Les trois moments du traitement de l’erreur

En tout état de cause, il convient de rompre avec un traitement identique pour tous les apprenants (cf. 3.1.) pour éviter de réduire les parcours individuels à la seule variable de caractère des apprenants. Pour se diriger, dans une optique constructiviste, vers une pédagogie intégrant et s’appuyant sur l’erreur, dont nous avons pu démontrer l’intérêt au fil de notre développement, le triple questionnement entrevu ci-dessus devient fondamental : que, quand et comment corriger. Ces trois aspects du traitement de l’erreur sont intimement liés : ainsi, même si nous avons choisi d’une certaine façon de privilégier le comment dans notre typologie (réactions des enseignants), notre réflexion s’est toujours parallèlement appuyée sur les deux autres aspects : par exemple nos analyses de la correction différée/immédiate relevaient de la question du quand ; nos hypothèses sur l’utilisation d’autres langues, sur les questions de phonétique ou de syntaxe, avaient quant à elles également trait au problème du que. On note donc bien l'inséparabilité de ces trois éléments, et l’impossibilité de tenter de répondre individuellement à chacun de ces points.

De même, il s’avère peu judicieux, voire impossible, de déterminer des règles strictes pour l’articulation de ces trois problèmes. En effet, s’il est entendu que le profil de l’apprenant est à prendre en compte, il apparaît que seul l’enseignant, dans sa classe, est à même d’effectuer ces choix. Dès lors, on retiendra que la cohérence de la démarche d’un enseignant ne pourra se juger que dans son questionnement et son adaptabilité aux apprenants : les certitudes ne semblent pas de mise sur ce point didactique, tant les éléments à prendre en compte sont nombreux. De plus, nous avons vu (cf. 3.1.) que c’est avant tout dans la démarche générale d’enseignement que vont se situer, s’il y a lieu, les changements à opérer : une réflexion sur un traitement de l’erreur efficace va nécessairement passer par une centration sur l’apprenant et ses stratégies d’apprentissage.

Or, si les prescriptions s’avèrent impossibles, les pistes didactiques n’en sont pas moins nombreuses pour l’enseignant : notre première partie a contribué à mettre en évidence différentes théories qui sont autant d’éléments de réflexion. La question de la cause de l’erreur (cf. 1.2.), notamment, nous semble fondamentale. En effet, comprendre les erreurs des apprenants, ou du moins tenter de les comprendre, est déjà un moyen indéniable d’éviter un traitement inadéquat. Cette tâche est difficile pour l’enseignant mais sera facilitée par l’expérience, un dialogue ouvert avec les apprenants, et des connaissances théoriques. Pour réfléchir sur la cause d’une erreur, cependant, il faut se rappeler que l’enseignant effectue toujours une interprétation. C’est donc la tentative de compréhension qui prime sur le résultat. En tenant compte de la cause supposée pour la remédiation, et en restant ouvert aux réactions des apprenants qui pourront l'orienter, il est susceptible de toucher au but, et se situe de toute façon dans une démarche efficace car adaptable et modifiable en fonction des réactions du groupe.