Son beau-père Baptiste Aramendy est en effet fils de propriétaires. Premier né de la maison Peroubaïta, voisine d'Urritxagacoborda, il a été exclu de la succession au bénéfice de sa soeur cadette, sans doute à cause d'une mésalliance : lorsqu'il se marie en 1817, aucun membre de sa famille ne figure parmi les témoins ; un mois plus tard, sa femme donne naissance à son premier enfant. Aussi, contrairement à ses frères, a-t-il refusé de vendre ses droits à sa soeur et exigé un partage de l'exploitation. Mais sa part de propriété, réduite à trois parcelles, est insuffisante : il a donc dû devenir métayer. L'alliance matrimoniale avec les Luberriaga permettra aux Aramendy de prendre leur revanche et d'agrandir leur minuscule propriété aux dimensions d'une petite exploitation, et aux Luberriaga de s'insérer durablement dans la société locale151.
Pour les Aramendy, la réussite de ce projet a une lourde contrepartie : les quatre frères et soeur de Josefa doivent renoncer au mariage et à leur part d'héritage. A leur soeur et leur beau-frère, ils abandonnent les trois parcelles de leur père, qui restent en indivision. A leurs neveux, ils laissent à leur décès leur part dans l'héritage de leur mère, fille d'un propriétaire de Saint-Pée-sur-Nivelle, et les économies d'une vie de célibat.
Les trois frères ont tous choisi l'émigration. Francisco l'aîné, est parti le premier pour l'Argentine. En 1845, "à la tête d'une brillante fortune", il fait venir son frère Auger bientôt suivi par Martin. Mais tous ne connaîtront pas la fortune. Les frères se dispersent en fait dans la région de Buenos Aires, sans donner de nouvelles pendant trente ans. Auger, journalier, meurt dans la solitude à l'hôpital de Buenos Aires en 1880. Lorsque Francisco tente alors de retrouver Martin, devenu boulanger, c'est pour apprendre que ce dernier est mort depuis quatre ans. L'un comme l'autre ne laissent pour toute fortune que leurs droits successoraux : aucun n'a touché les 1 600 francs qui lui reviennent dans la succession de leur mère152.
Seul l'un des trois frères émigrés, Francisco, a connu une relative réussite et revient à Ascain après cinquante ans d'absence avec quelques économies destinées à assurer ses vieux jours, mais surtout à aider ses neveux. Toute sa fortune, qui s'élève à 7 500 francs, est investie dans la terre : il achète à un officier de marine de Saint-Jean-de-Luz une petite propriété de quatre hectares, Edercoenea. Mais il ne l'exploite pas : il finit sa vie à Urritxagacoborda, chez sa soeur et son neveu et filleul, où il est recensé comme rentier en 1891 et décède deux ans plus tard, laissant tous ses biens à ses deux soeurs.
Leur soeur Marie enfin, domestique dans une maison bourgeoise de Saint-Jean-de-Luz puis à Ascain, a dû également économiser toute sa vie pour léguer 3 000 francs à ses neveux chez lesquels, comme son frère, elle se retire passée la soixantaine. Elle disparaît la dernière en 1901 après avoir rédigé un testament en faveur de ses neveux : tous les biens des Aramendy reviennent alors aux enfants de Josefa, la seule à s'être mariée153.
Arch. dép. Pyrénées Atlantiques III-E 15574 : obligation et bail du 22 juillet 1819. III-E 15584 : contrat de mariage du 3 février 1828. III-E 15595 : obligation du 28 septembre 1838. III-E 15597 : obligation du 9 octobre 1840.
Archives de l'enregistrement. Bureau de Saint-Jean-de-Luz : mutation par décès du 24 avril 1871.
Arch. dép. Pyrénées Atlantiques III-E 18210 : liquidation du 4 novembre 1876. III-E 18214 : succession du 26 janvier 1881. III-E 18215 : succession du 27 septembre 1882.
Archives de l'enregistrement. Bureau de Saint-Jean-de-Luz : mutations par décès des 28 avril 1882 et 26 novembre 1883.
Arch. com. Ascain : Registre servant à l'inscription des passeports (1841-1848). Assignation du 24 juin 1875.
Voir en annexe les actes de décès d'Auger et Martin et une lettre de François Aramendy (12).
Arch. com. Ascain : listes nominatives de recensement.
Archives de l'enregistrement. Bureau de Saint-Jean-de-Luz : mutations par décès des 13 mai 1893 et 21 juin 1902.