7 ”Une pensée neuve avec des mots de tous les jours”

Maurice CARREZ, à partir du fait que les évangiles s’écrivent dans la Koiné, le grec parlé, trouve cette expression d’”une pensée neuve avec un langage de tous les jours,” et parle de “grammaire de l’esprit “ visitant le quotidien des gestes et le langage. 643 Car le projet biblique n’est pas de laisser l’homme dans l’ignorance, “Je t’instruirai et je te montrerai la voie “ 644 Mais, là réside tout le paradoxe, les voies de Dieu ne sont pas celles des hommes même s’il les épouse les féconde, les traverse, c’est pourquoi aussi la foi est nécessaire.

L’émergence de ce sur-sujet, Dieu lui même, se vidant de lui-même, par le mystère de la kénose, Dieu qui se fait tout don, permet l’émergence de la relation nouvelle “je à tu “, et non plus “Sujet Objet” ni même l’intersubjectivité, avec à sa source, le déplacement de la médiation pédagogique qui aboutit à la nouvelle alliance : le Christ tout à fait homme et tout à fait Dieu, seul et exclusif médiateur dont l’Esprit-Saint rend témoignage aujourd’hui. 645

Le “je” et le “tu” introduisent par leur nature vivante et non objectivable sans une mutilation de leur essence respective, l’histoire et la vie comme fait intégrant du langage. C’est un dialogue amoureux entre des personnes, et c’est l’amour mutuel qui affranchit. Le dilemme évoqué entre martyr et inquisition est résorbé, absorbé, par cette vie nouvelle. Une création nouvelle en émerge, l’homme passera du statut de créature à l’image de Dieu, à celui de fils engendré de Dieu, dans la fraternité du Christ Jésus, par la grâce du chemin accompli par lui en lui.

Il ne s’agit pas tant de créer un nouveau rapport au monde à partir d’une terminologie nouvelle, bien définie comme le ferait une idéologie, ou un philosophe, mais de faire vivre autrement les mots existants, père, fils, esprit, adoption, etc ...

Un mot semble cependant bien typique du Nouveau Testament, la “praütes”, le substantif, ou, “praüs” l’adjectif, que nous traduisons, parfois par humilité, douceur, résignation, nous dit Pierre VAN BREEMEN 646 qui nous suggère alors de nous pencher sur son sens, afin de mieux comprendre le Christ ...

‘En grec classique le mot praütes est un mot caressant. La meilleure traduction est peut-être bien “qui a un coeur paisible.” C’est quelque chose d’extérieur - on peut le remarquer à l’attitude d’une personne - mais la source s’en trouve dans le coeur. 647 (...) Que votre parure ne soit pas extérieure faite de cheveux tressés, de cercles d’or et de toilettes bien ajustées, mais à l’intérieur de votre coeur dans l’incorruptibilité d’une âme douce et calme (praüs) -voilà ce qui est précieux devant Dieu. 648

Pierre VAN BREEMEN poursuit alors :

‘De nombreuses phrases de l’évangile telles que “soyez parfaits comme votre Père du ciel est parfait” exigent l’impossible de notre part. Cette exigence impossible pourrait nous écraser. Mais ce n’est pas le genre de l’évangile. Il exige des choses totalement impossibles. En fait elles sont tellement impossibles que nous devons changer d’attitude; il faut réaliser que nous n’y arriverons jamais, mais que c’est possible avec Dieu. 649

Suivons encore Pierre VAN BREEMEN dans son investigation au travers de deux passages du Nouveau Testament.

‘La personne douée de praütes espère. Elle n’est pas pessimiste. Elle sait qu’il y a un avenir et peut expliquer pourquoi.’ ‘“Sanctifiez dans vos coeurs le Seigneur Christ, toujours prêts à la défense contre quiconque vous demande raison de l’espérance qui est en vous. Mais que ce soit avec douceur et respect, en possession d’une bonne conscience.” (I Pierre III 15 -16 )’ ‘La praütes rend cette réponse d’autant plus efficace.’ ‘“Est-il quelqu’un de sage et d’expérimenté parmi vous ? Qu’il fasse voir par une bonne conduite des actes empreints de douceur et de sagesse ... La sagesse d’en haut est tout d’abord pure, puis pacifique, indulgente, bienveillante;, pleine de pitié et de bons fruits.”’ ‘Jacques III 13 à 17’ ‘La praütes est plus qu’une vertu. C’est le résumé de toutes les vertus du Christ. Elle nous donne l’attitude du Christ. C’est un mot intraduisible, mais nous pouvons pourtant l’exprimer dans notre vie. 650

Nous ne savons pas si un seul mot peut résumer toutes les vertus du Christ ... Nous pourrions sans doute le dire aussi de “agapè (agapê)” ou de “koinônia “ dont nous développons le sens par ailleurs. Ce qui nous paraît intéressant dans la démarche de Pierre VAN BREEMEN qui est celle de tout son livre, est cette entrée en dialogue avec la Parole biblique, qui se donne comme le pain rompu.

Dès le commencement, la parole biblique exprime ce mystère de l’incarnation, et appelle en l’homme un changement invisible du coeur, perceptible cependant, au travers de ses gestes et paroles. La Bible, bien que son texte se présente comme parole de Dieu, ne s’écrit pas dans une langue presque magique, ou intouchable, comme le sanskrit pour les hindouistes brahmanistes, ou encore la langue arabe du Coran pour les musulmans. Cette parole, dont nous avons mentionné les innombrables traductions, se laisse saisir 651 donc, discuter, -le Talmud en est un exemple pour ce qui concerne la Torah-, prier bien sûr, mais vivre surtout, et la vie devient prière, et la prière entre dans la vie, le quotidien des gestes les plus simples, elle visite les comportements, et le monde, elle déclare, exprime et renvoie au mystère de l’incarnation, poussant la porte d’un dialogue entre l’homme et Dieu, Dieu et l’homme.

