Hélette : l'érosion de la propriété bourgeoise653

L'ascension de Sansoenea comme le démantèlement du domaine de Pierre Larre dessinent assez bien l'histoire d'un marché foncier longtemps dominé par les rentiers et grands propriétaires. Principaux bénéficiaires des transferts fonciers jusqu'au milieu du siècle, ils vendent beaucoup, mais achètent de moins en moins pendant les décennies suivantes. Alimenté par le désinvestissement bourgeois, mais aussi par le déclin de l'artisanat rural et la mortalité des petites exploitations, le marché s'ouvre à de nouveaux acquéreurs.

De 1860 à 1890, trois décennies fastes voient augmenter à la fois le volume des ventes et le prix de la terre : les parcelles comme les corps de domaine connaissent une plus-value parfois considérable654. C'est que, malgré le déclin démographique, la demande est forte du côté des petits exploitants. Les petits propriétaires n'achètent que modestement, par petites superficies : le seuil de l'autosuffisance atteint, les logiques de remembrement l'emportent. Font leur apparition sur le marché en revanche des émigrés enrichis et des cadets sans terre, des métayers qui développent des stratégies collectives, à la fois matrimoniales et foncières. Dans le marché beaucoup moins actif de la fin du siècle, ce sont eux qui emportent les 3/4 des exploitations mises en vente.

L'apparente immobilité de la propriété cache ainsi une série de glissements vers le haut : tandis qu'une frange favorisée de paysans sans terres accède à la propriété apparaissent parmi les petits propriétaires quelques rassembleurs de terres, les nouveaux rentiers.

Notes
653.

Voir tableau 17 en annexe : ventes et achats d'exploitation (1834-1914). Hélette.

654.

Voir tableaux 22 à 24 en annexe : plus-value des exploitations revendues (Hélette); prix des parcelles cultivées (quartier d'Heroritz); prix des pâtures (quartier d'Heroritz).