Chapitre 4. Vers une analyse « post-darwinienne » de l’évolution économique

L’argumentation que Veblen développe dans le cadre de sa critique des théories marginalistes a une portée qui dépasse les frontières de l’économie néoclassique. En effet, en affirmant que les principales limites du marginalisme résident dans sa représentation fixiste de la nature humaine et dans la prétention de ses auteurs à mettre à jour des « lois naturelles » de la société, c’est l’existence même de quelque loi économique universelle que Veblen dénie.

Le point de vue scientifique « post-darwinien » dont il se réclame le conduit ainsi à invalider toute tentative visant à établir des théories économiques a-historiques. Pour autant, la prise en compte de l’histoire ne suffit pas à faire de l’économie une science « évolutionniste ». Les critiques qu’adresse Veblen à l’encontre du système marxien, des écoles historiques allemandes et de la pensée spencérienne sont, à cet égard, éclairantes.

Nous exposerons dans un premier temps les arguments que Veblen oppose à l’historicisme et à l’historisme, à travers sa lecture de Karl Marx et des écoles historiques allemandes (section 1). Nous montrerons dans un second temps que l’économie « évolutionniste » que Veblen appelle de ses vœux se distingue singulièrement de l’évolutionnisme spencérien (section 2).