Ce dialogue en Christ se place sous le signe de l’amour absolu gratuit, et simplement révélé aux enfants. La Parole se fait chair, en Jésus. La personne de Jésus et la révélation biblique deviennent une seule et même référence qui se donnent l’une et l’autre ... à manger. Cette parole, ce dialogue, se font le lieu d’une communion ( “koinônia “) entre parole de Dieu et paroles, mais aussi actions et gestes, des vies d’hommes. La paix promise par le Christ scelle cette communion.

Il reste que ce sentiment inexprimable qui habite le chrétien, la paix d’en haut, est le siège d’une tension. Cette tension, l’angoisse dont parle KIERKEGAARD, se déploie et s’exprime comme une veille dans la nuit du monde 652 : entre le don d’un appel, une promesse à venir, une attente, une espérance. Jésus dit bien être venu apporter l’épée en ce monde, et non la paix. 653 On peut comprendre ces mots comme une parabole, un symbole, auquel chacun, comme pour tout symbole, est invité à apporter sa propre part, aujourd’hui, afin qu’il prenne sens pour lui, pour que finalement le mystère christique prenne chair, devienne corps en lui-même. Car, d’épée véritable, Jésus ne veut pas, lui qui, au moment de son arrestation, ordonne à Pierre de ranger la sienne dans le fourreau 654 .

L’épée, dont Jésus parle, est bien entendu celle à double tranchant du livre de la Genèse, elle s’oppose aux consensus à bas prix, elle est celle de la parole qui démasque, débusque, dépasse les apparences pour aller jusqu’aux coeurs de pierre qui s’ignorent encore, comme tels, et qu’elle veut changer en coeur de chair 655 . C’est donc, dans une tension confiante, car habitée dès aujourd’hui 656 , entre paix et épée, que se déroule et se déploie la vie du disciple ou du chrétien.

Regardons à présent ces mêmes choses d’un point de vue tout extérieur, d’un point de vue qui se voudrait strictement rationnel, comme en dehors de la foi que révèle la Bible.

Ce message agit, comme le signalera, justement, Marcel GAUCHET, en rupture avec le dualisme d’une pensée grecque qui opposait principe d'immanence de la physique, voie d’exploration de la physis, le monde, aux mythes purement irrationnels et fondateurs d’images, tels des voies d’exploration de la psyché, et de l’histoire.

La raison se départait mal, chez les grecs, de la mythologie, de la pensée magique, voire incantatoire jusqu’à SOCRATE lui-même, pour qui pourtant l’ intelligible seul était transcendant, et qui crut, toute ironie éventuellement cachée dans son discours mise à part, en l’oracle de Delphes 657 , et, pour qui, à l’en écouter, lors de son procès rapporté par PLATON, cet oracle, fut source de tout son itinéraire philosophique.

‘Vous savez aussi quel homme c’était que Khairéphon et combien il était ardent dans tout ce qu’il entreprenait. Or, un jour qu’il était allé à Delphes, il osa poser à l’oracle la question que voici - je vous prie encore une fois juges n’allez pas vous récrier- , il demanda, dis-je, s’il y avait au monde un homme plus sage que moi. Or la pythie lui répondit qu’il n’y en avait aucun. Et cette réponse son frère, qui est ici, l’attestera devant vous puisque Khairéphon est mort. (...) Lorsque j’eus appris cette réponse de l’oracle, je me mis à réfléchir en moi-même : “Que veut dire le dieu et quel sens recèlent ses paroles ? Car moi, j’ai conscience de n’être sage ni peu ni prou. Que veut-il donc dire, quand il affirme que je suis le plus sage ? car il ne ment certainement pas; cela ne lui est pas permis” 658

La Bible ne se présente pas comme un recueil mythologique, elle laisse des traces dans l’histoire, raconte des histoires vérifiables, s’emploie à se déployer dans le quotidien, où elle ouvre par la force de son appel et de son témoignage une béance, dira Marcel GAUCHET.

Depuis la loi donnée à Moïse jusqu’aux écrits des prophètes, des évangiles jusqu’aux actes des apôtres, dans les différentes lettres, dans toutes les différentes formes d’écrits, bref, tout l’ensemble du texte biblique, se manifeste comme l’irruption, au coeur de paroles humaines, d’une parole d’un Dieu libre de toute convocation. Parole vivante dans le quotidien de cheminements, et d’histoires.

Dès lors, nous apparaissent au moins quatre conséquences que nous allons analyser en dialogue avec les thèses de GAUCHET, nous démarquant d’elles à chacune de celles-ci.

  1. Le désensorcellement de l’homme, ou le désenchantement du monde ...
  2. La pensée consciente de sa blessure de son incomplétude ...
  3. L’espérance dans la mémoire, la mémoire de l’espérance ...
  4. L’événement fondateur de la rencontre où le premier pas est toujours celui du Dieu
  5. La possibilité du regard objectif désensorcelé, démythifié, aux antipodes de la pensée magique. Cet aspect des choses est constaté, par des voix hors christianisme, selon la voie spéculative, entre autre, qu’entrouvre Marcel GAUCHET.
‘Non pas que la pensée grecque ait été elle même exempte de tensions internes bien au contraire. Mais ces tensions travaillent à l’intérieur d’une inébranlable reconduction du cadre de l’Un. Lorsqu’est affirmée par exemple la “transcendance “ radicale de l’intelligible par rapport au sensible, la sphère de l’intelligible pur, n’en reste pas moins comprise à l’intérieur du même englobant que la sphère sensible, qui n’a de consistance au demeurant que comme son reflet dégradé, de sorte qu’on peut remonter de l’une à l’autre comme de l’inférieur au supérieur. Cette “ transcendance “ là n’a rien à voir avec la transcendance virtuellement contenue dans l’idée du dieu chrétien, avec l’expulsion de l’âme du monde, hors du monde qu’elle porte en ligne de fuite -même si elle lui a prêté pendant de longs siècles son langage en refrénant ses potentialités de partage. Soit dit au passage, cette différence nous paraît la clé des limites du naturalisme grec au regard de la science moderne, avec laquelle en revanche la vision chrétienne s’avère en proximité matricielle. Il fallait le développement de la transcendance du dieu chrétien pour que devienne concevable un monde purement matériel et parfaitement isomorphe, dégagé de toute animation spirituelle comme de toute prégnance de correspondance et de dépendance des parties envers le tout, envers le principe supérieur qui, du sommet du monde, coordonne et justifie les éléments du monde. 659

