2.2.1. Absence de correction

Notre tableau laisse apparaître 20 absences de corrections dans le corpus, nombre qui, comme nous l’avons déjà précisé, ne peut être considéré comme définitif dans la mesure où notre observation portait essentiellement sur les réactions des enseignants face à l’erreur. En conséquence, de nombreux passages non corrigés n’ont pas été relevés. C’est la raison pour laquelle nous nous pencherons de prime abord sur ce type de réaction. Il apparaît comme l’un des plus importants dans la situation d’enseignement étudiée, et il convient donc d’en analyser les enjeux. L’absence de correction désigne une absence de réaction face à l’erreur, absence de reprise, avec en général continuation de l’activité ou de la discussion.

D’une façon générale, nous avons observé de prime abord une très grande acceptation de l’erreur dans les cours. Cette absence de correction nous a paru légitime avec ce public d’adultes migrants, en vue de favoriser des productions libres et spontanées, et un climat détendu dans la classe. Selon les objectifs des enseignants, on ne visait pas une maîtrise parfaite de la langue mais une capacité à communiquer en L2 dans la vie quotidienne, donc à comprendre et se faire comprendre, ce que les erreurs n’empêchaient pas nécessairement. De plus, vu l’hétérogénéité du public, on aurait eu un problème à vouloir tout corriger : les publics débutants FLE, par exemple, ne pouvaient être repris de la même manière que les femmes parlant couramment mais venant surtout pour un travail de l’écrit.

Or, en effet, le retour sur nos observations par l’analyse du corpus nous permet de constater que tout n’est pas, de loin, corrigé lors de la production orale. Notons également que ce sont les temps de production libre qui font essentiellement l’objet d’absences de correction. Il semble néanmoins que, lorsqu’il y a correction, la réaction prépondérante des enseignants soit un traitement immédiat (voir 2.2.2.). Cependant, il nous apparaît que nos premiers constats ont pu être faussés de prime abord par certaines modalités de la correction. Comme nous le verrons, certains extraits révèlent une forte correction immédiate discrète, qui a pu nous échapper au départ, puisqu’elle prend l’aspect d’un guidage qui peut ne pas être remarqué. Nous montrerons donc ci-après la forme que peut prendre une absence de correction réelle, puis nous reviendrons sur l’aspect équivoque de cette « absence », en montrant qu’elle peut se révéler dans certains cas n’être qu’une apparence.