1.2. Que mesure-t-on en IRMf ?

Il nous semble important de nous interroger sur ce que l’on mesure avec l’IRMf, afin de connaître précisément la nature des interprétations des cartes d’imagerie cérébrale que nous serons ensuite autorisés à formuler. L’IRMf permet l’enregistrement d’une ‘ « ’ ‘  réponse hémodynamique  ’” qui naît suite à une activation neuronale ; elle nous permet d’inférer la présence d’activations. La réponse hémodynamique résulte de variations dans trois paramètres plus ou moins couplés : le débit sanguin, le volume sanguin et la concentration en désoxyhémoglobine (dHb), qui est le traceur le plus utilisé à l’heure actuelle. Celui-ci modifie le temps de relaxation transversal des protons des molécules d’eau et sa concentration est cartographiée en IRMf.

La réponse hémodynamique se produit de la manière suivante : les processus métaboliques impliqués dans l’activité neuronale consomment de l’oxygène (Vilringer & Dirnagl, 1995). L’augmentation de la consommation d’oxygène lors d’une activation va alors entraîner une diminution de sa concentration locale. Afin de combler cette diminution, le flux sanguin transportant l’oxygène nouvellement apporté va augmenter par la dilatation des artérioles. Finalement, la concentration en oxygène présente va devenir supérieure à l’oxygène consommé, ce qui va créer un surapprovisionnement d’hémoglobine oxygénée dans les compartiments veineux et capillaires (Kruggel & von Cramon, 1999). Les changements induits dans la concentration locale de dHb peuvent être facilement mesurés aujourd’hui comme un effet de déphasage dans les images de résonance magnétique. Cet effet appelé ‘«’ ‘ contraste BOLD ’” (Belliveau et al., 1991 ; Kwong et al., 1992) est la méthode la plus populaire en IRMf et est employée comme l’une des méthodes expérimentales majeures pour l’analyse des processus cognitifs chez l’Homme. Le contraste BOLD permet d’inférer la présence d’activations (Rosen, Buckner, & Dale, 1998). Gardons en mémoire que la réponse hémodynamique engendre des signaux qui ne sont pas en relation directe avec les activités synaptiques, mais qui sont indirectement corrélés et couplés. De plus, elle permet d’obtenir une bonne résolution spatiale (de l’ordre de quelques millimètres) fixée au moment de l’acquisition des images, mais une résolution temporelle conditionnée par l’inertie de la réponse vasculaire (de l’ordre de quelques centaines de millisecondes). Par ailleurs, la réponse hémodynamique à un événement impulsionnel perdure pendant un certain temps (de l’ordre d’une vingtaine de secondes) après sa mise en route, avant de revenir à sa position initiale d’équilibre. Quelle que soit la nature de l’excitation (motrice, cognitive ou sensorielle), la réponse hémodynamique impulsionnelle est assez similaire, quelle que soit la région corticale activée. Au final, c’est bien la forme de la réponse hémodynamique qui détermine la résolution temporelle en IRMf.

L’IRMf consiste à observer les tissus biologiques à travers les propriétés magnétiques du noyau d’hydrogène. C’est donc un phénomène physiologique (c’est-à-dire la consommation d’oxygène par les neurones) qui est à l’origine du phénomène physique détecté (variation de susceptibilité magnétique du sang). Plus précisément et à l’instar de toute particule, l’unique proton qui constitue le noyau de l’atome d’hydrogène possède un moment magnétique, une sorte de petit aimant, nommé spin. En l’absence de champ magnétique, les spins des noyaux d’hydrogène des tissus s’orientent de façon aléatoire dans l’espace d’un noyau à l’autre, de sorte que le moment magnétique global est nul. En revanche, lorsqu’on place un sujet dans un champ magnétique, les spins des noyaux d’hydrogène s’orientent préférentiellement dans la direction de ce champ. Il apparaît donc un moment magnétique global. ‘ « ’ ‘  Ainsi, tout se passe comme si, en plongeant le sujet dans un champ magnétique, on l’avait aimanté (…) » ’(Mazoyer, 2002, p.208).