clèves pour une UV de littérature française. C’est pour cela que la loi FAURE, je ne l’ai jamais beaucoup appréciée. Alors il y a eu aussi le fait que le gouvernement s’est très mal comporté. Il a laissé les universités pataugé dans la confection de statuts, chacune pouvait adopter un statut propre. C’est complètement inconcevable. On n’avait aucun modèle général. On aurait pu quand même penser, qu’à Paris avec des juristes compétents, on aurait pu élaborer un modèle de statuts. On a perdu un temps considérable à élaborer des modèles de statuts, dans des assemblées constitutives qui duraient toute la nuit. Là derrière, se profilaient des questions de personnes bien entendu et puis de plus en plus des questions politiques.

C’est ce qui explique la difficulté des universitaires lyonnais à aboutir à un consensus sur la définition des universités parce que cela a été particulièrement long…

Oui, oui. Pff, j’aime mieux ne plus parler de cette période. Nous avons tous perdu notre temps. L’enseignement universitaire y a beaucoup perdu. D’ailleurs, on commence à s’en apercevoir les effectifs baissent depuis quelques années. C’est la première fois que cela arrive. Et puis une fois que la politique et le syndicalisme se mettent quelque part, dans un climat des plus passionnels cela devient irrationnel.

Dans les archives consultées, moi, j’ai notamment vu que la question du regroupement des UER qui ont été constituées, elle bute notamment sur la question de la définition des implantations géographiques futures. Avec des UER de lettres qui sont plutôt dirigées vers Bron et puis celles de la faculté de droit vers Lacroix Laval…

Je ne peux pas vous répondre là dessus. On a beaucoup parlé, oui, de la pluridisciplinarité. Alors, effectivement, en principe, la loi d’orientation devait regrouper des juristes, des littéraires, des scientifiques mais c’est quelque chose qui n’a jamais abouti à rien. Le droit a gardé ses structures, nous avons gardé nos disciplines. Il y a eu moins de pluridisciplinarité qu’auparavant parce qu’avant il y avait des licences libres. Ces licences libres, elles permettaient cela. Moi, j’avais créé un certificat de démographie qui intéressait les étudiants en droit, les lettres, les sciences et même la médecine. On avait créé un certificat de démographie dans un institut de démographie qui était pluridisciplinaire où intervenaient des médecins, des juristes et des littéraires. Eh bien avec la loi d’orientation, cela a complètement disparu. Cela n’a pas pu trouver place dans la loi d’orientation.

Qu’est ce qui explique justement cette difficulté à créer des structures qui soient réellement pluridisciplinaires tant pour les UER que pour leur regroupement en universités ?

Je ne sais pas bien ,il y a tellement de facteurs qui interviennent, de facteurs là-dedans. L’universitaire est un enseignant chercheur spécialisé. A mon avis, le principal de la loi d’orientation avec le système des UV est de renforcer cette tendance à la spécialisation. Ce n’est pas en juxtaposant des structures d’enseignement et de recherche spécialisées qu’on arrive à une culture générale, certainement pas. La science se développe dans tous les sens. C’est EINSTEIN qui compare les équipes scientifiques à des nébuleuses qui éclatent : les gens se trouvent de plus en plus isolés les uns des autres, c’est la loi de la spécialisation scientifique. On est bien obligé de respecter cela. Mais si on veut prendre en charge en même temps des étudiants et leur donner une formation, je reviens à ce problème de culture générale, à ce moment là, il faut faire un effort de pluridisciplinarité intelligente mais au sein d’une spécialisation. Ce qui n’est pas du tout évident. Mais en tous les cas, le système des UV n’a rien donné de bon. Je ne crois pas que cela soit lié à la localisation. Si le milieu des juristes a semblé soutenir le projet de Lacroix Laval, c’est parce qu’ils ne voulaient pas aller à Bron Parilly. Et pour des raisons de caractère idéologique et pour des raisons, j’ose espérer pratiques, mais ce n’est même pas sûr. Parce que les gens en fait ne connaissaient pas les lieux, ni à Lacroix Laval ni à Bron Parilly. Beaucoup qui étaient pour Bron Parilly n’y étaient jamais allés avant. Il n’y a eu aucune présentation intelligente du projet de Bron Parilly avec des cartes pour montrer où cela se situait exactement. On était dans des assemblées générales qui étaient tumultueuses. Mais même, j’ai des souvenirs personnels. J’avais donc travaillé toutes ces questions, mais je n’étais pas élu, dans je ne sais plus quelle assemblée qui devait discuter de cela, le responsable m’a dit : « il faut que vous veniez parce que vous connaissez bien le sujet. » Je suis venu et il y a deux ou trois étudiants qui ont dit : « mais Monsieur LAFERRERE, il ne fait pas partie de cette assemblée. »Et j’ai dû sortir. Voyez. Non, c’est triste tout cela. J’en veux beaucoup au gouvernement de n’avoir pas donné un coup d’arrêt à cela, parce que cette atmosphère fantaisiste, idéologique, donnant la parole à n’importe qui, a cultivé l’irresponsabilité. Il y avait des gens qui prenaient la parole qui étaient complètement irresponsables. Des étudiants mais aussi des enseignants. N’importe quoi. Cela est très mauvais. Il y a un moment où il faut dire : « allez, on arrête la récréation. » Ca, on ne l’a finalement jamais dit. Cela s’est apaisé comme cela, petit à petit. Jamais aucun ministre n’a eu le courage de dire : « cela suffit. »