Si nous rejoignons sur ce point son analyse, GAUCHET en reste cependant à un rationalisme ouvert dans lequel il voit l’avènement d’un futur religieux 660 . Il ne semble pas insister sur le fait que c’est la foi et non la spéculation qui fonde le christianisme, à moins que ce ne soit la spéculation de la foi, mais c’est toujours la foi, qui dans la perspective chrétienne est fondatrice. GAUCHET ne souligne donc pas suffisamment non plus l’émergence conséquente à partir de l’irruption de la foi, comme centre d’explication des choses et du monde, d’une rationalité mesurée, démythifiée, désensorcelée de l’attraction pour l’homme de sa propre psyché, que l’attraction pour un rationalisme spéculatif, tel qu’il nous vient des grecs et qu’il tend à s’imposer de nos jours, paradoxalement semble favoriser. Un récent sondage commandé par l’hebdomadaire chrétien ” La Vie” nous donne quelques indices de confirmation. Nous en donnons un résultat, parmi les autres, pour illustrer l’ensemble du sondage. Il faut l’entendre dans un cadre où la foi chrétienne est plus forte chez les plus âgés, et décroît au fur et à mesure avec l’âge. Les superstitions : croyances aux signes astrologiques, aux envoûtements à la sorcellerie, aux tables tournantes, aux prédictions des voyantes, à l’explication des caractères par les signes astrologiques, la transmission de pensée, que dénonce tout le message biblique, suivent le chemin exactement inverse : 45 % des plus de 65 ans croient par exemple que Jésus est Fils de Dieu 28 % des jeunes entre 18 à 24 ans. À l’inverse, ces plus jeunes sont 26 % à croire aux envoûtements et à la sorcellerie contre 11 % chez les plus âgés. On ne peut tirer trop d’explications d’un tel sondage, il faudrait affiner les données pour qu’il soit plus explicite, mais il semble, bien que tout à fait indirectement, confirmer le fait que la Bible contribuerait plus à la démythologisation que la rationalité moderne n’y contribue. Car de principes rationnels, les jeunes n’ont pas manqué tout au long de leur scolarité. Le sociologue Julien POTEL conclut d’ailleurs l’analyse du sondage ainsi.

‘Il me paraît certains que dans 40 ou 50 ans, les jeunes ne ressembleront pas aux personnes âgées d’aujourd’hui. Bien sûr on ne peut rien prévoir avec certitude, puisque des événements majeurs comme une nouvelle guerre, dont on a vu l’importance sur les croyances, sont imprévisibles. Reste qu’il existe un univers entre les jeunes et les personnes âgées aujourd’hui. Et cet univers, c’est la modernité. 661
  1. La finitude, incomplétude du regard objectif, car la finitude humaine qui s’inscrit dans le langage lui-même, dans la parole, va comme de soi.

Dès lors, GAUCHET montre encore, comment un double déplacement d’axe se produit, à partir du simple postulat d’un Dieu créateur. Changement sur l’axe de l’immanence, où tout désormais se joue dans présent, changement sur l’axe de la transcendance, puisque désormais la présence de Dieu se mesure dans l’existence aujourd’hui. Favorisant ainsi le développement des sciences.

‘L’idée de création, ainsi rompt autant, en dernier ressort, avec l’organisation de la pensée selon l’origine que la physique des ioniens et son exigence d’explication immanente. L’une des ruptures a beau se jouer dans le registre de croire, et l’autre dans le registre du concevoir, elles ne passent pas moins par des déplacements et des refontes logiquement homologues de l’économie de la représentation antérieurement prévalante. C’est semblablement qu’elles retournent la double articulation instituante du passé (mythique) et de la multiplicité présente des forces invisibles (magiques) - avec ce qu’elle implique quant à la classification des êtres et des choses du monde, quant au contenu des origines énonçables, et quant à la manière de les réciter. Toutes deux inversent pareillement l’axe temporel : c’est le présent qui rend raison du passé ( puisque l’ordre du monde a toujours été ce que nous voyons qu’il est, ou puisque le monde est suspendu à la volonté d’un dieu tout puissant ...) 662

Ce qui est fort bien mesuré par GAUCHET d’un point de vue extrinsèque au christianisme, voire au monothéisme, ne parvient pas cependant à sortir du paradigme de la science qui pose la cohérence, ou la quête de cohérence, ou la perception de ce qui nous semble cohérent, avant la conscience de l’abandon vital, existentiel, de la foi.

‘(...) l’émergence de la pensée rationnelle et le développement de la foi monothéiste sont à comprendre comme deux expressions ou deux moments, par des voies aussi différentes que possible, d’un même procès, néanmoins de transformation de l’univers magique-mythique.” 663

L’idée même d’un Dieu unique créateur, en effet, semble bien être, comme le soulignent, entre d’autres, des auteurs comme Jean BOTTÉRO, historien, ou Joseph NEEDHAM, spécialiste de la Chine, à l’origine des sciences modernes et de leur développement.

