Section I. Les règles garantissant le pluralisme

Pour vérifier la mise en œuvre des principes de pluralisme et de transparence, la loi du 23 octobre 1984 avait créé une nouvelle autorité administrative indépendante : la Commission pour la transparence et le pluralisme de la presse 430 . Les membres de la Commission étaient nommés par décret du Président de la République pour une durée de six ans non renouvelable, ils ne pouvaient être révoqués, ce qui devait garantir leur indépendance. La Commission disposait de larges pouvoirs d’investigation auprès des entreprises de presse pour ses vérifications. Elle adressait annuellement au Président de la République et au Parlement, un rapport sur l’application de la loi de 1984. Ces décisions étaient susceptibles de recours devant le Conseil d’Etat. Cependant, le Conseil constitutionnel avait censuré tous ses pouvoirs de décision accordés par la loi de 1984, pour éviter qu’ils ne produisent des effets équivalents à ceux d’une autorisation préalable 431 . La loi de 1986 abrogeant celle de 1984 n’ayant pas repris les dispositions concernant la Commission pour la transparence et le pluralisme de la presse, cette autorité administrative indépendante n’a plus d’existence légale et aucune autorité équivalente n’a été créée, ce qui peut paraître regrettable.

La Commission pour la transparence et le pluralisme de la presse n’avait pourtant pas démérité dans la conduite de ces travaux, comme le rappelle G. Pepy 432 . Elle a accepté une certaine progressivité dans l’application de la loi de 1984. Ainsi, par exemple, elle a limité entre mars 1985 et mars 1986, son contrôle des obligations d’insertion dans les publications des informations destinées au lecteur. La Commission a dans l’ensemble été très tolérante sur la publication des comptes globaux des entreprises. En matière de transparence financière, elle a pu mettre en oeuvre tous ses moyens de contrôle, mais elle a écarté l’usage des pouvoirs d’investigation inquisitoriaux à sa disposition. Elle a préféré selon ses propres termes « faire pleinement confiance à l’éditeur et éviter des investigations de nature à ébrécher le domaine privé de ceux qui investissent dans l’édition de presse et, indirectement, la liberté d’entreprise et le secret des affaires » 433 . La Commission a entretenu un effort d’information et de dialogue avec les éditeurs.

La composition de la Commission 434 a favorisé son ancrage administratif et politique, très critiqué. Pourtant, il n’est pas certain qu’un dispositif limitant les concentrations puisse fonctionner hors de toute intervention administrative. De plus, l’absence d’une représentation professionnelle en son sein n’a pas renforcé l’autorité de la Commission. Enfin, elle a dû supporter la volonté du législateur en 1986 d’abandonner toute référence à la notion de contrôle de l’entreprise de presse, ce qui privait l’institution de plusieurs de ses raisons d’être. Il est donc regrettable que cette autorité ait disparu, même si elle était imparfaite, elle pouvait être utile à l’impulsion de la liberté de la presse comme le rappelle M. Pepy. Malgré l’absence de régulation pour la presse écrite, le législateur a mise en place des règles strictes.

Notes
430.

Pour approfondir le détail des pouvoirs de la Commission, voir par exemple : J-C. MASCLET, « La loi sur les entreprises de presse », Actualité juridique droit administratif, 1984, p. 644.

431.

Sur ce point, voir par exemple P. LIVET, « L’autorisation administrative préalable et les libertés publiques », LGDJ, Paris, 1974, 334 p.

432.

G. PEPY, « La réforme du régime juridique de la presse », AJDA 1986, p. 527.

433.

Rapport de la Commission, mars 1985 - mars 1986, JO, doc. 1986, n° 54s

434.

Trois membres désignés par les plus hautes autorités de l’Etat et trois membre issus des grands corps juridictionnels.