Section II. La question de la juridictionnalisation du CSA

La nécessité d’une régulation, autant pour la presse écrite que pour la communication audiovisuelle nous paraît sans appel, mais il n’en reste pas moins que le citoyen est mis à l’écart. Il ne peut qu’alerter ce type d’autorité s’il estime que le droit à l’information pluraliste et honnête n’est pas respecté, mais ne pourra pas le faire directement sanctionner à travers l’autorité de régulation. Seules les organisations professionnelles et syndicales représentatives du secteur de la communication, le Conseil national des langues et cultures régionales, les associations familiales reconnues par l’Union nationale des associations familiales peuvent saisir le CSA et lui demander d’engager une procédure de mise en demeure. Le CSA n’est tenu de faire suite à la demande 795 . Le droit à l’information qui est bien réel, est difficilement invocable puisque les bases juridiques restent floues. Mais dans un autre sens, le CSA a acquis un certain pouvoir de sanctions. Certes, dans la pratique, ces sanctions ne sont pas si contraignantes, mais celles-ci ainsi que la procédure devant être exercée devant le CSA tend à une assimilation de l’organe de régulation à une juridiction. C’est en tout cas ce qu’affirme la CEDH, comme nous le verrons dans un paragraphe suivant. Les pouvoirs du CSA sont relativement importants et très variés 796 . Nous nous intéresserons principalement à son pouvoir de sanctions 797 qui peuvent le conduire à être considéré comme une juridiction, alors propice à protéger le droit à l’information. A l’instar d’autres AAI, son rôle et son pouvoir sont devenus si ambigus que se pose donc la question de sa nature juridictionnelle.

Notes
795.

En ce sens, voir K. FAVRO, « Pour un plaidoyer en faveur du rôle des téléspectateurs en matière de régulation de la communication audiovisuelle », in Téléspectateur et message audiovisuel. Contribution à l’étude des droits du téléspectateur, Paris, LGDJ, Tome 215, 2001.

796.

- Il assure la délivrance des autorisations pour les services audiovisuels diffusés par voie hertzienne. Cette autorisation est subordonnée à la conclusion d’une convention passée entre le CSA et la personne désireuse d’obtenir l’autorisation. Paradoxalement, c’est le CSA qui fixe les modalités de la convention ou du cahier des charges des chaînes du secteur privé, mais c’est encore le Gouvernent qui fixe les règles pour le secteur public. Le CSA ne peut donner qu’un avis.

- Comme la Haute autorité et la CNCL, le CSA nomme quatre des douze membres des conseils d’administration des sociétés nationales de programme et de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) en tant que personnalités qualifiées. Il désigne, en outre, les présidents des sociétés nationales de programme qu’il choisit parmi les membres du conseil d’administration qu’il a nommés, à l’exception de celui de Radio France internationale (RFI) dont il choisit le président parmi les représentants désignés par l’Etat. Mais depuis la loi du 1er août 2000, le CSA nomme pour cinq ans le président de la holding France Télévision qui est en même temps le président de France 2, France 3 et de la Cinquième.

- Le CSA peut formuler des recommandations ou propositions notamment dans le cadre de son rapport annuel. Il est consulté, sur les décrets d’application de la loi du 30 septembre 1986 et publie à ce titre ses avis. Il peut aussi saisir le Conseil de la concurrence pour avis ou être saisi par lui. Sur l’ensemble des activités relevant de sa compétence, le CSA peut être saisi de demandes d’avis ou d’études par le Gouvernement, les Présidents de l’Assemblée nationale ou du Sénat et les commissions compétentes de ces deux assemblées. Il est également consulté par le Conseil de la concurrence sur des pratiques restrictives de la concurrence et les concentrations économiques intervenant dans le secteur audiovisuel. Les avis du CSA sont sollicités par le Gouvernement sur les projets de loi sur l’audiovisuel,la définition des bandes de fréquences dont l’attribution ou l’assignation sont confiées au Conseil et celles qui sont attribuées aux administrations de l’Etat, la fixation des règles applicables aux radios et aux télévisions distribuées par câble, l’adoption des obligations concernant en particulier la publicité à la radio et à la télévision, la diffusion des films et des œuvres audiovisuelles, la contribution des télévisions à la production, ainsi que l’indépendance des producteurs à l’égard des diffuseurs, la modification des dispositions des cahiers des missions et des charges des radios et télévisions publiques ou de l’Institut national de l’audiovisuel, l’élaboration des spécifications techniques applicables aux réseaux câblés et aux signaux émis par les radios et télévisions utilisant la voie hertzienne. Tous ces avis sont motivés et publiés au Journal Officiel.Le CSA peut également être consulté sur la définition de la position de la France dans les négociations internationales sur la radiodiffusion sonore et la télévision.

- Le CSA fixe les règles concernant les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives aux campagnes électorales que les radios et télévisions publiques sont tenues de produire et de programmer en vertu d’un texte législatif.

- Par ailleurs, le CSA adresse, pour la durée des campagnes électorales, des recommandations aux radios et aux télévisions publiques et privées, ainsi qu’aux services locaux du câble. Pour les émissions d’expression directe, le CSA fixe les modalités selon lesquelles un temps d’émission est accordé chaque année aux formations politiques représentées par un groupe au Sénat ou à l’Assemblée Nationale, ainsi qu’aux organisations syndicales et professionnelles représentatives à l’échelle nationale. Ces émissions sont diffusées sur les antennes de France Inter, de France 2 et de France 3.

- Le CSA fixe les modalités du droit de réplique aux émissions du Gouvernement. Celui-ci peut faire programmer à tout moment par les radios et télévisions publiques les déclarations ou communications qu’il juge nécessaires.

- Chargé par la loi de « veiller à la qualité des programmes », le CSA dispose, dans le domaine de l’éthique des programmes, d’un large pouvoir de recommandation. Il en fait usage régulièrement dans les domaines tant de l’information que de la protection de l’enfance et de l’adolescence (images violentes, propos racistes, horaires de diffusion des films interdits aux mineurs...).

-Le CSA adresse des recommandations au Gouvernement pour le développement de la concurrence dans les activités de communication audiovisuelle.

797.

S. Clément-Cuzin, « Le pouvoir de sanction du Conseil supérieur de l’audiovisuel » AJDA 2001 Chroniques p. 111.