En juin 1969, il y a quand même des arrêtés qui constituent les universités avec une localisation géographique : Lyon Ouest, Lyon Est, La Doua…

Mais jamais personne n’y est allé. Oui, c’était comme cela des décrets, pff… Non, il s’est constitué deux grandes universités, Lyon I et Lyon II ; là, il y a eu des structures de créées. Les facultés ont disparu. Et puis ensuite, il y a eu la scission Lyon II, Lyon III. Lyon I a survécu parce que finalement il y a eu, à l’intérieur de Lyon I, quand même deux blocs qui ne sont pas vraiment mélangés. Je suis mal placé pour en parler, je n’en fais pas partie, mais je vois bien que cela ne s’est jamais vraiment mélangé. Il y avait quand même beaucoup d’utopie là dedans. Sur le plan pratique, si les gens n’ont pas envie de travailler ensemble si on ne voit pas surtout le type de débouchés auxquels cela aboutit, comment voulez-vous que les gens se passionnent pour des combinaisons qui sont des combinaisons largement intellectuelles mais qui ne débouchent sur rien de pratique pour les étudiants. Parce que les concours, par exemple pour les disciplines littéraire, le seul débouché c’est l’enseignement. Avec deux catégories de concours, le CAPES et l’agrégation. CAPES et agrégation sont restés ce qu’ils étaient. Alors, à partir de ce moment là quel est l’intérêt. Intellectuellement, oui, cela serait très intéressant de faire un cours sur l’histoire du droit avec des spécialistes d’histoire ancienne, et d’histoire du droit romain. Mais en fait cela ne s’est jamais fait. Bon, il ne faudra pas mettre tout ce que je vous dis dans votre travail, il y a beaucoup d’approximations. On s’éloigne de votre sujet.

Mais moi cela me paraît directement lié à la création des universités… Lacroix Laval, le projet de constitution d’une université à Lacroix Laval apparaît même dans les statuts de l’ancienne Lyon II…

Vous m’étonnez, dans les statuts ?

En tous les cas, que l’université Lyon II était provisoire….

Ah bon peut être.

Ce n’était peut être pas dans les statuts….

Oui parce que les statuts, ce sont des divisions entre départements, la définition des modalités d’élection d’un président qui est élu par un conseil….

