4-2-2 Fréquence positionnelle des lettres

Cette analyse a été motivée suite aux observations de Grainger et Jacobs (1993). Ces derniers ont observé que la fréquence positionnelle des lettres était un bon indicateur des effets d’amorçage orthographique. La fréquence positionnelle d’une lettre correspond à la somme des fréquences de tous les mots où cette lettre est apparue à une position donnée. Ainsi, moins la fréquence positionnelle des lettres de l’amorce est élevée, plus grands sont les effets de facilitation de l’amorçage. Par exemple, Grainger et Jacobs (1993) ont montré que les 4 lettres de l’amorce « TABL% » donnent lieu à des latences de décision lexicale plus courtes que les amorces « %ABLE » ou même les amorces « TA%LE », ayant une fréquence positionnelle des lettres relativement élevée.

Deux types de fréquence positionnelle des lettres ont été testés. (1) La fréquence positionnelle absolue fait référence au nombre de fois où une lettre apparaît à une position donnée dans une séquence de longueur fixe. (2) La fréquence positionnelle des lettres relative est calculée indépendamment de la longueur de la séquence, utilisant le schéma de codage suivant : première lettre, dernière lettre et lettres internes. Il s’agit de la somme des fréquences des mots de 3 à 10 lettres où la première lettre apparaît en première position; la dernière lettre en dernière position et les lettres internes en positions internes indépendamment de leurs positions absolues.

La probabilité de reconnaître un mot (P(W)) est estimée selon l’équation suivante :

W(freq) est la fréquence d’usage du mot, Fpos(Lp) est la fréquence positionnelle de la lettre à la position p et, Lisib(Lp) est la mesure de lisibilité empirique obtenue pour cette lettre. Le facteur lexical est estimé dans ce modèle par la probabilité qu’une lettre donnée appartienne au stimulus mot donné, (i.e., [W(freq) / Fpos(Lp)]).

Stevens et Grainger (2003) ont montré que la combinaison théorique des mesures empiriques de lisibilité des lettres avec une mesure de la fréquence positionnelle des lettres utilisant un codage absolu de la position des lettres ne rend pas compte du patron de l’EPR dans les mots obtenu empiriquement ; en revanche, la mesure de la contrainte lexicale basée sur un codage de la position des lettres relatif génère des prédictions similaires aux données empiriques (voir Figure 15).

Figure 15. Probabilités théoriques (lignes pointillées) et empiriques (lignes pleines) de reconnaître un mot de 5 lettres (panel de gauche) et de 7 lettres (panel de droite) (données tirées de Stevens & Grainger, 2003).