‘L’une des plus anciennes notions de la civilisation occidentale est , sans doute, celle qui dit que de même que les législateurs impériaux terrestres ont constitué des codes de lois positives pour que les hommes leur obéissent, de même une Divinité créatrice céleste suprême et rationnelle, a donné une série de lois auxquelles doivent se soumettre les minéraux, les cristaux, les plantes, les animaux et les astres dans leur cours. ’ ‘Il y a peu de doute que cette idée s’est trouvée intimement liée au développement de la science moderne, tel qu’il s’est opéré à la renaissance en occident. Si cette idée a été absente autre part, ne serait-ce pas l’une des raisons pour lesquelles la science moderne n’est apparue qu’en Europe ? (...) ’ ‘La conception chinoise du monde se trouvait liée à une toute autre direction. La coopération harmonieuse de tous les êtres provenait non pas des ordres d’une autorité supérieure ( qui serait extérieure à ces êtres), mais du fait que ces êtres faisaient tous partie d’une hiérarchie d’ensembles formant un modèle cosmique et organique et n’obéissant qu’aux ordres (intérieurs) de leurs propres natures.” 664

Cependant il reste que la grande originalité biblique ne tient pas dans le seul fait du Dieu créateur repris par exemple par l’Islam. L’historien chrétien André CHAUNU soulignera alors la différence entre la voie judéo-chrétienne et celle de l’Islam.

‘Certes l’Islam, comme le judaïsme et le christianisme, rejette tout aussi farouchement, autant que le judaïsme et plus que le christianisme catholique et orthodoxe, la possible diffusion du sacré. Comme le judéo-christianisme (en dépit des déviances de la religiosité populaire ) il appelle à la concentration de tout le sacré au point d’émergence de l’Unique transcendant. Mais le Coran touche à tous les aspects, matériels, techniques, socio-économiques de la vie. C’est la raison pour laquelle l’Islam ignore la distinction des deux Royaumes. Ses théologiens sont des juristes qui tranchent de tout pour l’Umma, la communauté des croyants.” 665

Ce Dieu apparaît donc en plus, dès le judaïsme, comme celui du Dieu du dialogue avec l’homme. Songeons, entre de multiples autres exemples possibles, dès l’Ancien Testament, à l’intercession d’Abraham pour Sodome 666 . Dans le christianisme, il se révèle même sous la figure de l’époux, en la personne du Christ.

Dès lors, s’ouvre un espace à côté du pouvoir temporel, de la société civile, une dimension autre, ce qu’il est convenu d’appeler l’autre Royaume, nous y reviendrons. Mais nous pouvons déjà dire que cet autre Royaume, ne tient pas à la visibilité des pouvoirs de l’homme mais au signe de communion en Christ, au don gratuit, l’église, dimension communautaire et personnelle.

Nous voyons émerger donc, de cette parole, non pas vraiment, ou seulement, une écriture, un discours sur la parole, une théologie, une école d’explication du monde, à la manière de la scolastique, mais en premier lieu, comme une réalité émergeant du monde, réalité nouvelle visiblement, concrètement, accueillie, dans ce qu’il est convenu d’appeler l’église 667 .

  1. La mémoire La mémoire au sens biblique n’est pas à confondre avec la réminiscence socratique dont le dialogue du Ménon rapporté par PLATON fournit, entre d’autres, un exemple fort. La réminiscence supposerait la transmigration d’âmes immortelles. Rien de tout cela dans le texte biblique.La mémoire d’Israël est incarnée et collective. Elle est un lieu privilégié de l’enseignement de l’Éternel. L’ une des erreurs théologiques du New Âge à partir du point de vue chrétien, à la suite des gnoses anciennes, consiste à relire le texte biblique comme une Parole en réminiscence, nous parlant de notre histoire personnelle passée dans des vies antérieures dans laquelle chacun peut trouver l’écho des “mythes bibliques” et niant finalement le mystère de l’incarnation d’une Parole dans l’histoire concrète des hommes qui est le fait singulier de la Parole Biblique. au centre, l’espérance en horizon, la parole et la promesse comme lumière et chemin, comme acte, ou action non comme théorie, tout se joue dans l’aujourd’hui.

La pensée structuraliste, les “systémismes “ dominants de la pensée de la seconde moitié de ce siècle, sont en réalité une tentative de réponse et de prise en compte de cette double tension entre diachronie et synchronie, histoire et immanence, les deux pôles entre lesquels la pensée rationnelle ou irrationnelle, la pensée tout court, bute sans cesse.

Roland BARTHÈS localise cette tension entre poésie et idéologie, objet et concept, tension irréductible pense-t-il, en tout cas, dit-il, dans sa vision “marxisante”, au stade où nous nous trouvons de notre histoire et de notre développement 669 .

Il restitue ainsi toute la problématique épistémologique de la seconde moitié de ce siècle qui, comme le soulignera BACHELARD, se nourrit de ce dualisme, selon lui bénéfique et nécessaire, entre pensée rationnelle et concept d’une part, et pensée imaginaire et symbole, d’autre part. Cette dualité préfigure, à l’insu de BACHELARD, la confusion contemporaine entre la dimension psychique des croyances humaines et la dimension pneumatique de la foi chrétienne. Lorsque Michel FOUCAULT analysera cette nouvelle relation au langage, ouverte par la prise de conscience de la finitude, à partir entre autre des analyses littéraires de Maurice BLANCHOT, il dira combien ce fragile équilibre a quelque chose de pathétique et de cruel à la fois, et, pourtant, d’après lui, d’essentiel, il écrira :

‘Quand le langage se définissait comme le lieu de la vérité et lien du temps, il était pour lui absolument périlleux qu’Épiménide le Crétois ait affirmé que tous les Crétois étaient menteurs : le lien de ce discours à lui-même le dénouait de toute vérité possible. Mais si le langage se dévoile comme transparence réciproque de l’origine et de la mort, il n’est pas une existence qui, dans la seule affirmation du Je parle, ne reçoive la promesse menaçante de sa propre disparition, de sa future apparition. 670

Comment ne pas être de nouveau frappé, lors de ce détour pratiquement contemporain dans l’histoire de la pensée, par une prise de conscience de l’initiale finitude, mais sans référence explicite à l’initial péché, autrement dit, sans référence à la conscience de la séparation entre Dieu et l’homme, mais surtout refoulant ou rejetant la possibilité d’une responsabilité humaine dans l’occasion de cette distance, et de plus, rejetant toute initiative de Dieu pour la rompre, telle que la révèle la Bible, et, qui déjà, nous l’avons noté, expliquait la fascination de HEIDEGGER pour la poésie de HÖLDERLIN ?

