1-1-2 Codage relatif de la position des lettres

Des arguments forts à l’encontre d’un codage absolu de la position des lettres au cours de la perception des mots écrits ont été obtenus via le paradigme d’amorçage orthographique 1 . En manipulant la position des lettres partagées par l’amorce et la cible (position identique ou différente), certains auteurs ont estimé l’influence de la position absolue vs relative des lettres dans la séquence. Ces effets sont mesurés relativement à une condition contrôle où l’amorce et la cible ne partagent aucune lettre.

Humphreys, Evett et Quinlan (1990) furent les premiers à montrer que les effets d’amorçage varient en fonction à la fois du nombre et de la position des lettres partagées par l’amorce (non-mot) et la cible (mot) dans une tâche d’identification perceptive. Un recouvrement orthographique plus important produit un effet de facilitation plus grand, mais seulement lorsque les lettres partagées occupent la même position dans l’amorce et dans la cible. Des résultats comparables ont été obtenus par Perressotti et Grainger (1999) dans la tâche de décision lexicale. Ces auteurs ont montré que l’amorce « BSLCRN » (qui préserve la position absolue des lettres B, L, C et N) ne facilite pas plus les performances de reconnaissance du mot cible « BALCON » que l’amorce « BCLN » qui préserve la position relative des lettres seulement. De plus, l’insertion de symboles non-alphabétiques pour indiquer la position absolue des lettres (« B-L-C-N ») entraînent des effets de facilitation identiques à ceux obtenus avec l’amorce « BCLN ».

L’ensemble de ces travaux montrent clairement que les lettres sont codées selon leurs positions relatives dans le mot, plutôt qu’en fonction de leurs positions absolues (voir aussi, Perressotti & Grainger, 1995 ; Grainger & Jacobs, 1991).

Les lettres du mot ainsi activées provoquent alors l’activation d’un ensemble limité de candidats lexicaux formellement proches du stimulus puis la sélection d’un seul de ces candidats (voir par exemple, McClelland & Rumelhart, 1981 ; Paap, et al., 1982 ; Segui, 1991). Les modèles de lecture ont tenté d’identifier les candidats possibles, de modéliser la façon dont s’effectue la sélection d’un seul d’entre eux et de déterminer dans quelle mesure la classe des candidats lexicaux influence la reconnaissance du mot.

Notes
1.

La technique d’amorçage consiste à présenter un mot cible précédé par un stimulus amorce contrôle, et à comparer cette condition contrôle avec des conditions de partage partiels orthographiques, phonologiques, morphologiques ou sémantiques. La tâche du participant porte sur le mot cible. Les effets d’amorçage sont évalués par le degré de facilitation (i.e., l’amélioration des performances) ou le degré d’inhibition (i.e., la détérioration des performances) du mot cible par rapport à l’effet de l’amorce contrôle.