Chapitre 6. Habitudes, institutions, culture

Le précédent chapitre nous a permis d’appréhender le premier volet de la théorie veblenienne des comportements humains, celui relatif aux instincts. Il convient à présent de porter notre attention sur le second pan de cette théorie, c’est-à-dire la composante habituelle du comportement de l’homme. Dissipons d’emblée le malentendu qui pourrait naître d’une telle présentation. Ainsi que nous le verrons, les instincts et les habitudes ne déterminent pas, selon Veblen, deux types de comportements indépendants l’un de l’autre. Ils entretiennent, au contraire, des relations d’étroite complémentarité. Par ailleurs, l’importance du concept d’habitude tient largement au fait qu’il est consubstantiel à la notion d’institution. En effet, celle-ci doit être entendue comme une habitude de pensée communément partagée par les membres d’une société. Les institutions structurent les rapports sociaux et sont susceptibles de se transmettre de générations en générations (section 1). Une fois établies, elles forment un « complexe culturel ». Cette notion désigne la matrice institutionnelle en vigueur à un moment donné de l’évolution sociale. À travers elle, Veblen met l’accent sur le contrôle qu’une société exerce sur elle-même et sur chacun de ses membres. Il affirme ainsi l’existence d’un « contrôle social » multiforme dont dérive, généralement, le verrouillage d’une « logique institutionnelle » donnée (section 2).