1.3.1.4 Les biais de la mutualisation des ressources

Avec les fonds papier, le paysage documentaire faisait apparaître des spécificités dans les collections des bibliothèques, relayées par les CADIST, réseau d’acquisition thématique. Les collections sont le résultat de sélections scientifiques, réalisées par les compétences des professionnels de bibliothèques. A ce titre, certaines bibliothèques non-CADIST ont pu, à force de ‘« sélection scientifique ’», constituer des collections capables de relayer les fonds thématiques spécialisés des CADIST, comme le montre la citation suivante :

‘« Nous avons une collection de livres en sciences économiques qui est très riche et très pointue ; en collaboration avec les enseignants en sciences économiques, on obtient une collection de livres anglo-saxons, en sciences sociales et surtout en économie extrêmement importante, ce qui fait que certaines bibliothèques même comme Paris Dauphine qui sont CADIST nous sollicitent très souvent. » Dseg 7’

Or, avec le numérique, particulièrement pour les périodiques électroniques, l’acquisition massive des ressources électroniques par le biais des consortiums amène à une homogénéisation documentaire. A titre comparatif, le consortium d’acquisition de ressources électroniques de l’OhioLINK Journal Center 242 - (EJC), mis en place depuis 1998, a élargi sa couverture documentaire en périodiques électroniques et bases de données. Bénéficiant des statistiques d’utilisation des ressources électroniques, l’EJC a entamé une analyse des données pour connaître l’usage des collections acquises sans sélection préalable. L’étude montre une augmentation progressive et presque explosive des téléchargements d’articles. Par ailleurs :

‘« Le nombre d’articles téléchargés d’EJC, non disponibles localement, dépasse nettement le nombre de transactions ILL de l’OhionLink (…) c’est seulement la mise à disposition immédiate qui permet d’atteindre de tels chiffres ».’

Ainsi, plus les accès sont ouverts, plus la consultation augmente. Les bibliothèques ayant les collections papier les plus modestes rejoignent les autres bibliothèques dans l’augmentation de la consultation des périodiques électroniques. Le temps ou l’opportunité, est directement interpellé dans cette étude. Grâce à des collections hybrides, l’accès électronique immédiat côtoie les activités des services traditionnels. Les services de PEB voient leurs activités de PEB et de la FDD diminuer de manière importante au profit de l’accès électronique.

Le dispositif d’acquisition de ressources électroniques le plus significatif de notre terrain, Couperin, ne permet pas encore d’envisager une démarche d’évaluation similaire à celle de l’EJC. L’indisponibilité des données d’usage ne permet pas encore de se prononcer sur la pertinence de l’offre de Couperin. Le traitement de données exploitables permettrait d’identifier des tendances de la consultation et de se pencher sur leur signification. Le cadre d’interprétation tiendrait à la fois des spécificités de l’offre du consortium, de la politique documentaire des SCD et de leurs objectifs de couverture documentaire et de diffusion de l’information. Ceci permettrait de dégager les insuffisances de l’offre électronique commerciale pour la réajuster aux priorités des SCD. Le but ultime serait de donner des arguments concrets aux professionnels des bibliothèques lors des renégociations de bouquets, en terme d’offre et/ou de prix.

Notes
242.

- Sanville, Thomas J.- L’utilisation des journaux électroniques dans l’OhioLINK electronic journal center. < http://www.ifla.org/IV/IFLA67/papers/118-141f.pdf > (Consulté le 15 juillet 01)