Analyse des réponses données oralement

La double tâche exigeait de formuler une première réponse sur la coloration de la cible, puis de dénommer l’expression de l’amorce. Notre objectif qui a motivé l’analyse sur les réponses données oralement était de montrer que la décision effectuée sur la coloration de la cible impliquait une détection du contenu émotionnel de l’expression de la cible. C’est la raison pour laquelle nous postulions que la réponse qui était formulée sur le type d’expression de l’amorce était influencée par le type d’expression de la cible. En particulier, nous avons souhaité déterminer si (i) la présentation répétée d’une même expression faciale facilitait sa reconnaissance, et (ii) dans quelle mesure la présentation d’une expression faciale différente pouvait interférer sur l’identification d’une expression faciale.

Les réponses données ont été répertoriées pour chaque participant. Puis, des moyennes générales ont été effectuées en regroupant tous les participants en fonction de chaque couple d’expression présenté. Les participants ont donné cinq types de réponses, malgré les instructions : colère, dégoût, joie, surprise et NR (non réponse). Le nombre de NR était cependant extrêmement faible (0.01%). Tous les participants présentaient un taux de bonnes réponses strictement supérieur au facteur chance de 25% (c’est-à-dire treize bonnes réponses) et quarante-deux des quarante-huit participants présentaient un taux strictement supérieur à 50% (c’est-à-dire au minimum vingt-cinq bonnes réponses).

En raison de notre hypothèse portant sur l’impact du traitement de la cible sur le traitement de l’amorce, nous avons réalisé une analyse faisant intervenir le test du chi-carré pour comparer les bonnes réponses pour d’une part, la condition « même expression » et d’autre part, pour la condition « expression différente », toutes expressions confondues. Les résultats obtenus ont montré un plus grand nombre de bonnes réponses pour dénommer l’amorce quand l’amorce et la cible étaient identiques que lorsqu’elles étaient différentes (2=16.24 ; ddl=1 ; p=.0001). La Figure 22 représente la répartition des mauvaises réponses par expression et selon chaque type de condition. Le test du chi-carré a montré que pour chaque couple amorce-cible d’expressions présentées, l’identification de l’expression de l’amorce a été supérieure lorsque la cible était identique à l’amorce pour les expressions de colère (2=9.25 ; ddl=1 ; p=.0001) et de joie (2=13.03 ; ddl=1 ; p=.00001). Ce résultat n’a pas été observé pour les expressions de dégoût (2=2.98 ; ddl=1 ; p=.1) ni de surprise (2=.04 ; ddl=1 ; p=.9). En raison de l’effet facilitateur général que l’on a observé pour l’expression de joie dans les expériences précédentes, une analyse a été conduite en considérant la répartition des mauvaises réponses, c’est-à-dire le nombre de fois où les différentes expressions ont été citées, alors qu’elles ne correspondaient pas à la bonne réponse. Le test du chi-carré a révélé que l’expression la moins citée était la joie, (2=44.66 ; ddl=3 ; p=.00001).

Figure 22. Représentation de la répartition des mauvaises réponses suite au jugement de l’expression de l’amorce. De gauche à droite et de haut en bas : amorçage par la colère, le dégoût, la joie et la surprise. Par exemple, lors de l’amorçage par la colère, la bonne réponse était « colère ». Ainsi, sont représentées les réponses « dégoût », « joie », « surprise » et « NR = non réponse ».