Des hypothèses

Nos hypothèses sont au nombre de deux :

H.1. Pour être efficace, une formation personnalisée doit se réaliser en tenant compte des capacités professionnelles et des aptitudes relationnelles du futur formateur.

H.2. Indépendamment de la transmission des savoirs, une formation personnalisée exige du futur formateur une forte expérience d'autrui et des organisations.

Elle pose la condition de la faisabilité de l'échange et de l'altérité. La connaissance de l'autre, dans sa double dimension professionnelle et relationnelle, est érigée comme une constante, pour cerner une personne en situation d'apprenance, c'est-à-dire qui a, volontairement ou non, décidé d'entreprendre un parcours de formation en vue de renforcer ses connaissances, voire son employabilité.

S'il est vrai que "tout n'a pas commencé en 1971" avec la loi du 16 Juillet, portant organisation de la formation professionnelle continue, on peut néanmoins affirmer que, cette année-là, la formation continue est née aux plans symbolique et culturel, si ce n'est sous l'angle de l'analyse juridique ou sociologique.

Nous pensons, pour notre part, qu'une formation personnalisée signifie de former en fonction de la personne elle-même, ce qui peut indiquer, éventuellement, mais pas nécessairement, une approche par l'individualisation. Il faut donc personnaliser d'abord et se poser ensuite la question des techniques pédagogiques qui permettent de passer de l'intention à la réalisation.

Lorsqu'il y a volonté de personnalisation, les acteurs éducatifs cherchent des solutions pour, à la fois, aller à la rencontre de la personne et considérer chaque futur formateur comme un apprenant à part entière. Ce dernier aspect révèle plus précisément l'aspect d'un sujet social apprenant.

Il faut également préciser que la notion d'efficacité retenue fait référence à celle de F.V. TOCHON 4 dans "l'Enseignement stratégique" :

‘"le bon enseignant(e) tient moins compte de paradigmes d'efficacité ou d'expertise que d'une relation humaine, personnelle et profonde avec l'élève. Sa connaissance de la matière est suffisamment étendue pour pouvoir, à tout moment, se libérer du contenu et adapter la matière à l'élève en un processus constant de transformation de la connaissance dont il est partie prenante".’

Cette citation illustre concrètement notre ressenti dans le milieu de la formation des adultes, depuis de nombreuses années. Nous avons effectivement appris que les potentiels et les besoins de chacun devaient être impérativement pris en compte dans le transfert des savoirs. Cette exigence –initiale et constante- émanant de chaque futur formateur (même intégré à un groupe) ne signifie pas le parti pris d'un quelconque laxisme ou angélisme. Elle s'exprime par l'énoncé de règles claires, appliquées et, si possible, acceptées par chacun. La prise en compte d'une certaine dimension personnelle du futur formateur permet l'application du jeu subtil de la connaissance des conditions de mise en œuvre des techniques (véritables matières à transmettre). La capacité à transmettre une technique ne peut se réduire uniquement à l'acquisition d'un savoir-faire. On peut apprendre (par exemple) une technique de gestion et ne pas être à même de l'appliquer dans le contexte particulier de son entreprise et de l'utiliser au moment opportun.

Il ne s'agit donc pas seulement de transférer une technologie mais de faire en sorte que ceux à qui elle est destinée soient capables de la maîtriser, c'est-à-dire de l'utiliser au moment opportun. Bref, il ne suffit pas que la technologie soit appropriée ; il faut aussi qu'elle soit appropriable, en suscitant chez l'autre un certain nombre de manifestations d'intérêt, de curiosité, de goût.

Elle avance qu'une forte ouverture vers l'autre et une expérience des organisations constituent les bases d'un phénomène spécifique et mobilisateur : la personnalisation en matière de formation.

L'importance de cette affirmation pour le développement de notre recherche justifie le plan de cette thèse et détermine la priorité donnée à la construction du concept de stratégie personnalisée.

Nous nous attacherons à trouver la relation entre le vécu de celui qui forme et les manières dont il peut tirer des transpositions chez les futurs formateurs, apportant ainsi une plus-value crédible et congruente.

Nota : Certains auteurs utilisent, d'une façon équivoque, le terme "d'individualisation" pour parler de "personnalisation", ce qui rend les contours de ces deux concepts flottants. Cf Hervé PREVOST, op.cité.

Notes
4.

F.V. TOCHON – op. cité.