IX. Pagan

Introduction

La première fondation de Pagan remonte semble-t-il au milieu du IXème siècle. La disparition définitive de l’irrigation et de l’agriculture intra muros marque un tournant dans l’organisation de l’espace urbain en Birmanie et semble appartenir aux signes avant-coureurs du déclin de la civilisation Pyu et de l’émergence du premier pouvoir politique birman. La réoccupation du site par les Birmans et sa transformation en capitale en fit un centre religieux sans précédent à travers toute l’histoire du pays. Ce choix s’explique par deux raisons majeures. Tout d’abord la réutilisation d’une ville Pyu a probablement aidé les Birmans à légitimer leur prise de pouvoir ; étant les derniers arrivés en Birmanie, ils revendiquent, encore aujourd’hui, une origine Pyu, cette population qui les avait précédés dans la vallée de l’Irrawaddy et que l’on qualifie, d’après les études linguistiques de groupe proto-birman. D’autre part, la localisation du site dans la plaine de Birmanie centrale, sur le cours de l’Irrawaddy, axe majeur qui traverse tout le pays du nord au sud, reflète l’organisation centralisée de ce premier empire avec une capitale établie au cœur de tous les échanges (cartes 1 et 21). La localisation de Pagan est en effet à mi chemin des deux greniers à riz les plus importants de l’empire, les khayaing de Mlasca et de Khrok. Par les eaux de l’Irrawaddy, l’accès aux villes portuaires du sud, comme Khabin, ne posait également aucune difficulté, et le contrôle, au nord, de la route allant de la Chine vers l’Inde par la Haute Birmanie, sans doute dans la région de Shwebo, était également aisé. Bien qu’implantée au milieu d’un désert, c’est au centre d’un vaste carrefour commercial, terrestre et fluvial que la première capitale birmane fut érigée. Parmi les diverses fonctions de la ville, et au-delà du rôle de capitale qui implique une charge politique et administrative, Pagan avait également une fonction importante de ville-marché, bien que le commerce n’ait probablement joué qu’un rôle secondaire dans l’économie du pays à cette époque, elle même basée en priorité sur l’agriculture. Certains commerçants semblent d’ailleurs avoir été spécialisés dans l’approvisionnement de la capitale, et dans les échanges commerciaux avec les pays étrangers. Cette fonction commerciale semble également avoir favorisé l’émergence d’une classe bourgeoise au XIIIème siècle. C’est en tout cas ce que laisse supposer une inscription retrouvée à Pakhangyi 311 . On sait par ailleurs, que l’élevage et le commerce des éléphants, principalement exportés vers Ceylan, était une des spécialités du pays à l’époque. C’est d’ailleurs l’augmentation des taxes sur l’exportation des éléphants qui valut, en 1164-65, une campagne militaire punitive de la part de roi Cinghalais Parakrama Babu à l’encontre du pouvoir de Pagan 312 . Toujours selon les sources épigraphiques, l’espace intra muros de la vieille ville fortifiée aurait été divisé en neuf quartiers d’habitation avec chacun un temple ou un stupa 313 . Il est clair en tout cas, lorsque l’on suit l’évolution des constructions de Pagan que les secteurs d’habitat implantés hors les murs se sont en premier lieu développés le long du fleuve, puis vers l’intérieur des terres dès le XIIème siècle.

Notes
311.

Frasch 1994, résumé du chapitre V.

312.

Aung Thwin 1976, p. 54.

313.

Frasch 1994, résumé du chapitre I.