Paradoxalement donc, tout matérialisme irréductible serait plus religieux, au sens classique du mot, “relié à une transcendance par une croyance”, que ne l’est le texte biblique lui-même.
La foi délivre de la croyance, fut-elle celle du rationalisme, ou plus subtile encore, celle de la voie spéculative, la foi est abandon absolu, au mystère de Dieu qui se fait homme.
Presque par définition, la prise en compte de la foi est toujours d’abord personnelle, même si toujours sa vocation est publique et communautaire.
Ce langage, cette parole, cette pensée, cette action,“sous le signe de la foi ”, nous l’avons souligné, se démarque alors du doute méthodologique auquel paradoxalement il permettrait cependant d’exister comme une simple contingence.
En dépit des contraintes historiques et des pressions des pouvoirs, des usages et coutumes du temps, radicalement contraires à l’émergence et à la nature même de la foi évangélique, mais qui obligeaient, sous peine de persécussions, chacun à se dire chrétien, nous comprenons ainsi un peu mieux pourquoi nous pouvons porter un certain crédit au fait que DESCARTES se disait chrétien.
Ce langage, cette parole, cette pensée, cette action, “sous le signe de la foi” , repose sur une certitude, et une adhésion toujours propre et personnelle, qui lui permet d’inscrire le doute ou, en tout cas, l’espace de la controverse et de la contradiction, de la rupture, au coeur même de son langage, de sa quête, de son épanouissement, par les espaces de dialogue qu’il ouvre et permet.
Ce langage du coeur, blessé et circoncis, ouvre un passage des discours à la parole, à la communion de parole avec le verbe qui se fait chair.
Si le doute méthodologique masquait sa certitude, le fondement du postulat sur lequel il reposait, pour construire, à partir de là, son système clos, la foi exprime son fondement, sa conviction et permet ainsi au doute de surgir, à la finitude de devenir partie intégrante de la parole qu’elle inspire.
Car la foi passe par l’expérience de la croix. Sainte Thérèse ( 1515 -1582 ) l’exprime dans un quatrain que nous tirons d’un de ses poèmes “La cruz (la croix) “.
‘En la cruz està la vidaÀ ce poème, un autre répond, exprimant le sens de la croix où Jésus est mort pour la vie, par la vie, et où Jésus est vivant par sa mort.
‘Vivo sin vivir en miIci, pour Sainte Thérèse, le doute n’est plus permis. C’est sous la croix que naît la foi.
C’est à partir de la croix que tous les doutes pourront s’exprimer comme autant de convictions.
TÉRÉSA de Jésùs (santa) “Poesias y exclamaciones” Édiciones 29 Madrid Barcelona ; 1984 ( page 29 )
“La cruz “ “La croix” “ Dans la croix se trouve la vie - Et la consolation- Elle seule est chemin -Vers le ciel.”
Ibidem (page 14) Du poème “ Muero perque no muero” “Je meurs parce que je ne meurs pas”
“Je vis sans vivre en moi-même
- Et si haute est le vie en laquelle j’espère
- Que je meurs parce que je ne meurs pas.