2.2.2. Correction immédiate automatique

La correction immédiate est, en effet, le type de traitement de l’erreur prépondérant relevé dans les cours (68,5 % dans le tableau). Avec la séquence 4, nous avons entrevu une correction discrète qui peut facilement passer auprès des apprenants pour une simple aide de l’enseignant, puisque leurs interventions guident la conversation sans réellement l’interrompre. Il existe cependant des corrections immédiates bien plus fortes que nous tenterons d’analyser : on notera au passage que les corrections fortes sont, au vu du tableau, bien plus fréquentes que les corrections discrètes (60 contre 31 discrètes).

Par correction immédiate, nous entendons la répétition ou reprise de la forme par l’enseignant dans le tour de parole qui suit, avec au besoin interruption de l’apprenant. Ces traitements peuvent être discrets (correction discrète ou indirecte) ou forts et insistants : ils sont alors répétés, une ou plusieurs fois avec une intonation forte, ou peuvent donner lieu à des explications ou remarques de la part de l’enseignant.

La correction immédiate est problématique en ce qu’elle donne souvent lieu à prise par l’apprenant, pouvant laisser penser qu’une acquisition s’est produite. Pourtant, comme le montre le tableau, les prises sont loin d’être systématiques : sur 91 corrections immédiates, 44 donnent lieu à prises contre 47 sans prises. De plus, nous pouvons nous interroger sur l’impact réel de ce type de prises pour l’acquisition : la répétition de l’apprenant peut être effectivement due à une remise en question des hypothèses qu’il fait sur la langue, mais elle peut aussi être conditionnée par la réaction de l’enseignant, l’habitude, ou encore la volonté de passer outre. C’est ce que nous allons voir dans les exemples qui vont suivre.

Ainsi, d’une manière générale, les enseignants observés sont très souvent dans un rapport frontal avec leurs apprenants, c’est-à-dire qu’ils les interrogent dans un échange vertical (enseignant-apprenant), même lorsqu’il s’agit de parler de soi, raconter une anecdote, etc. Cette conception de l’enseignement favorise les corrections immédiates, puisque l’enseignant est le détenteur du savoir et de la norme.

Comme le montre le tableau, la correction immédiate discrète est plus fréquente, dans notre corpus, en ce qui concerne les erreurs de syntaxe (16 sur 31), tandis que la correction immédiate forte concerne davantage les erreurs de prononciation (phonétique, lecture : 19 sur 60), même si elle est plus également répartie selon les types d’erreurs. Cela nous montre peut-être que les enseignants avec lesquels nous avons travaillé sont moins à l’aise dans la correction syntaxique, plus délicate qu’une simple rectification phonétique : nous avions déjà émis cette hypothèse par rapport à l’absence de correction des femmes migrantes dont l’interlangue est fossilisée. De plus, une syntaxe défaillante gêne moins la communication qu’une erreur de prononciation, ce qui peut expliquer l’insistance des enseignants sur ce dernier point.