Les achats de Dominique Berho

Hiriburucoborda n'est pas la seule acquisition de Dominique Berho, qui est un des grands bénéficiaires de la vente des communaux. Neuvième enfant d'une bonne maison d'Ascain, il prend comme ses oncles et presque tous ses frères et soeurs son passeport pour l'Amérique, à l'âge de dix-huit ans747. Il rentre dix ans plus tard muni de 10 000 francs, se déclare rentier, et épouse en 1879 Marie-Léonie Bertereche, fille de l'instituteur du village748. Il commence à agrandir la petite propriété de son beau-père de près de trois hectares de pâtures communales, obtient l'autorisation d'ouvrir un débit de boissons et devient aubergiste sur la place du village749. Mais en 1886, il confie l'administration de ses biens à son beau-père, et repart pour l'Amérique en laissant sa femme et deux enfants750.

Ce second séjour n'est pas infructueux. Comme souvent d'ailleurs, la réussite de Dominique Berho n'est pas individuelle mais collective : plusieurs de ses frères et soeurs, son beau-frère rentrent comme lui d'Amérique avec des fonds à placer751. A son retour, Dominique Berho devient propriétaire d'une maison dans le bourg752, mais se met surtout à rassembler pour les mettre en valeur des parcelles de communaux. Entre 1892 et 1895, il achète à la commune et à leurs premiers acquéreurs sept hectares de bonnes terres dans un vallon au pied de la Rhune, les fait défricher par deux ouvriers, puis y installe une famille de métayers753. "Larunzola", la nouvelle exploitation, cultive au début du siècle cinq hectares de prés et de labours, et élève sept porcs et une douzaine de bovins754. Avec l'achat d'Hiriburucoborda, Dominique Berho est alors propriétaire de deux petites exploitations gagnées sur les communaux, une vingtaine d'hectares en tout. Il peut se déclarer rentier et, en 1900, devient maire de la commune.

A la différence des cordonniers de Marihaurrenea, les marins d'Hiriburua n'ont pas su, ou pas pu, réussir leur reclassement. Ralenti par le recours à l'émigration puis par la mise en valeur des communaux, le déclin de leur exploitation contribue pendant un demi-siècle à alimenter le marché des terres. Si trois petites exploitations voisines bénéficient dans un premier temps de ces transferts fonciers, le marché paraît dominé à partir des années 1870 par la forte demande des nouveaux rentiers de retour des Amériques d'une part, d'une bourgeoisie attirée par la mode des bains de mer d'autre part.

Notes
747.

Arch. com. Ascain : émigrants pour Montevideo et Buenos Ayres et demandes de passeports (1856-1890).

748.

Arch. dép. Pyrénées Atlantiques III-E 15628 : contrat de mariage du 18 février 1879.

749.

Arch. com. Ascain : autorisations d'ouverture de débits de boisson (1852-1879). Liste nominative de recensement (1881).

750.

Arch. dép. Pyrénées Atlantiques III-E 15635 : pouvoir du 15 mars 1886. Arch. com. Ascain : listes nominatives de recensement (1886 et 1891).

751.

Son beau-frère Jean Hiribarren notamment achète près de 40 hectares à Ascain entre 1867 et 1889, dont 35 hectares de communaux qu'il fait en partie mettre en culture.

752.

Arch. dép. Pyrénées Atlantiques III-E 17586 : vente du 18 juillet 1893.

753.

Arch. com. Ascain : matrices cadastrales et listes nominatives de recensement (1896 et 1901).

754.

Arch. dép. Pyrénées Atlantiques 5P-160 : Bureau de Herboure. Registres de déclarations et de passavants pour les bestiaux français envoyés au pacage à l'étranger ou dans la zone extérieure. Années 1903-1905.