En tous les cas, le projet il existe encore après 1968…

Oui, en 1968-69, est-ce que Lyon I et Lyon II sont déjà créés en 1969 ? J’en doute un peu… En tous les cas c’est tout de même incroyable que la commission centrale des affaires immobilières ait donné un avis favorable à l’achat du domaine de Bron. Elle a été court-circuitée, moi, c’est ce que je crois. C’est comme le centre d’échange de Lyon Perrache. Les bâtiments de France ont été consultés quand le chantier était déjà commencé. Il faut le savoir. C’est un point qui devrait vous intéresser en études politiques : dans une certaine ambiance en France, on prend des libertés extraordinaires avec le droit, avec le fonctionnement normal d’un Etat. Le centre d’échange de Perrache, c’est quelque chose d’absolument scandaleux. Parce que Monsieur PRADEL avait une très grande aura, à Paris, personne n’osait dire : « mais, attendez, vous ne pouvez pas commencer le chantier puisque les bâtiments de France n’ont pas encore donné d’avis. » Personne n’a soulevé le problème. C’est très certainement la même chose pour la CCOI. C’est ce que je laisse entendre dans cet article du Progrès. Je ne le dis pas parce que je n’en sais rien. Moi, on m’a demandé un assez gros travail pour persuader la CCOI, il a fallu que le Préfet RICARD s’empare du dossier pour le faire avancer. Et puis, Bron Parilly, il me semble que l’idée était lancée au mois de septembre et puis au mois de décembre s’était acheté ou à peu près. C’est à peu près cela, cela s’est fait extrêmement vite. Alors, comme j’ai profité d’un programme d’urgence pour faire construire un bâtiment à La Doua, je comprends très bien que l’on prépare des procédures d’urgence. Quand c ‘est urgent, il faut avancer. Mais là, tout de même. En tous les cas, la CCOI aurait dû reprendre le dossier de Lacroix Laval et dire : « vous me faîtes acheter pour le même prix, 8 ha et demi et nous avons déjà acheté. » Alors qu’est ce que cela veut dire ? Mais personne n’a fait le rapprochement. Parce que encore une fois, il fallait calmer les étudiants, il ne fallait plus qu’il fassent grève dans la rue. Il faut bien dire qu’ils étaient en grève perpétuellement, l’université Lyon II était en grève presque la moitié de l’année. C’est d’ailleurs quand même un peu à l’origine de la scission avec Lyon III. Dès que Lyon III a été créé, les grèves ont cessé à Lyon II. Je suis formel là dessus. On ne pouvait pas continuer comme cela dans cette pagaille et dans cette démagogie. Dès qu’un groupe d’étudiants intervenait, disait : « c’est inadmissible, nous faisons grève. » Les profs ne disaient rien, on disait : « mais, vous avez bien raison. » Il n’y avait aucune valeur éducative dans cette loi-là.

Qu’est ce qui, pour vous, explique la scission entre Lyon II et Lyon III ?

Pour mon compte, c’est cela. Je ne pouvais pas supporter ce climat d’irresponsabilité à Lyon II.

On évoque souvent des clivages politiques…

Si vous voulez, mais qu’est ce que c’est que la politique ? C’est pas de la politique au sens noble du terme politique. Ce sont des idéologies, de vagues idéologies gauchisantes, mais l’analyse des idéologies de 1968, vous savez, cela ne m’a jamais beaucoup intéressé. Il est interdit d’interdire… Cet espèce de jeunisme, c’est assez ridicule. Si on nous avait demandé quand on avait leur âge : « Est-ce que vous voulez faire du Moyen-Age ? Est-ce que vous voulez faire de la géographie ? » [rires] Mais on aurait dit que ce n’était pas à nous de décider de cela. [rires]. Bon enfin… Mais je comprends que vous ayez du mal à imaginer cette atmosphère, mais elle existait. Cela a été une grave erreur du gouvernement français de laisser se développer au sein de l’Université cette atmosphère. C’est très mauvais. Il ne fallait pas. Quand on est ministre,, quand on est Premier ministre, quand on est Président de la République, on ne peut pas faire cela. On ne peut pas laisser les choses évoluer en disant que tout finira bien par s’arranger. Je ne conçois pas le rôle de la France comme cela. [rires].

En 1973, la scission est opérée. On a alors trois universités à Lyon. On aurait pu réanimer le projet de Lacroix Laval en mettant Lyon III à Lacroix Laval puisqu’il y a toujours des problèmes importants de locaux…

