8-4 Acquisition de la lecture

Outre l’avantage du modèle CLIP sur les deux autres modèles visuo-lexicaux, distinguer les aspects perceptifs des aspects lexicaux durant la reconnaissance de mots présente plusieurs autres avantages. Le fait que la contrainte lexicale, contribuant à la reconnaissance visuelle des mots, puisse être estimée à partir de bases de données lexicales comme « Lexique », permettra une utilisation « pratique » de notre modèle, afin de mieux appréhender les processus liés à l’acquisition de la lecture et les troubles du langage écrit. Par exemple, en adaptant la base de données lexicales, au niveau de lecture devant être normalement acquis, lors des premières années d’apprentissage, le modèle pourrait aisément prédire l’âge de lecture d’un enfant. Ainsi, au début de l’apprentissage, la reconnaissance des mots devrait fortement dépendre des aspects visuels, et à un moindre degré, des aspects lexicaux. La différence de performances entre les mots et les pseudomots devrait donc être faible (e.g., Grainger, Bouttevin, Truc, Bastien, & Ziegler, 2003), et les erreurs de lexicalisation relativement absentes. Au fur et à mesure que le lexique mental évolue avec l’expérience du lecteur, l’inférence lexicale devrait s’accroître, et les performances pour les mots devraient augmenter par rapport à celles pour les pseudomots. Cependant, il est intéressant de noter que l’inférence lexicale étant fonction du nombre de candidats lexicaux activés par le stimulus (ce nombre dépendant lui-même du nombre de mots déjà acquis) l’importance de l’inférence lexicale ne devrait pas augmenter progressivement jusqu’à atteindre le niveau des lecteurs adultes, mais plutôt être transitoirement supérieure à celle des lecteurs experts. Quoi qu’il en soit, appliquer ce modèle à de nouveaux lecteurs pourrait certainement aider au dépistage précoce des problèmes de lecture.