Dans un dernier sursaut, l’artiste, le savant, le penseur, contemporains, refusent, le plus souvent, du fond de l’abîme, toute référence, tout recours explitement exprimés en tout cas, à la grâce divine, au don de Dieu pour l’homme en Christ, au Verbe fait chair.

Toute résorption, par une transfiguration de l’Amour, de tous les antagonismes apparaît dès lors comme fortuite, aléatoire, ou interdite. Ce refus n’aboutit-il, pas dès lors, à la sacralisation de la séparation entre Dieu et l’homme ? Ce refus n’exprime-t-il pas, en tout cas, une perversion du message biblique fondateur, en situant Dieu comme virtuel et à l’image de l’homme ? Dans la Bible tout s’agence à partir de l’exacte proposition contraire : l’homme à l’image Dieu. Dans cette parole, à partir de l’initiative divine première, tout se joue de l’éternité, à chaque instant. Le message biblique exprime ainsi une unité du langage et de l’action. Le verbe de Dieu prend chair, la mémoire d’Israël, la mémoire de chaque histoire, devient son centre, son espérance, son horizon.

  1. L’événement fondateur de la rencontre où le premier pas est celui de Dieu

D’un côté, extra-muros de la foi, de la foi consciente en tout cas, la dualité janussienne est entre sensible et intelligible, inscrite au coeur de l’homme aujourd’hui ; de l’autre, celui de la foi chrétienne, la rupture se déplace entre Dieu et l’homme et signifie la condition pécheresse, mais l’homme est réunifié par la foi (confiance) , rappelons ce que Paul en dit :

‘Or la foi est une ferme assurance des choses qu’on espère, une démonstration de celles qu’on ne voit pas.” 671 ’ ‘Saint Jacques ajoutera : Mes frères, que sert-il à quelqu’un de dire qu’il a la foi, s’il n’a pas les oeuvres ? La foi peut-elle sauver ? Si un frère ou une soeur sont nus et manquent de la nourriture de chaque jour , et que l’un d’entre vous leur dise : “Allez en paix, chauffez-vous et vous rassasiez ! et que vous ne leur donniez pas ce qui est nécessaire au corps, à quoi cela sert-il ? Il en est ainsi de la foi ; si elle n’a pas les oeuvres, elle est morte en elle-même. Montre moi ta foi sans les oeuvres et moi, je te montrerai la foi par mes oeuvres. Tu crois qu’il y a un seul Dieu, tu fais bien; les démons le croient aussi et ils tremblent.” 672

La foi révélée accomplie en Christ est incarnation, elle est engagement, oeuvre, création. Et, comme le souligne Jacques, elle se manifeste par des fruits, des oeuvres, elle est organique, vivante, un grain de sénevé de foi, dira Jésus, la plus petite des semences, produit un grand arbre sur lequel les oiseaux du ciel peuvent nicher. 673 Reprenant l’image du grain de sénevé, Jésus explique encore qu’un seul grain de foi - il ne dit pas une énorme foi - suffit à commander aux montagnes - il ne minimise pas ces montagnes, comme le ferait la méthode Coué, il ne dit pas ces montagnes ne sont que des souris, il dit bien des montagnes et les reconnaît comme telles . 674 Sur le chemin d’ Emmaüs, Jésus réapparaît après sa mort à deux de ses disciples, dont, l’un d’entre eux, nous dit le texte s’appelait Cléopas. Ces hommes ne le reconnaissent pas. “Leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître”, ils parlent et racontent à Jésus, ce qui est arrivé à Jérusalem, et ils évoquent le procès tronqué, les principaux sacrificateurs, magistrats, la croix, le tombeau vide des anges qui sont apparus aux femmes et ont annoncé qu’il était vivant. Mais les disciples en sont restés à ce vide.

‘Quelques uns de ceux qui étaient avec nous sont allés au sépulcre, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit : mais lui, ils ne l’ont point vu. Alors Jésus leur dit : O hommes sans intelligence, et dont le coeur est lent à croire tout ce qu’on dit les prophètes! Ne fallait-il pas que le Christ souffrit ces choses et qu’il entrât dans sa gloire ? Et commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Écritures ce qui le concernait. Lorsqu’ils furent près du village où ils allaient, il parut vouloir aller plus loin. Mais ils le pressèrent en disant : Reste avec nous, car le soir approche, le jour est sur son déclin. Et il entra pour rester avec eux. Pendant qu’il était à table avec eux, il prit du pain; et après avoir rendu grâces, il le rompit, et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent; mais il disparut de devant eux. Et ils se dirent l’un à l’autre : Notre coeur ne brûlait-il pas au-dedans de nous, lorsqu’il nous parlait en chemin et nous expliquait les écritures ? 675

Le cheminement de ces disciples, que nous choisissons ici, pour illustrer et approfondir notre réflexion, nous semble évocateur de ce que nous voulons dire. Ils ne sont pas dans une spéculation intellectuelle, à la manière de la pensée contemporaine. Ils ne sont pas entrain de spéculer sur l’idée du dieu unique et ses conséquences, spéculation chère à GAUCHET, ni même sur le mystère de l’incarnation, comme cet écrit à orientation universitaire, cherche à le faire, ils marchent tout simplement sur un chemin et, chemin faisant, ils se demandent simplement, si Jésus est vraiment vivant, si ce que disent les femmes à son sujet, s’est vraiment réalisé.

