1.1.2 Erreurs de Conscience de la situation

Dans le cadre d’une expérimentation, Jones & Endsley (1996) ont montré que 8.6% des erreurs de Conscience de la Situation proviennent d’une perte en mémoire de travail. En d’autres termes, l’information a été perçue mais oubliée. De ce fait, elle n’est pas intégrée dans la CS. En outre, les auteurs ajoutent que d’autres erreurs relevant des niveaux 2 et 3 sont sans doute causées par des défaillances ou limites de la mémoire de travail. De nombreuses études ont montré l’importance de l’attention dans la CS (Endsley & Rodgers, 1998; Endsley & Smith, 1996; Gugerty, 1997). Il en ressort que les pilotes, ou les conducteurs (Gugerty 1997) déploient leur attention en fonction de ce qu’ils jugent pertinent selon leurs buts. Selon Jones & Endsley (1996), les erreurs de CS conséquentes aux limites attentionnelles représentent 35% des erreurs de CS global.

Endsley (1995) propose une taxonomie des erreurs de CS en fonction des trois niveaux hiérarchiques de son modèle. Elle souligne que cette taxonomie ne vise pas à décrire tous les types d’erreurs humaines comme les travaux de Reason (1993, annexe 2).

Tableau 1 : Taxonomie des erreurs de CS, traduit de Endsley 1995
Tableau 1 : Taxonomie des erreurs de CS, traduit de Endsley 1995

En 1996, Jones et Endsley appliquent cette taxonomie à des rapports d’accidents de Aviation Safety Reporting System. L’analyse porte sur 143 incidents, dont 111 impliquent des pilotes et 32 impliquent des contrôleurs aériens.

Les erreurs de niveau 1 représente 76.3% des erreurs observées. Ce sont des erreurs de perception de la situation. En d’autres termes au niveau de base, les informations importantes de la situation ne sont pas correctement perçues. 13% des erreurs de CS sont dues au système qui ne présente pas correctement les informations. De ce fait, les données ne sont pas accessibles à l’opérateur. Par ailleurs, 11% des erreurs sont dues à des conditions qui rendent la perception des données difficile (nuit, mauvais temps, bruit dans le cockpit). Dans d’autres cas, les erreurs sont des erreurs humaines. En effet, 35% d’erreurs surviennent alors que les informations sont disponibles dans l’environnent mais ne sont pas du tout perçues. Dans ce cas, il peut s’agir d’une simple omission, ou d’une conséquence de la focalisation de l’attention ou encore d’un élément distracteur qui écarte l’attention de l’information. Par ailleurs, pour 8.7% des erreurs, l’information est mal perçue. D’après les auteurs, ces mauvaises perceptions sont le plus souvent dues à des attentes antérieures des opérateurs. C’est-à-dire qu’ils perçoivent ce qu’ils attendent et non ce qui se passe réellement. Enfin, 8.4% d’erreurs proviennent alors que l’information avait été correctement perçue mais qu’elle est oubliée. Ces oublis sont le plus souvent associés à des perturbations d’automatismes, à de lourdes charges de travail ou à des distractions.

Dans d’autres cas, l’information est perçue correctement, mais elle est mal comprise. Ce sont les erreurs dites de niveau 2 par les auteurs. Dans cette étude, elles représentent 20.3% des erreurs. Comme nous pouvons le voir dans le tableau 1, pour Endsley (1995) ces erreurs sont toutes liées au modèle mental construit en mémoire de travail. En effet, dans leur étude de 1996, Jones et Endsley considèrent que :

Enfin, les erreurs de CS peuvent intervenir au dernier niveau (ie : anticipation). Dans ce cas, les opérateurs ont correctement compris la situation courante, mais ne sont pas capables de savoir ce que cela veut dire pour le futur. Ces erreurs représentent 3.4% des erreurs de CS (D. G. Jones & Endsley, 1996). Ici aussi les auteurs analysent principalement deux causes à ces erreurs. Le modèle mental peut être trop pauvre (0.4%), ou bien les sujets font trop confiance à l’état actuel de la situation (1.1%). Pour les autres erreurs de niveaux 3, les auteurs ne fournissent pas d’explication si ce n’est le coût cognitif nécessaire à l’anticipation. En effet, ils précisent que la projection mentale est une activité très coûteuse pour laquelle les gens ne sont en général pas très performants.

Endsley aborde la Conscience de la Situation du point de vue du traitement de l’information. Deux autres approches ont été choisies par des auteurs :

Bien que ces conceptions de la Conscience de la Situation ne soient pas dominantes nous avons choisi de les présenter brièvement afin de constituer un tour d’horizon complet de ce concept.