La borde d'Urritxaga

Comme son nom l'indique, Urritxagacoborda fut longtemps une simple "borde" ou bergerie, une dépendance. Partout dans les montagnes basques, ces bordes se sont multipliées depuis le XVIIe siècle sur les hauteurs incultes au détriment des communaux : autour des bergeries, on a mis des terres en culture, puis les bergeries sont devenues des maisons où s'installaient souvent des cadets. De nouveaux hameaux, parfois même des villages, se sont ainsi formés sur des terres jusque là délaissées ou réservées aux troupeaux147. C'est sans doute l'origine du hameau de Plaçagain ("En haut de la place"), sur les flancs de la Rhune, où se trouve Urritxagacoborda.

La borde est rattachée depuis 1804 à la maison d'Urritxaga, située beaucoup plus bas dans le quartier du Port, dont les propriétaires sont depuis le XVIIe siècle marins de père en fils ou en gendre. Comme la plupart des maisons du Port, c'est une toute petite exploitation dont le labour ne dépasse pas cinq ares. L'acquisition de la borde et de ses dépendances porte l'exploitation à plus de deux hectares.

C'est à la génération suivante qu'Urritxagacoborda devient une exploitation autonome. Son propriétaire, Martin Chardiet, est officier marinier. Toujours en mer, il engage un couple de laboureurs chargé de l'exploitation, qui cohabite d'abord avec les propriétaires à Urritxaga. Mais en 1842, comme plusieurs bordes du voisinage, la grange devient maison : la pression démographique est particulièrement forte à Ascain en cette décennie, où la première guerre carliste provoque un flux d'arrivée de réfugiés espagnols que ne compensent pas encore les départs pour l'Amérique. Un ménage de métayers est recensé en 1846 à Urritxagacoborda qui devient pour une génération une petite métairie de deux hectares, tandis qu'Urritxaga s'agrandit d'un petit labour : il lui reste 20 ares148.

Notes
147.

Voir notamment : Georges VIERS, Le Pays basque, ouvrage cité, pp. 60-66. Christian DESPLAT, La guerre oubliée. Guerres paysannes dans les Pyrénées, ouvrage cité, pp. 165-177.

148.

Arch. dép. Pyrénées Atlantiques III-E 15586 : donation et transport du 12 février 1830. III-E 15613 : vente du 31 août 1864. 247-Q 8 : mutation par décès du 10 avril 1821.

Arch. com. Ascain : matrice cadastrale, registres d'Etat civil et listes nominatives de recensement. Liste nominative des individus ou citoyens de la commune d'Ascain depuis l'âge de 16 ans jusqu'à l'âge de 60 ans pour l'organisation de la Garde nationale sédentaire (28 Messidor an 7). Noms de tous les indigens et de veuves portés dans la liste pour la distribution de 363 f qui sont destinés au secours des plus misérables qui ont éprouvé des pertes (1814).

Alfred LASSUS, "Les anciennes maisons d'Ascain", Ascain, ouvrage cité, pp. 79-133.