Jean Duhalde et Marie Haramboure en sont les premiers occupants connus. En 1851, ils y sont recensés comme métayers, avec une servante et le père âgé de Marie, qui se déclare mégissier. Ils ne sortent un peu de l'ombre que lorsque la petite vérole les emporte en 1856. Le maire fait alors appel au juge de paix, qui se rend à Harismendia pour établir un inventaire de leurs biens909.
Il n'y trouve qu'un très pauvre mobilier, au plus bas niveau de la hiérarchie des fortunes de la commune910. Jean Duhalde et Marie Haramboure étaient pourtant propriétaires de leur cheptel : les deux vaches d'attelage, un veau et un petit troupeau de brebis. Sans doute élevaient-ils aussi un peu de volaille que le juge n'a pas dénombrée et, pendant une partie de l'année, un porc dont ils conservent le lard dans un petit coffre. La propriété de ce bétail les place légèrement au-dessus des métayers les plus déshérités, qui ne possèdent même pas leur attelage911, et leur vaut sans doute leur statut de fermiers.
Bien maigre en comparaison du cheptel de la plupart des propriétaires exploitants, ce bétail est pourtant leur principale richesse. Le mobilier domestique en mauvais bois comme les vêtements ont très peu de valeur. L'outillage agricole est réduit au minimum. Le linge de maison qui fait à la même date la fierté des petits propriétaires d'Etcheederrea912 est presque inexistant, et ils ne possèdent pas comme eux de vêtements du dimanche. Seules leurs réserves, notamment en maïs, garantissent qu'ils ne seraient pas morts de faim s'ils n'avaient été frappés par la maladie. Sans doute même auraient-ils pu rembourser les neuf petites dettes contractées auprès de l'aubergiste, des épicières ou des artisans du village, et régler le solde de leur ferme et les gages de la servante. Mais ils se sont plus lourdement endettés auprès de la famille et des voisins, auxquels ils devaient près de 900 francs, presque la valeur de leur petit mobilier.
Jean Duhalde pourtant était fils de propriétaires et a été brièvement propriétaire lui-même : avec l'aide de sa nombreuse parentèle, qui est présente lors de l'inventaire, et en commun avec son frère, il a acheté en 1847 les terres d'Ospitalia913. Mais il a aussitôt revendu sa part et, contrairement à son frère parti chercher fortune en Amérique, a préféré devenir fermier. Son épouse, fille d'un tanneur sans aucune fortune, ne lui a apporté aucun bien. Malgré l'entraide familiale, Jean Duhalde était semble-t-il sur une trajectoire déclinante. Sans descendance, peut-être nourrissait-il pourtant l'espoir de devenir un jour propriétaire de quelques terres. Ce métayer apparemment misérable avait en effet mis de côté une petite épargne : en 1848, après avoir vendu sa part d'Ospitalia, il a prêté à Jean Haramburu une somme de 1 300 francs pour une période de neuf ans914. Jean Duhalde était donc créancier de son propriétaire, pour la durée probable de son bail : certes peu fortuné, il n'était ni dépourvu de tout bien, ni en situation de totale dépendance à l'égard du "maître" d'Harismendia.
Arch. dép. Pyrénées Atlantiques 4-U-12/20 : inventaire du 9 avril 1856.
Voir extrait du document en annexe (8).
Voir tableau 9 en annexe : les métayers d'Harismendia dans la hiérarchie des fortunes à Hélette.
Arch. dép. Pyrénées Atlantiques 4-U-12/20 : inventaire du 31 janvier 1856 (Urgorria).
Voir la monographie d'Etcheederrea (chapitre 3).
Voir la biographie d'Ospitalia (chapitre 2).
Arch. dép. Pyrénées Atlantiques III-E 8881 : obligation du 24 octobre 1848. III-E 8884 : quittance du 24 octobre 1857.