Chapitre 1. La nature incertaine du droit à l’information

Depuis les années 1980 et la libéralisation de la communication audiovisuelle, le droit à l’information s’affirme comme un nouveau droit. La doctrine 598 a toujours eu à cœur de classer les différents droits en catégories, alors même que le protecteur principal des droits et libertés, le Conseil constitutionnel, s’est toujours refusé à reconnaître l’élaboration d’une hiérarchie à travers sa jurisprudence 599 .

Les catégories sont nombreuses. Les droits et libertés sont classés en différentes générations, certaines libertés sont publiques, certains droits fondamentaux, parfois interprétés comme « l’indice d’un degré d’estime que le juge de la constitutionnalité donne à une liberté » 600 , ou encore les libertés peuvent être de premier ou second rang 601 , des principes matriciels 602 , directeurs 603 . Certains droits sont objectifs, d’autres subjectifs… Certains droits ou libertés ne sont pas accompagnés de qualificatifs, d’autres sont des principes constitutionnels, des objectifs de valeur constitutionnelle, des impératifs et quelques-uns appartiennent même à plusieurs catégories qui semblaient pourtant s’opposer.

Le droit à l’information participe à ce mouvement de « déclassification », il ne semble appartenir vraiment à aucune catégorie, si ce n’est à celle des droits fondateurs d’une société démocratique (section I). Dans ce sens, il apparaît plutôt comme une règle objective, mais nous pensons qu’une règle objective peut devenir un droit subjectif (section II).

Notes
598.

Par exemple, B. Mathieu et M. Verpaux exposent différentes typologies des droits et libertés fondamentaux. La première classification renvoie à la nature même des principes constitutionnels. Une deuxième renvoie à l’articulation des principes entre eux. Une autre classification peut être établie selon l’utilisation qui est faite des principes en cause. La quatrième classification retenue vise la question du titulaire ou du débiteur du droit ou de la liberté fondamentale. Une cinquième classification est relative à l’objet des droits et libertés fondamentaux. Enfin une dernière classification doit prendre en compte la hiérarchie de valeur qui peut exister entre les droits fondamentaux, in Contentieux constitutionnel des droits fondamentaux, LGDJ, Paris, 2002, p. 417.

599.

Voir par exemple G. LEBRETON, Les droits fondamentaux de la personne humaine en 1995 et 1996, L’Harmattan, 1998, 219 p.

600.

J. ROBERT, « Le Conseil constitutionnel », in Les juridictions suprêmes, du procès à la règle, C.E.R.C.R.I.D, Publications de l’Université de Saint-Etienne, 1991, p. 123 ou encore J. ROBERT « La protection des droits fondamentaux et le juge constitutionnel français, bilan et réformes », RDP, 1990, p. 1262.

601.

En ce sens, L. FAVOREU, « Le droit constitutionnel jurisprudentiel », RDP, 1986, pp. 491-494.

602.

Sur la notion de principe matriciel, voir par exemple B. MATHIEU, « Pour une reconnaissance de principes matriciels en matière de protection constitutionnelle des droits de l’homme », Dalloz 1995, chron. P. 211.

603.

Sur ce point, M-L PAVIA, « Eléments de réflexion sur la notion de droit fondamental », LPA, 6 mai 1994, n° 54, pp. 6-13.