2.2.3. Discussion

Nous avons ici constaté qu’aussi bien les enfants de 5 ans que ceux de 8 ans privilégient la stratégie de l’exécution centripète, quel que soit le type de dessins. Ainsi, l’usage du PEC ne paraît pas conditionné par les propriétés visuelles de forme et de couleur des stimuli. Il ressort que les enfants ne sont pas sensibles aux irrégularités de forme et de couleur. Ces dernières n’affectent pas le PEC. Aussi, si l’on postule que le PEC constitue un procédé d’exécution reflétant une propriété émergente dans le mode d’appréhension perceptive des stimuli, on peut alors considérer que la présence d’irrégularités visuelles de forme ou de couleur n’affecte pas le traitement des propriétés des stimuli. Dans ces conditions, l’hypothèse selon laquelle, en présence d’irrégularités visuelles, les enfants (en particulier les plus jeunes) opèreraient un traitement analytique des stimuli, en procédant à une catégorisation des informations, serait invalidée. Pourtant, selon nous, cette hypothèse n’est pas à écarter, mais doit être précisée, reformulée. En effet, les résultats des expériences 4 et 5 suggèrent que le traitement analytique des stimuli serait bien dû à la présence d’irrégularités visuelles, mais que celui-ci serait conditionné par des différences relatives à la saillance des éléments formant les dessins explorés. Ce sont les irrégularités de saillance visuelle qui initialement perturberaient le mode d’appréhension holistique des stimuli (et donc l’émergence du PEC), et induiraient ensuite un traitement analytique résidant dans une opération de catégorisation basée sur la discrimination des parties selon leurs similitudes et leurs différences. A la différence des simples irrégularités visuelles de forme et de couleur (expérience 5), la saillance visuelle (expérience 4) fait intervenir deux facteurs étroitement liés (fusionnés): d’une part, la prégnance des informations locales les plus saillantes, qui est susceptible de modifier l’appréhension perceptive des stimuli, et d’autre part la discriminabilité des éléments constitutifs des stimuli (la saillance visuelle étant elle-même, par définition, une irrégularité visuelle), pouvant donner lieu à une catégorisation des parties.

Dans ce qui suit, nous discutons les effets de la saillance visuelle et des irrégularités de forme et de couleur sur le PEC. Nous tentons d’expliquer pourquoi seule la saillance visuelle perturbe le PEC, en entravant le traitement holistique des stimuli sur lequel repose la propriété émergente déterminant l’adoption privilégiée de la stratégie de l’exécution centripète. Nous revenons également sur l’effet différencié de l’âge dans les deux expériences.