Et, à vrai dire, ils ne croient guère que Jésus soit vivant. Ils en sont restés à sa mort, un peu comme, FEUERBACH, NIETZSCHE, FOUCAULT, ou tant d’autres, qui parlent de la mort de Dieu ... comme une grande partie de la pensée contemporaine qui implicitement ou explicitement semble se réclamer de cette mort. À leur différence, peut-être, les disciples ne jugent pas cette mort nécessaire, ils en sont tristes, tout simplement. Celui qu’aujourd’hui beaucoup reconnaissent comme le Fils de Dieu, ce Jésus, ils l’ont connu, ils l’ont côtoyé, ils ont perdu, et plus qu’un ami, quelqu’un qu’ils avaient suivi, pour qui ils avaient probablement tout laissé et dont ils attendaient qu’il délivre Israël du joug Romain. 676

Lorsque Jésus, rappelons qu’ils ne le reconnaissent tout d’abord pas, les aborde, et fait route avec eux, celui-ci semble d’ailleurs surtout porter attention à cette tristesse.

‘De quoi vous entretenez-vous en marchant que vous soyez si tristes ? 677

Ce qui est pris en compte ici par le Christ, ne sont pas les idées de ces hommes sur dieu, ni la spéculation intellectuelle qui n’est qu’un jeu de l’esprit, on peut, sur ce terrain, changer aisément de paradigme, sans risquer la vie et la mort, apparemment en tout cas. Ce qui est pris en compte, est une question essentielle, où se joue la vie et la mort, c’est l’intensité indicible du sentiment de l’absence, dont justement parlent tant les théoriciens que nous venons de citer, mais ce qui est plus encore pris en compte, c’est le coeur du coeur de cette absence, le sentiment de la tristesse.

Jésus fait route avec ses disciples, comme le dit ce cantique récent, chanté dans bien des églises aujourd’hui.

‘Écoute, écoute, surtout ne fais pas de bruit, ’ ‘ On marche sur ta route, on marche dans la nuit, ’ ‘Écoute, écoute, les pas du Seigneur vers toi, ’ ‘ Il marche sur ta route, il marche près de toi. 678

Ce cantique marque le passage du “on” au “il” qui fut celui que suivirent les disciples, comme interdits de reconnaître, tout au long du chemin, celui qui ne resta dans un premier temps, pour eux, qu’un étranger, un voyageur ...

Jésus va alors leur expliquer qu’il était nécessaire que tout cela arrive, à partir des textes des prophètes et de la loi de Moïse. Mais il ne leur explique pas cette nécessité à la manière des auteurs que nous citons en amont : ce n’est pas l’homme qui fabrique Dieu à son image, mais Dieu qui a fait l‘homme à son image, et qui est descendu jusqu’à lui, pour venir l’appeler fils, tel est le sens des écritures que commente Jésus, et qu’il est venu lui-même accomplir par la souffrance, par le don de sa propre vie.

Cependant les disciples ne reconnaîtront pas encore Jésus, ils ne le reconnaîtront que lorsqu’il rompra le pain. Peut-on voir un signe plus fort, du fait que le mystère chrétien signifie désormais que l’homme n’est plus livré à lui-même, mais accompagné, par Dieu qui se fait homme ... et nourriture qu’on partage ?

Alors seulement le Christ disparut à leurs yeux, comme un rappel du récit de la transfiguration où Jésus disparaît lorsque Pierre voulut dresser les trois tentes, une pour Moïse, une pour Élie, une pour Jésus.

Oui, le chrétien est renvoyé à une absence, mais il ne s’agit plus de la même absence, il a pu être accompagné, nourri par Dieu lui même, et maintenant il est appelé comme les deux disciples de notre récit qui retrouvent les onze à Jérusalem à témoigner de ce passage de la mort à la vie, de cette victoire sur la mort 679 .

Leur aventure ne les a pas laissés seuls, et les voici intégrant la première église, ou plutôt communauté, où ils découvriront que ce Jésus qui leur est réapparu est aussi réapparu à Simon, avant de réapparaître encore aux onze. Même, en effet, si ce texte du chemin d‘Emmaüs précède la Pentecôte, on peut dire qu’il annonce l’église. Et cette rencontre nocturne insolite, surnaturelle, au lieu de les éloigner de la vie, et de les conduire dans un probable délire schizophrénique, pousse les disciples, vers d’autres, les onze, qui ô surprise (miracle), par une autre voie ont vécu, ou vont vivre, le même témoignage : “alors, celui que l’on croyait mort est vivant.” Revenons au texte :

‘Se levant à l’heure même, ils retournèrent à Jérusalem et ils trouvèrent les onze et ceux qui étaient avec eux, assemblés et disant : Le Seigneur est réellement ressuscité, et il est apparu à Simon.” Et ils racontèrent ce qui leur était arrivé en chemin, et comment ils l’avaient reconnu au moment où il avait rompu le pain. Tandis qu’ils parlaient de la sorte, lui-même se présenta au milieu d’eux et leur dit la paix soit avec vous.” 680

Résumons la suite du texte qui conclut l’évangile de Luc.

Suivra la frayeur des disciples, qui est grande devant cette nouvelle apparition, mais Jésus les rassure et leur demande de le toucher, il n’est pas un esprit. Jésus mangera avec eux, alors seulement, ils seront dans la joie et il ouvrira leur esprit afin, nous dit le texte, qu’ils comprennent les écritures. Le pardon des péchés sera annoncé en son nom à toutes les nations à commencer par Jérusalem. Du singulier d’une expérience hors du commun surnaturelle voici que les disciples sont renvoyés à l’universalité, au monde, à la bonne nouvelle de son salut, au passage de la mort à la vie.