Vous avez parfaitement raison. Vous touchez du doigt que les juristes ne se sont jamais vraiment intéressés à Lacroix Laval. Le premier président de Lyon III, c’est un juriste. Le second président, c’était un littéraire, je crois, mais de toute façon, il n’avait qu’une idée : rester sur les quais. Lacroix Laval ne les a jamais vraiment passionnés. C’est un aveuglement regrettable. Mais c’est un avis personnel. Finalement, Lacroix Laval, cela fait un point de verdure dans l’agglomération lyonnaise. On aurait bétonné tout cela sinon. Je reconnais qu’il y aurait un problème qu’il aurait fallu discuter : pour une université à dominante littéraire, les besoins en locaux étant quand même moins évidents que dans le domaine scientifique, je ne me souviens plus des coefficients, mais je sais que les coefficients des scientifiques pour l’occupation des locaux étaient bien plus considérables que pour les littéraires. Cela devait être dans un rapport de 4 à 12. On pouvait dire : « les disciplines littéraires et juridiques ont intérêt à s’accrocher au centre de la ville, parce qu’elles peuvent nouer des contacts avec les milieux d’utilisation des disciplines juridiques et littéraires. »  Les professeurs de droit ont, c’est vrai, souvent une activité de conseil et ne doivent pas être trop loin du Palais de justice, des cabinets d’avocats et des justiciables. Les littéraires apprécient beaucoup la proximité des librairies, de la bibliothèque municipale, des cercles littéraires de la ville. Tout cela se conçoit. On n’a d’ailleurs jamais pensé, en tous les cas pas moi, que l’on pouvait tout faire à Lacroix Laval et puis laisser complètement le centre-ville. Pas du tout. J’étais très sensibilisé à la montée des effectifs en première et deuxième année. Il aurait fallu construire d’urgence des locaux. A Lacroix Laval, on aurait pu accueillir des centaines, des milliers d’étudiants. Et puis à partir de la licence, on aurait pu revenir sur les quais pour des cours avec des auditoires moins nombreux. Mais tout cela n’a jamais passionné mes collègues. Il faut dire que très souvent l’accueil des étudiants de première année voire de deuxième année, je ne dis pas que les professeurs s’en désintéressaient, non, mais ils ont laissé le soin aux maîtres assistants et aux assistants de s’occuper de ces cours. Quand on confie les responsabilités à d’autres et qu’on s’en lave les mains, cela ne pousse pas aux solutions pratiques aux problèmes. Lacroix Laval, c’était une solution pratique aux problèmes. C’était vaste, on pouvait construire des locaux agréables adaptés à des amphis de 400-500 personnes. On en avait fait l’expérience à La Doua d’ailleurs. Dans le bâtiment dont je me suis occupé, il y avait un amphi de 500 places. J’ai fait cours dans ces amphis. Mais beaucoup de mes chers collègues ne voulaient pas entendre parler de ces problèmes. Ce n’est pas la même chose, vous comprenez, de faire cours, à une dizaine d’étudiants de troisième cycle ou dans un amphi. Certains de mes collègues faisaient tout leur horaire avec des séminaires. 10 ou 20 personnes. A ce moment-là, Lacroix Laval… Ils n’ont jamais mis les pieds à La doua non plus d’ailleurs. C’était une fuite des responsabilités. Et puis dans ce milieu très spécial qu’est l’université la règle c’est le plus ancien dans le grade le plus élevé. J’ai entendu cela assez souvent. Le plus ancien dans le grade le plus élevé. Quand il s’agissait de confier des responsabilités à quelqu’un, on disait cela. Mais cela ne veut rien dire, on aurait du dire le plus capable. Le plus courageux. Non, non, c’était le plus ancien dans le grade le plus élevé. Je n’ai jamais pu comprendre ce concept. Alors avec ce système, vous aboutissez à des espèces de gérontocratie, qui ont subsisté.

Qu’est ce qui ex plique le changement de doyen en 1967…

Une cabale. Je l’ai connu ce doyen, c’était un professeur d’anglais, il était très gentil. Il s’appelait RITZ. Je me suis très bien entendu avec lui, il ne m’a jamais refusé les moyens de travail. Mais il était angliciste, c’était la partie langues vivantes, lettres modernes, et la partie traditionnelle latin, grec, littérature française, un peu moins littérature française parce qu’ils étaient concernés par les lettres modernes où il y avait beaucoup d’étudiants. Mais le latin et le grec, pas du tout. Alors, il y a eu une cabale à laquelle il n’a pas résisté. Cela a été très regrettable. Son successeur s’est complètement désintéressé de Lacroix Laval. Le malheureux, il a été pris dans la tourmente de 1968, cela a été un vrai calvaire pour lui. Il était très sympathique mais je n’ai jamais compris pourquoi il avait été nommé là. Ce n’était vraiment pas son affaire.

C’est le doyen de la Faculté des lettres qui était l’âme du projet ?

