1.5.4. Les précautions à prendre préalablement à l’interprétation des cartes d’imagerie cérébrale

En raison des différents processus qui peuvent intervenir lors de la réalisation d’un traitement cognitif, certaines précautions sont à prendre dans l’interprétation des images fonctionnelles d’imagerie cérébrale. Précisons qu’elles concernent la façon dont on peut utiliser non seulement des patterns d’activation pour inférer que des processus spécifiques ont été invoqués (voir ci-dessous de (i) à (v)) mais également des variations d’activations pour prédire une performance sur la façon dont le traitement change dans certaines circonstances. Par ailleurs, il faut rester prudent sur la relation temporelle entre le moment de l’activation et la mise en place d’une stratégie cognitive. C’est pourquoi il est fondamental de conserver en mémoire que des effets de pratique, de fatigue ou encore de contexte peuvent altérer les performances. (voir ci-dessous de (vi) à (vii)).

  1. Il est préférable d’avoir une théorie qui fait une prédiction très spécifique et de considérer par anticipation les théories alternatives, en s’assurant qu’elles ne font pas les mêmes prédictions.
  2. Il est important de noter que le simple résultat qui montre qu’une région est activée, même ayant des propriétés très caractéristiques, ne suffit pas pour inférer que les propriétés de cette région contribuent aux performances.
  3. Il faut reconsidérer le processus dans son contexte. Chaque processus dépend des autres par ses inputs, et, en retour, il envoie ses outputs à d’autres processus.
  4. Chaque combinaison de structures et de processus correspond à une stratégie différente. La solution est de montrer que différentes stratégies produisent différents patterns d’activation.
  5. Les résultats fonctionnels doivent être corrélés avec les résultats comportementaux (taux de bonnes réponses, temps de réponse). Les personnes réalisant une tâche de manière moins performante que d’autres pourraient utiliser une stratégie différente, moins efficace que celles qui obtiennent de bonnes performances. De plus, si les individus diffèrent largement dans leurs niveaux de compétences, les corrélations pourraient même être difficiles à interpréter : des valeurs faibles de voxels activés pour certaines personnes pourraient indiquer que le processus n’est pas bien réalisé, mais de faibles valeurs pour d’autres personnes pourraient indiquer qu’elles sont si expertes que seulement un traitement minimal est requis.
  6. Il faut évaluer comment le traitement change avec la pratique. En effet, avec la pratique, de nouvelles régions peuvent se mettre à fonctionner, pour même devenir meilleures dans la réalisation de la tâche, et des régions initialement activées peuvent diminuer leur activité au-dessous du seuil de détection. Des observations sur les changements d’activation au cours de tâches peuvent conduire à des hypothèses sur la nature des processus ou des structures implémentés dans des régions spécifiques, et ces hypothèses peuvent en retour être examinées par rapport aux activations observées. Ce «golden feedback loop” est plus enrichissant si l’on s’arme d’une série de questions dès le début, basées sur la théorie, que si l’on réalise seulement des investigations de neuroimagerie sans hypothèse préalable et que l’on fait des interprétations post hoc.
  7. Il est nécessaire d’évaluer comment le traitement change avec le contexte. Il faut prendre en considération le fait que ce que les participants ont fait avant de venir au laboratoire peut avoir une incidence sur leurs performances. De plus, donner les instructions de manière identique à tous les participants est primordial : de légères différences dans la façon dont une tâche est décrite ou comment les instructions sont formulées pourraient avoir des effets importants sur la façon dont les participants appréhendent la tâche.