Partie 1. Du droit de l’information à la reconnaissance du droit à l’information

Quel que soit son support de diffusion, l’information ne bénéficie pas de texte la consacrant pleinement et exclusivement. Elle a toujours été envisagée à travers la liberté d’expression ou de la communication.

L’affirmation d’une liberté pleine et entière de la presse 125 était nécessaire au 18ème siècle pour garantir une information libre. Il fallait mettre un terme aux pratiques liberticides de l’Ancien Régime. Malgré son appellation, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen n’était pas vraiment destinée au citoyen, en ce qui concerne la presse et l’information. La liberté intéressait plus les journalistes, les imprimeurs, même si indirectement leur liberté permettait au peuple d’être informé. Puis la grande loi de 1881 sur la liberté de la presse proclame l’imprimerie libre. Ce sont donc les diffuseurs qui sont avant tout concernés. La loi de 1881 élabore un véritable régime juridique de la presse, générant celui de l’information, avec un système répressif finalement assez contraignant mais probablement nécessaire. La loi de 1881 ne concerne pas que l’information mais la presse dans sa globalité, que ce soit le divertissement, la caricature… même si la plupart de ses articles sont particulièrement pertinents pour affirmer une information libre. L’information est donc considérée comme un objet de droit, c’est le droit de l’information, issu des lois sur la presse. Mais l’information n’est qu’un élément de la presse parmi d’autres, sans règles spécifiques distinctes de ses autres composants, envisagée essentiellement à travers ses supports de diffusion.

L’évolution de la société démocratique a permis de développer une conception différente mais néanmoins primordiale de l’information. Elle ne va plus être un simple objet de droit. Le destinataire de l’information va être au cœur de la liberté de la presse.

Ainsi, dès les années 1960, quelques écrits attestent de la reconnaissance d’un certain droit à l’information. L’Encyclique Pacem in Terris, publiée le 11 avril 1963 révèle les prémices d’un droit à l’information à travers le droit de tout être humain à une information objective. En avril 1964, le pape Paul VI, lors du séminaire des Nations Unies sur la liberté de l’information, déclare :

‘« Le droit à l’information est un droit universel, inviolable et inaltérable de l’homme moderne. Il s’agit d’un droit à la fois actif et passif : d’une part, la recherche de l’information, et, d’autre part, la possibilité pour tous de la recevoir » 126 . ’

D’une manière plus générale, en 1969, J. d’Arcy affirme pour la première fois le droit de l’homme à la communication 127 . Dans un article publié par la revue de l’Union européenne de radiodiffusion il affirme :

‘« La Déclaration universelle des droits de l’homme qui, il y a vingt et un ans, pour la première fois établissait en son article 19 le droit de l’homme à l’information, aura un jour à reconnaître un droit plus large : le droit de l’homme à la communication » 128 .’

On s’oriente alors vers un certain droit à l’information, pressenti en France dans les années 1980 à travers les lois sur la communication et les décisions du Conseil constitutionnel s’y rattachant. Ces lois ont mis en évidence les principes de pluralisme et d’honnêteté de l’information, principes qui permettront d’affirmer le droit à l’information. Si les règles édictées sont contraignantes pour les diffuseurs, le but est d’assurer un pluralisme garantissant le droit à l’information du public.

L’établissement du droit de l’information, comme d’un droit à l’information n’aurait pu se faire sans la reconnaissance de certaines libertés : conscience, expression, communication. Le régime juridique de l’information, dans une société démocratique, est fondé sur ces libertés, qu’il soit organisé sous le régime d’autorisation ou de déclaration. C’est à partir de ces libertés affirmées explicitement dès 1789 que l’évolution s’est faite vers un véritable régime juridique de la presse, dont est issu celui de l’information, pour finir par reconnaître un certain droit à l’information dans les années 1980. Le droit de l’information, avec un régime juridique très précis, dont les règles concernent essentiellement les transmetteurs de l’information, qu’il s’agisse des journalistes ou des éditeurs (titre 1), s’est transformé en un véritable droit à l’information dont les destinataires essentiels sont les auditeurs, lecteurs ou téléspectateurs. Les règles requises pour une information libre dans une société démocratique, règles qui participent aux fondements du régime juridique de l’information, à savoir le respect du pluralisme et de l’honnêteté, devenues des qualités intrinsèques de l’information, ont révélé un véritable droit à l’information (titre 2).

Notes
125.

Selon l’article 11 de la DDHC.

126.

Sur le site Internet des Nations Unies : http://www.un.org/

127.

Pour approfondir son analyse, voir aussi F. Balle, Médias et Sociétés, Paris, Montchrestien, 1994, p. 262.

128.

Revue de l’UER, novembre 1969.