Révélation élective de l’homme créé, appelé, nommé, recréé

Christian SAINT SERNIN, reprenant une communication orale de Michel SERRES, lors d’un séminaire à l’Arbesle, développe dans un fascicule “la transformation des structures de parenté et la refondation du lien social” 344 selon les quatre évangiles.

Nous voyons en effet se développer le message biblique comme une histoire de famille qui exprime, d’étapes en étapes, l’universel.

Depuis Adam et Ève, Caïn et Abel, Noé, Abraham, de Moïse à David, l’histoire singulière n’est pas simplement singulière elle rejoint l’humanité, et le Dieu qui s’y révèle et que chantent les psaumes est celui de tous les peuples. Enfin, les prophètes annoncent les temps messianiques qui ne concernent pas seulement Israël mais toutes les nations de la terre.

Jésus, fils de Dieu, né d’un ventre de femme, est l’accomplissement de cette annonce.

Fils de Dieu et fils de l’homme, il se manifeste comme le premier né d’une création nouvelle, le frère aîné d’une parenté nouvelle.

L’unité de la personne est un fil conducteur d’Adam à Jésus le lien commun entre la création première et la création nouvelle dans l’entreprise de recréation que constitue l’évangile.

À Gadara, un démoniaque nous dit le texte vivait près des sépulcres.

‘Ayant vu Jésus de loin, il accourut, se prosterna, devant lui et s’écria d’une voix forte : Qu’y a-t-ilentre moi et toi, Jésus, Fils du Dieu Très haut? Je t’en conjure au nom de Dieu, ne me tourmente pas. Car Jésus lui disait : Sors de cet homme esprit impur. Et il lui demanda : Quel est ton nom ? Légion est mon nom, lui répondit-il, car nous sommes plusieurs. 345

Le diable peut encore signifier selon l’étymologie grecque “qui “divise le tout 346 ”.

Le combat d’origine biblique est entre le diviseur et le créateur, le diviseur et le rédempteur, entre l’homme et Dieu, l’homme et son prochain, l’homme et lui-même, entre le diviseur et le “ réconciliateur “ de l’homme avec Dieu, de l’homme avec son prochain, de l’homme avec lui-même. Le chemin d’Adam à Jésus, de la création à la création nouvelle, est ouvert et tracé selon le principe de l’élection. Ce mot qui effraie si souvent est très mal entendu et mal compris.

L’élection au sens biblique signifie non pas une exclusivité irrémédiable mais une mise à l’écart, mise à part pour le sacerdoce de Dieu, sacerdoce royal 347 . L’élection est la voie que choisit Dieu pour parler aux hommes, pour les conduire à la communion en son Règne. Elle rompt ainsi d’emblée avec tous les généralismes, toutes les pensées spéculatives, tous les enfermements de Dieu dans l’idée que l’on s’en fait. Universel et singulier s’y fécondent.

Ainsi, la promesse première faite à Abraham qui associe le lien de filiation à celui de salut pour toutes les nations 348 trouve son accomplissement par l’esprit d’adoption qui soupire en nos coeurs, et qui appelle Dieu abba, papa 349 . Le chemin d’Adam, est celui de notre condition naturelle il allait de la vie à la mort. Le chemin du Christ nous invite à une condition nouvelle, il va de la mort à la vie.

Notes
344.

SAINT-SERNIN Christian “Transformation des structures de parenté et refondation du lien social selon les quatre évangiles”. (4 feuillets). Colloque donné à Garet le 30 - 09 95

345.

Marc V 1 à 11

346.

En prolongement des interprétations étymologiques déjà données en note connexe numéro 13 adjointe au prochain chapitre. Au paragraphe : “la prière, la conversion, la tentation et l’amour.”

347.

I Pierre II 9 “Vous au contraire, vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis afin que vous annonciez les vertus de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière, vous qui autrefois n’étiez pas un peuple, et qui maintenant êtes le peuple de Dieu, vous qui n’aviez pas obtenu miséricorde et qui maintenant avez obtenu

miséricorde.”

348.

Genèse XV 5 et Genèse XXII 15 à 17

349.

Romains VIII 15 “ Et vous n’avez point reçu un esprit de servitude, pour être encore dans la crainte ; mais vous avez reçu un esprit d’adoption, par lequel nous crions abba, Père !