Il n’a pas été contre. Il était, comment dire, très soucieux de consensus. Je ne vais pas en parler, il est décédé depuis longtemps. Je m’entendais bien avec lui. Non, j’ai eu des soutiens pratiques avec BRACONNIER. J’ai eu quand même des gens qui m’ont soutenu et qui auraient voulu que je poursuive. Mais l’atmosphère générale de la Faculté des lettres n’était pas favorable.

Vous voyez quelque chose à ajouter ?

J’ai fait une conférence au Rotary. Il y a pas mal de gens qui se sont intéressés à Lyon, mais bon, vous savez chacun est dans son domaine ensuite. A part le Préfet RICARD qui malheureusement est parti avant 1968, il n’y a pas eu de soutien majeur. PRADEL s’en est complètement désintéressé. L’université ne l’intéressait absolument pas. Il n’y connaissait rien. Cela ne l’intéressait vraiment pas. Je l’ai rencontré, j’ai eu un rendez-vous et un entretien assez approfondi avec lui sur ces problèmes et je lui ai demandé des solutions.

Vous vous rappelez de l’époque ?

Non. Mais il voulait nous loger vers Fort Lamothe. La ville possédait quelques terrains. Mais quand j’en ai parlé à la DDE, ils m’ont dit que c’était complètement impossible. C’était tout occupé avec des loyers très chers. C’était compliqué et il était impossible de faire quelque chose.

Dans les milieux économiques ?

Il y avait à ce moment là encore un comité d’aménagement du territoire qui ne s’y est absolument pas intéressé. Est ce que vous avez rencontré DELFANTE à ce sujet ? Il faudrait le rencontrer. Il a dû en garder un certain souvenir de cette affaire. Il était urbaniste de la ville de Lyon. Quelle a été son attitude sur Lacroix Laval et Bron Parilly ? Je n’ai jamais vraiment pu le savoir, si vous y arrivez, tant mieux pour vous.

Et à part PRADEL, sur le plan du personnel politique local…

Au conseil général, c’était CARTERON. On ne peut pas dire que j’ai eu des soutiens. Le conseil général ne s’occupait pas trop de la ville et de l’agglomération. Le conseil général, c’est plutôt les Monts du Lyonnais, le Beaujolais. Cela a toujours été un peu comme cela. Remarquez, cela s’équilibre bien à condition que ceux qui sont à la tête des deux s’entendent bien. Il y a eu une belle époque pour cela, c’est HERRIOT et BONNEVAY. CARTERON et PRADEL, je n’ai jamais bien su. Non, je n’ai pas eu de soutiens non plus. Il faut dire que je n’ai peut être pas su faire. J’avais quand même des cours à faire. Quand je vois le temps que j’ai consacré à cette opération. Je regrette. C’est une magnifique occasion manquée. Il y avait tout pour bien faire. Il y avait cette voie ferrée qui avait été électrifiée avec des restes de la ligne Paris Lyon. Il y a un ingénieur qui avait dit : « on va l’utiliser pour électrifier cette ligne ». Elle était intéressante cette ligne par son tracé. Cette ligne pouvait transporter des milliers d’étudiants et les déposer, place Saint Paul en plein cœur de Lyon. Et puis le cadre de Lacroix Laval était beau. Moi, j’aime beaucoup la nature que j’avais connue au Canada. J’avais vécu un an au Canada à Québec, j’étais professeur invité à l’université LAVAL. J’avais vécu un peu le même problème, l’université Laval de Québec était au centre même de la ville mais ils avaient aussi des campus périphériques, de grands campus périphériques à l’échelle de Québec. Mais c’était quand même à une certaine distance. J’avais visité et cela m’avait beaucoup séduit. La nouvelle faculté de commerce de la Faculté de Laval, je connaissais bien le doyen, c’était un homme dynamique, il m’avait fait visiter la bibliothèque. La BU de la Faculté de commerce de Laval, c’était une merveille. J’en ai rêvé pour Lyon. Quand je comparais avec celle de Lyon, celle qui a brûlé, où on était tous là, les scientifiques, les littéraires. Des vieilles tables, des vieilles chaises, tous suspendus au même distributeur de bouquins, aucune présentation de revues. J’étais revenu du Canada avec des idées un peu neuves tout de même sur la manière de faire face à la massification de l’enseignement supérieur, parce que eux y avaient déjà fait face.