1.3.3. Intégration de l’information provenant des voies dorsale et ventrale : exemple du syndrome de Balint

La reconnaissance normale d’un objet dépend d’une perception intacte des traits spatiaux constituant cet objet (et de ceux qui permettent de distinguer deux objets) et de leur intégration. Pour former des représentations perceptives des objets présents dans notre champ visuel, les informations provenant de la voie ventrale (combinaisons des traits) et les informations provenant de la voie dorsale (localisations exactes des traits) doivent se lier ou « s’assembler ”. Cette question est connue comme le « problème de l’assemblage ” (‘ « ’ ‘ binding problem ’”) ou problème d’intégration des traits. La perte de l’information spatiale conduit alors à des erreurs d’assemblage (‘ « ’ ‘ binding errors” ’) des traits. Les fonctions spatiales du lobe pariétal sont très importantes : une lésion au niveau des lobes pariétaux entraîne une incapacité à lier correctement les traits (par exemple, la couleur, la forme, la taille, le mouvement). Ceci s’observe même quand les patients ont accès explicitement aux stimuli (Bernstein & Robertson, 1998 ; Friedman-Hill, Robertson, & Treisman, 1995 ; Humphreys, Caterina, Wolfe, Olson, & Klempen, 2000 ; Robertson, Treisman, Friedman-Hill, & Grabowecky, 1997). Les déficits liés à l’assemblage des traits chez des patients présentant une lésion pariétale suggèrent fortement que les fonctions spatiales du lobe pariétal interagissent avec la perception des traits (par exemple, la couleur, la forme, la taille) codés au niveau des aires ventrales (Robertson et al., 1997). Ce type de déficit a été nommé ‘«’ ‘ syndrome de Balint ”’ (Balint, 1909 ; Holmes & Horrax, 1919 ; De Renzi, 1982, chap. 4). Ayant perdu la capacité à localiser, certains patients perdraient également la capacité à percevoir plus d’un item à la fois (Robertson et al., 1997). Les deux déficits (localisation et perception de deux objets) pourraient être attribués à une déconnexion entre une représentation intacte des objets et une représentation spatiale intacte (Dehaene & Cohen, 1994). Cependant, certains patients atteints du syndrome de Balint peuvent identifier des objets présentés seuls, même si la perception de la forme implique une représentation de la distribution spatiale du contour. C’est pourquoi la distinction entre les relations spatiales à l’intérieur d’un même objet (qui vraisemblablement dépendent en partie de la voie ventrale) et les relations spatiales entre objets distincts (qui vraisemblablement dépendent de la voie dorsale) semble pertinente. Ainsi, avec une voie ventrale préservée, l’accès aux relations spatiales qui définissent la forme d’un objet individuel devrait être disponible même pour les patients atteints du syndrome de Balint. Ajoutons que Robertson et al. (1997) ont été les premiers à apporter des preuves en faveur de l’hypothèse selon laquelle l’information spatiale non accessible de manière explicite reste préservée de manière implicite. Ainsi, le système dorsal (au moins la portion occipito-pariétale), indispensable à la perception consciente de l’espace ne serait pas nécessaire à l’encodage implicite de l’espace (Kim & Robertson, 2001).