Chapitre 2. Un droit à l’information s’effaçant devant les nécessités de l’ordre public

Outre la protection d’autrui, la sauvegarde de l’ordre public est la deuxième limite que le Conseil constitutionnel oppose au droit à l’information. Dans le même sens, l’article premier de la loi du 30 septembre 1986 modifiée explique que « la communication audiovisuelle est libre…elle peut être limitée par le respect de la dignité de la personne humaine (…) et par la sauvegarde de l’ordre public ». En matière de communication, (audiovisuelle comme presse écrite), la loi de 1881 précise quels sont les risques d’atteinte à l’ordre public. Mais les infractions de presse relatives à l’ordre public ne font pas toujours l’objet d’une définition précise, le juge a donc largement contribué à éclairer la matière.

L’ordre public 1014 a pour finalité de permettre à la société de fonctionner de manière satisfaisante, sans trouble manifeste. La spécificité de l’établissement d’un ordre public dans des matières concernant les libertés publiques ou les droits de l’homme tient au fait que l’intérêt individuel en cause n’est plus celui de l’homme en tant que citoyen mais bien de l’homme, être de chair et de sang. Plutôt qu’opposer systématiquement ordre public et liberté 1015 , nous envisagerons la protection du droit à l’information par le respect de l’ordre public, même si les textes français relatifs à la presse protègent particulièrement l’ordre public, en limitant la liberté de la presse et donc le droit à l’information. En effet, alors que malgré quelques incertitudes le droit à l’information tend à justifier certaines atteintes à la protection des droits des personnes, ce même droit à l’information va plus ou moins s’effacer devant les nécessités de l’ordre public. Nous devons toutefois nuancer ces propos car la CEDH est moins stricte que les juges français dans les limites subies par le droit à l’information du fait de la sauvegarde de l’ordre public. Mais ces limites sont souvent justifiées car le droit à l’information n’est pas le droit de tout dire. Le droit à l’information est certes une condition d’existence d’une société démocratique. Mais peut-on toujours parler de démocratie dans une Société où l’ordre public n’est plus respecté ?

Du délit de fausses nouvelles aux atteintes aux intérêts de la nation, les juges se montrent particulièrement protecteurs de l’ordre public, à l’instar des textes. Pour autant, on ne peut considérer que l’ordre public s’oppose au droit à l’information, (section I), même si les infractions de presse protègent l’ordre public et peuvent aller à l’encontre du droit à l’information (section II).

Notes
1014.

Voir par exemple R. POLIN (sous la dir. de), L’ordre public, PUF, 1996, 128 p.

1015.

Voir par exemple la contribution de R. ERGEC, « Les libertés fondamentales et le maintien de l’ordre dans une société démocratique : un équilibre délicat », in Maintien de l’ordre et droits de l’homme, Bruxelles, Bruylant, 1987, pp. 3-33.