1. Représentations et autonomie en contexte

Notre réflexion s’articule autour du travail fait avec des élèves ingénieurs de première année à l’Ecole Supérieure de Chimie Physique Électronique de Lyon (CPE Lyon). CPE dispense un enseignement dans les domaines de la Chimie (Chimie Organique, Chimie Analytique, Génie des Procédés), mais aussi de l’Electronique, des Télécommunications et de l’Informatique. Nos élèves sont donc de futurs ingénieurs, destinés à travailler dans le secteur privé avec de hautes responsabilités au sein d’entreprises, telles que Colas, Câble Perelli, France Telecom, Rohm & Haas… ou dans d’autres secteurs tels que les Librairies Decitre ou les Espaces Verts Tarvel.

Dans les deux années précédant leur arrivée dans l’école, la grande majorité de nos élèves ont suivi des cours dans des écoles de prépa, afin de s’assurer de leur réussite lors du concours d’entrée sélectif. La grande majorité des apprenants sont donc en formation initiale post-bac, d’origine francophone, à l’exception de quelques élèves étrangers qui, eux, suivent en addition des cours de français langue étrangère. Si pour la plupart ils ont un assez bon niveau d’anglais, au moins à l’écrit, nous constatons un écart considérable entre ceux qui n’ont suivi aucun cours d’anglais post-bac, ceux qui n’ont pas interrompu leur apprentissage de l’anglais, ceux qui ont séjourné en pays anglophone, etc. Ces variations dans le profil des élèves n’ont pas que des conséquences pour le niveau d’anglais, bien entendu, mais agissent également sur leur façon d’appréhender les cours et leur apprentissage.

Sortis des écoles de prépa, surnommés ‘taupes’ en raison des longues heures passées à faire du bachotage, nos élèves ont appris à réussir dans une ambiance d’enseignement plutôt traditionnelle. Les qualités utiles pour obtenir de bons résultats lors des concours d’entrée des Grandes Ecoles ne sont pas nécessairement les plus propices pour l’apprentissage des langues. Un système qui encourage la transmission, l’absorption puis la régurgitation de connaissances lors des examens, encourage souvent les élèves à avoir une approche plutôt passive et ‘consommatrice’. Arrivés dans le supérieur, ils ont tendance à s’attendre à ce que ce soit leurs enseignants qui leur expliquent non seulement ce qu’il faut apprendre, mais comment.

Ceci est un phénomène que Kinsella et Sherak 1 (in Reid, 1998, p.98) ont également rencontré. Ils notent que :

‘« …l’expérience éducationnelle antérieure d’un étudiant, ainsi que les capacités d’apprentissage qu’il croit posséder, influencent de façon significative ses représentations sur les moyens les plus efficaces d’aborder et d’accomplir une tâche assignée. Par conséquent […] il est assez difficile pour l’étudiant de s’identifier à des méthodes potentiellement prometteuses et de les expérimenter … ».’

Si nous voulons aider nos élèves à devenir plus efficaces, ceci dans une optique d’apprentissage tout au long de la vie, nous considérons qu’il serait souhaitable de les éloigner de cette mentalité et de les encourager à prendre davantage de responsabilités dans leur propre apprentissage. Cela implique des changements dans leurs habitudes de travail antérieures, ainsi que des changements dans leurs représentations sur l’apprentissage. Accepter de nouvelles approches demande souvent des changements de perspectives radicaux de la part des apprenants, mais aussi de la part des enseignants, sur l’apprentissage des langues. Cependant, la modification des représentations d’un apprenant, ainsi que celles d’un enseignant, ne serait pas possible tant que le sujet lui-même n’est pas convaincu de l’efficacité de cette nouvelle façon de travailler ; ceci d’autant plus que nos élèves, admis dans une Grande Ecole d’ingénieur, sont déjà dans une position de réussite générale. Nous nous trouvons ainsi confrontés à toute la complexité d’une problématique liant représentations et autonomie.

Notes
1.

“…a student’s previous educational experiences and perceived learning strengths significantly shape his/her views about the most effective ways to approach and ultimately complete an assigned task. Consequently […] it is rather difficult for students to identify and experiment with potentially promising methods ...”.