Puis, Jésus les conduira à Béthanie où il sera élevé au ciel, après les avoir bénis et leur avoir recommandé de rester dans la ville, et d’attendre l’envoi du Saint-Esprit que son Père a promis, “la puissance qui vient d’en haut”. Eux l’adorèrent et restaient dans le temple, louant et bénissant Dieu.

Les deux disciples ne rejoignent donc pas la communauté des onze à partir d’un nouveau décret théologique, d’une déclaration de foi, dûment reconnue et contresignée par tous, mais à partir d’une expérience vécue, d’une rencontre avec celui qui est passé de la mort à la vie, et ouvre le chemin désormais pour chacun, sans acception de quiconque.

Ils apprendront, peu à peu, pas à pas, progressivement, sans violence, au rythme de leurs intelligences, à reconnaître en cet homme rencontré en chemin, tout à la fois leur sauveur personnel, mais aussi le sauveur, non pas seulement d’Israël, mais du monde.

Il nous semble tenir là quelques indices de ce que nous pourrions nommer une autre grammaire.

8 La “grammaire” ou la vie ?

Le texte, que cette grammaire -encore que ce mot soit sans doute impropre-, visite, ordonne, justifie, n’est justement pas un texte , pas une représentation du monde, mais le quotidien des gestes, et le coeur du coeur des sentiments, la vie elle-même. Le chant de Frère Pierre Yves de Taizé nous exprime dans un soupir cette inflexion nouvelle du langage où la mémoire (mémoire du pain rompu) est à présent un centre, l’espérance (d’un retour), un horizon ....

‘Reste avec nous
Seigneur Jésus
Toi le convive
D’ Emmaüs
Au long des veilles
De la nuit
Ressuscité
Tu nous conduis
Prenant le pain
Tu l’as rompu
Alors nos yeux
T’ont reconnu
Flambée furtive
Où notre coeur
A pressenti
Le vrai bonheur
Le temps est court,
Nos jours s’en vont
Mais tu prépares
La maison
Tu donnes un sens
À nos désirs
À nos labeurs
Un avenir
Étoile du
dernier matin
Toi le premier
Des pèlerins
Réveille en nous
Par ton Amour
L’immense espoir
De ton retour. 681

Irruption du Royaume tout autre dans le monde, flambée furtive, mais bien réelle, reconnaissance vraiment partagée, communiée, vraiment reconstituante, vraiment nourriture, mystère de l’incarnation du verbe. L’homme n’a plus à faire tout le chemin qui le séparait de Dieu, puisque c’est Dieu lui-même qui s’offre gratuitement en chemin, en nourriture, en partage.

La grammaire ou la vie ? Telle pourrait en être la question première et ultime. Le témoin, le disciple, répond toujours à chaque instant : la vie, la vie, la vie qui se donne dans le pain rompu ...

Notes
643.

Les langues de la Bible. Du papyrus aux bibles imprimées “ CARREZ Maurice Le Centurion Paris 1983 ; ( page 92)

“Le fait que le grec appelé jusque là biblique, n’est en fait que la langue parlée par tous crée pour le lecteur du Nouveau Testament grec une surprise. La théologie, la christologie, la pensée ne sont pas exprimées par des mots rares, mais par un langage ordinaire que chacun peut comprendre. (...) L’esprit chrétien fera de l’humilité dans le service une attitude importante de la foi qui a pour Seigneur le Serviteur souffrant qui n’a pas hésité à s’humilier venant sur terre comme un simple homme. C’est ici que la grammaire de l’esprit intervient aussi dans la vie des mots, dans leurs agencements; dans leur syntaxe.”

644.

Psaume 32 verset 8

645.

Développé au chapitre trois dans les conséquences pédagogiques.

646.

VAN BREEMEN Pierre “Comme le pain rompu” Fayard Paris 1978 ; ( des pages 135 à 143).

647.

Ibidem page 136

648.

I Pierre III 3 à 4 Cité par ibidem à la page 136

649.

Ibidem page 140

650.

Ibidem page 142 143 ... les mots praütes ou praytes (douceur) ou praüs (doux ) se trouvent dans tous les passages cités par Pierre VAN BREEMEN

651.

Remarquons encore que ceci n’est pas seulement une conséquence du texte biblique, mais un fait du texte lui-même, qui se donne à lire dans une histoire incarnée, écrite dans son ensemble par des mains d’homme qui sont nommés.

652.

Matthieu XXIV 44

653.

Matthieu X 34”Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre, je ne suis pas venu apporter la paix, mais

l’épée.”

654.

Jean XVIII 10 “Simon Pierre qui avait une épée, la tira, frappa le serviteur, du souverain sacrificateur, et lui coupa l’oreille droite. Ce serviteur s’appelait Malchus. Jésus dit à Pierre : “Remets ton épée dans le fourreau. Ne boirai-je pas la coupe que le Père m’a donné ?”

655.

Ézéchiel XI 19 “Je leur donnerai un même coeur, et je mettrai en vous, un esprit nouveau; j’ôterai leurs coeurs de pierre, et je leur donnerai un coeur de chair, afin qu’ils suivent mes ordonnances, et qu’ils observent et pratiquent mes lois; et ils seront mon peuple, et je serai leur Dieu. (Voir aussi Ézéchiel XXXVI 26 à 28) . Ce texte prophétique de l’Ancien Testament s’éclaire encore de cette parole de saint Paul “Jésus est la fin de la loi.” Romains X 4

656.

Matthieu XXVIII 20 “ Voici je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ” op. cit.

657.

