Kyaikkatha

La ville est établie à l’endroit où le Sittang se jette dans le Golfe de Martaban, mais également à la confluence de ce fleuve et de la rivière Kalun (cartes 3 et 30). Le site offre ainsi un accès parfait à la fois vers la mer mais aussi vers l’intérieur des terres grâce à la présence des deux cours d’eau. Cette cité serait due au prince Kathakômma de Pegu qui la fonda en 1168 de l’ère chrétienne 206 . La légende locale attribue sa création au prince Atha. Lorsque les princes Thamala et Wimala fondèrent Pégu, ce dernier monta sur le trône mais fut quelques années plus tard assassiné par son frère cadet qui également prit pour épouse la femme de son frère. Celle-ci était alors dans l’attente d’un enfant de son premier époux, et par peur que Thamala ne s’en aperçoive, elle se retira dans la forêt où, quelques mois plus tard, elle donna naissance à un fils du nom d’Atha. Ce jeune prince fut élevé dans cette forêt par une famille de buffles. Lorsqu’il atteint l’âge adulte, il retourna à Pegu qui était en guerre contre le roi de Vizianagara (Vijanagara ?) et écrasa les ennemis du royaume. Atha reçut à cette occasion tous les honneurs mais certains dans l’entourage du souverain, animés par la jalousie, décidèrent de le tuer. Atha ayant eut vent de cela, s’enfuit et fonda la ville de Kyaikkatha 207 .

Le tracé des fortifications est très irrégulier. Le plan s’étend d’est en ouest sur une longueur de 2,5 km environ, les faces nord et sud étant concaves. Le mur occidental longe le bord de mer, s’inclinant légèrement en direction nord-est / sud-ouest, et, d’après les images aériennes 208 , se trouve percé d’une porte dans le tiers nord. Il mesure approximativement 1 km. La face orientale présente une inclinaison très oblique et d’orientation opposée par rapport au mur lui faisant face, c’est-à-dire nord-ouest / sud-est. D’après ces mêmes images, le rempart oriental semble bordé d’une douve ; ce côté est deux fois plus long que la face occidentale, et s’étend sur une distance de 2 km, avec des angles très arrondis. Cette face orientale est percée de deux portes, le côté nord de quatre ouvertures, et deux autres se trouvent sur la face sud.

Seule la partie nord-ouest du site a pu être prospectée. Le rempart, sous une butte de terre est bien visible, mais dans un état de conservation assez médiocre dans l’ensemble, qui laisse mal apprécier la structure elle-même (ph. 188, pl. LXII). Ce rempart, fait d’un mélange de terre et de brique reste visible sur une faible hauteur. Des traces de douves ont peut-être été décelées, sur le terrain, le long de la face occidentale, près de l’angle nord-ouest (ph. 187, pl. LXI). À l’intérieur de l’espace fortifié, les équipes du Département d’Archéologie de Rangoun ont mis au jour un vaste bâtiment, localisé précisément sur l’axe qui relie les deux stupas importants de la ville, le Kyaikkanon et le Sutaungpye 209 . De plan parfaitement rectangulaire orienté est-ouest, sa construction a largement privilégié l’emploi de la brique bien qu’il reste quelques assises de latérite d’un mur à l’est (ph. 185, pl. LXI).

Au centre de la ville la pagode Kyaikkanon (ph. 190, pl. LXII), se dresse dans la partie nord de ce qui paraît être une enceinte, peut-être triple et de plan probablement quadrangulaire : ses murs nord et est sont complets, celui de l’ouest n’est que partiel tandis que la face sud n’est pas visible. Cependant si la pagode est bien en place, en revanche l’enceinte, n’est visible que sur les photos aériennes et nous n’en avons trouvé aucune trace au sol.

Un réservoir s’étend de la porte sud de la face orientale jusqu’à cette structure centrale. On peut également noter la présence de la pagode Sutangpye (ph. 189, pl. LXII) dans l’angle sud-ouest de la cité. À 3 km environ de la vieille ville se trouverait un ensemble d’édifices religieux appelé le Payatataung : il comporte une longue avenue bordée de temples miniatures en latérite et aboutissant à deux grandes pagodes. Cet ensemble serait due à une princesse cambodgienne nommée Ma San Myaing, tombée amoureuse du prince Atha. De peur qu’il ne la choisisse pour épouse, Marimingala, une sirène ayant pris une forme humaine par amour pour ce même prince, l’assassina. Ma San Myaing fit construire la ville de Mosomyo à proximité immédiate s’y installa, puis édifia les pagodes du Payatagaung 210 . À 400 m de ce complexe d’édifices religieux se trouve un bassin creusé dans la roche qui, à la fin du XIXème siècle, était recouvert par la végétation 211 .

Plusieurs monnaies frappées d’une conque sur une face et d’un srivatsa de l’autre ont été découvertes sur le site en 1981. De nombreuses briques marquées au doigt ont également été remarquées sur le site même et dans les villages voisins, parmi lesquelles de nombreux types étaient représentés, semblables à ceux de Maingmaw 212 .

Figure 50. Kyaikkatha – plan d’après photographie aérienne
Figure 50. Kyaikkatha – plan d’après photographie aérienne

(d’après Aung Myint & Moore 1991)

Figure 51. Kyaikkatha – relevé des structures au sol (GPS)
Figure 51. Kyaikkatha – relevé des structures au sol (GPS)
Notes
206.

List of Objects of Antiquarian and Archaeological Interest in British Burma, p. 30, n° 5.

207.

Tin Gyi 1931, p. 27.

208.

Aung Myint 1998, pp. 101-02.

209.

Ce bâtiment est situé à 600 m au sud-ouest du Kyaikkanon et à 450 m au nord-est du Sutaungpye.

210.

Tin Gyi 1931, p. 28.

211.

List of Objects of Antiquarian and Archaeological Interest in British Burma, p. 30, n° 5.

212.

Aung Myint & Moore 1991, p. 93.