5 Le sacrifice inversé

Le Christ tout à fait homme, tout à fait Dieu, articule et accomplit cette fécondation en route depuis le commencement du message biblique, depuis l’origine. Par ce chemin, la voie royale est celle du sacrifice. Le sacrifice signifie toujours le don d’une vie pour la vie. Il s’agit donc toujours dans le sacrifice de viser un passage de la mort à la vie. Le paradoxe biblique vient de cette extraordinaire inversion : le sacrifice est oeuvre de Dieu lui même, rendant désormais inutile, au salut en tout cas, tout sacrifice de l’homme. Tout y est grâce.

Parcourons quelques étapes de cet itinéraire de Melchisédek à Jésus. L’ordre de Melchisédek conduit donc au Christ, à l’église, en traversant au passage toute l’histoire d’Israël par la tribu de Aron, l’ordre des sacrificateurs. On sait l’importance essentielle du sacrifice dans le Temple. On sait que la simple destruction du temple va réorienter toute l’histoire de la Diaspora vers la synagogue. Du sacrifice on passera à l’étude. Les chrétiens voient eux en Christ s’opérer le sacrifice rédempteur pour toujours.

Melchisédek 832 , était roi de Salem, son nom signifiait “roi de Justice“. Il marcha vers Abram venant de délivrer Lot et son propre frère, des rois qui le tenaient prisonniers, pour lui apporter du pain et du vin. Abram en retour, lui donna le dixième de ses biens.

Melchisédek est à la fois préfiguration du rôle tenu en Israël par la tribu de Aron, les souverains sacrificateurs du peuple, et du Christ, le Fils engendré 833 “ sacrificateur pour toujours selon l’ordre ( à la manière) de Melchisédek 834 selon un sacerdoce royal 835 . Tel est le sens des paroles de Paul lorsqu’il évoque l’ordre de Melchisédek.

Ainsi, la rencontre du livre de la Genèse est préfiguration mystérieuse de l’eucharistie, action de grâce, pour le salut du monde, désormais le chemin ouvert pour toujours, en Christ, entre gestes et pensées, acte et prière, conscience de Dieu et conscience de l’homme, pour une rédemption.

L’invitation à l’eucharistie faite aux disciples par Jésus reprenant le rituel de la commémoration de la Pâque, mais appliquant à sa personne désormais la fonction rédemptrice du sang de l’agneau, arrive en effet en bout de route comme la réponse obéissante et reconnaissante de l’homme, après un cheminement de toute l’histoire biblique, elle est signe d’une communion en pensée, en acte et en prière, rendue désormais possible avec Dieu, pour l’homme désormais réconcilié en Jésus-Christ avec son créateur de Père.

Notes
832.

Genèse XIV 18 à 20

833.

Psaume II 7 L’Éternel m’a dit : Tu es mon Fils! je t’ai engendré aujourd’hui.

Paroles prophétiques que reprend Paul en signifiant qu’elles parlent du Christ. (Hébreux V 5 )

834.

Hébreux V 6 ; reprenant le psaume C X verset 4

835.

Hébreux IX 11 ; XII 24