La pythie, prêtresse d’ Apollon à Delphes, entrait en transe et proférait des paroles incohérentes, qui exprimaient les oracles du dieu. Les prêtres interprétaient alors employant des tournures d’ une ambiguïté proverbiale. SOCRATE fut proclamé par l’oracle de Delphes comme le plus sage des hommes, à Khairéphon son ami d’enfance, et il voulut s’assurer que cela était vrai. À partir de la proclamation de l’oracle, voir note suivante, il alla trouver des hommes à forte réputation de sagesse qu’il ne trouva point sages ... Ainsi commence sa quête philosophique.

658.

PLATON “L’apologie de SOCRATE” (20 et 21 )traduit par Émile CHAMBRY Flammarion Paris 1987 ; ( p 31).

659.

GAUCHET Marcel. “Le désenchantement du monde” Editions Gallimard Paris 1985 ; (à la page 204).

Les grecs la religion de la raison “ au chapitre “puissance du sujet divin”

660.

Marcel GAUCHET qui voit dans l’émergence depuis deux siècles de l’état séparé, une résolution au problème de la foi, (page 286) imagine trois voies possibles pour le nouveau religieux de l’après ce qu’il appelle la mort de Dieu. La voix du partage communautaire, la voie de l’esthétique, la voie enfin qu’ouvre la psychanalyse. Ibidem page 290 à 304.

661.

“La Vie “ n° 2541 d u 12 Mai 1994 Dossier “Les croyances des français” Un grand sondage C.S.A en collaboration avec le Monde ; (des pages 19 à 31). Julien POTEL est interrogé par Paul DE BREM auteur de l’article ; (à la page 26 ).

662.

GAUCHET Marcel. op. cit. 1985 ; (à la page 205).

663.

Ibidem page 204 ...

664.

NEEDHAM Joseph “ La science chinoise et l’occident.”Allen § Unwin LTD 1969; Seuil Paris ; 1973 ; (p 28 et 37).

665.

CHAUNU Pierre “”Histoire et foi ‘ “Deux mille ans de plaidoyer pour la foi” France - Empire Paris 1980 ; (à la p 30).

666.

Dans le livre de la Genèse au chapitre 18 versets 22 à 32 :

667.

Nous proposons ici comme, en opposition, et pour illustrer notre propos, la définition que donne Paul TILLICH de la scolastique et la définition réformée de l’église, d’après BARTH, dont la position est résumée par Antoinette BUTTE. D’un côté une école pour enseigner le monde, la scolastique, mais ce n’est pas l’église, de l’autre côté des personnes rassemblées, mystère de l’incarnation, et c’est cela que produit la Bible, et c’est l’église corps vivant du Christ dans le monde.

La scolastique est l’attitude intellectuelle fondamentale du Moyen-Âge tout entier. C’est une méthode d’explication de la doctrine chrétienne. Ce mot vient d’école et signifie philosophie d’école.(...) A la fin du Moyen-Âge, la scolastique a été détournée de sa ligne authentique ; mais, à l’origine, elle avait été conçue pour expliquer théologiquement tous les problèmes de la vie. Nous possédons une littérature scolastique extrêmement riche, qui a exercé une influence considérable sur la vie spirituelle du Moyen-Âge. Une seule limitation à ce principe : l’éducation scolastique était réservée à une élite. Tous les ouvrages scolastiques étaient écrits en latin. Le peuple, certes , ne lisait ni n’écrivait aucune langue”

TILLICH Paul” Histoire de la pensée chrétienne “ Payot Paris 1970 ; (325 pages) à la page 158.

Pour la réforme la bible est donc Incarnation. Et lorsque Karl BARTH dit : ‘l’Église est là où est la Parole” il ne dit point “là où est tel code, telle théologie “

BUTTE Antoinette “L’incarnation La Sainte Cène l’Église” Librairie Fischbacher Paris Lausanne 1936 ; page 141.

Il semble bien que la Bible agisse cependant comme intra-muros, au travers des églises visibles et invisibles, comme extra-muros, et c’est toute l’analyse de Marcel GAUCHET qui se valide ou se conteste, en tout cas se place. Une sorte de métaphysique universelle, semble émerger du christianisme, sans que cette métaphysique impose à quiconque, la foi chrétienne.

D’une certaine façon, une voie positive, une voie négative de l’incarnation, de la foi et de l’obéissance, posées non plus en termes de concepts, tels les gnostiques, telles des signes déjà, peut-être, d’une conscience des deux royaumes, se trouvent transposées en chair, au coeur de l’existence singulière de chacun, des évènements qui la composent, au coeur de la conscience de l’homme, des choix vitaux et décisifs de son existence ...

669.

BARTHÈS Roland “Mythologies “ Seuil Paris 1957 ;(page 246 de l’ouvrage) ; note connexe numéro 20 adjointe au prochain chapitre : “Une autre grammaire . . .” (op. cit.) ; (page 274 des connexes).

670.

FOUCAULT Michel “La pensée du dehors” fata morgana Paris 1986 ; ( 61 pages).page 61.

671.

Epître de Saint PAUL aux Hébreux chapitre 11 verset 1 op. cit.

672.

Epître de Saint JACQUES chapitre 2 versets 14 à 19

673.

Matthieu XIII 31 ; Marc IV 31 ; Luc XVII 9

674.

Matthieu XVII 20 ; Luc XVII 6

675.

Luc XI V 24 à 32 ; à partir du verset 13 pour l’ensemble du récit.

676.

Ibidem verset 21

677.

Ibidem verset 17

678.

Paroles Michel WACKENHEIM, musique Claude ROZIER Fleurus .... Recueil de cantiques “Les cahiers de Réveil” Église réformée de France Centre Alpes Rhône numéro 566 ;1976 (Tournon ) C'est nous qui soulignons.

679.

Luc XXIV 33 34

680.

Luc XIV 33 à 36

681.

“Petite liturgie quotidienne” communauté de Pomeyrol Liebfrauenberg, Maison de l’Église Centre de rencontres 67 360 ; page 172. Sur une musique de Bach.