7 L’enjeu de la foi c’est la vie en jeu

Cette lecture christo-centrique de la Bible, qu’un théologien comme Karl BARTH, après LUTHER, après saint AUGUSTIN et les Pères de l’église, après Pierre, Paul les disciples et les apôtres, remit à l’honneur, est donc bien celle qui préside à l’écriture du Nouveau Testament. La perspective n’en est pas la seule vision intellectuelle d’une vérité, non seulement la vie éternelle, mais une communion de Règne avec Dieu même. Cette perspective éclaire rétroactivement l’enjeu du texte entier. Elle éclaire autour de la foi, en Christ, tout le message.

La foi y devient centrale, dans une question d’un dilemme de vie ou de mort. Si vous ne croyez pas vous ne subsisterez pas”. 845 L’ enjeu est donc radical, vie ou mort. Jésus ajoute encore que nul ne vient au Père que par lui 846 ,radicalité d’un message, d’un enjeu. Cependant paradoxalement, il ne découle pas des paroles de Jésus une orthodoxie engoncée dans une théorie figée, mais un signe par l’amour manifesté entre frères, et pour les hommes de la réalité d’une présence.

‘“ Nous connaissons que nous sommes passés de la mort à la vie à ce que nous aimons nos frères”. 847

L’orthodoxie christologique est encore par un autre aspect, autre qu’une orthodoxie doctrinale classique. Lorsque Jean l’informe que les disciples ont empêché un homme, qui ne voulait pas les suivre de chasser les démons au nom de Jésus, Jésus répond étrangement que “qui n’est pas contre lui, est pour lui” 848 , ou encore que “nul ne peut faire des miracles en son nom, et dire aussitôt après du mal de lui” 849 . Nous trouvons là comme une révélation d’une surnaturelle orthodoxie, liée au nom seul de Jésus, qui ne se confond cependant pas avec le nominalisme dont nous avons montré qu’il était une voie sans issue, un obstacle, pour entendre la parole de l’évangile, telle qu’elle se déploie dans l’histoire, et, intrinsèquement.

En effet, la référence au nom seul de Jésus ne conduit pas au nominalisme, parce que ce nom se réfère non à un concept mais à une personne qui réconcilie d’après les évangiles, en lui, l’homme et Dieu, Dieu et l’homme. Il ne s’agit pas de réduire toute existence, toute chose, au nom qui les désigne, ce qui constituerait la perspective nominaliste, mais de considérer en Jésus, le point cardinal d’une jonction entre terre et ciel, naturel et surnaturel, un passage de la mort à la vie. L’enjeu radical ne passe décidément pas par les projections, mais s’inscrit comme une blessure, une alliance, une circoncision, au coeur de leur coeur. L’enjeu, ouvrant à la communion au don gratuit, est une invitation à la dimension autre de l’amour de Dieu. Chemin qui s’ouvre sur la vie, le pardon, la communion joyeuse et aimante du royaume, face à la mort, à la séparation du jugement et de la haine.

‘Jusqu’à cette heure, nous souffrons la faim, la soif , la nudité ; nous sommes maltraités, errants çà et là; nous nous fatiguons à travailler de nos propres mains ; injuriés, nous bénissons; persécutés, nous supportons; calomniés, nous parlons avec bonté ; nous sommes devenus comme des balayures du monde, le rebut de tous, jusqu’à maintenant. Ce n’est pas pour vous faire honte que j’écris ces choses ; mais je vous avertis comme des enfants bien aimés. 850

L’enjeu donc, par ce passage de la haine à l’amour, de la mort à la vie, est celui qui va de la réconciliation de l’homme avec Dieu son créateur à la communion rendue possible avec lui désormais.

Le Dieu créateur se fait Père. Une création nouvelle vient visiter et créer nouvellement l’homme. désormais invité à la communion du Royaume. Cohéritier de la promesse, il est appelé non plus à obéir seulement mais à communier à l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ, donnant sa vie en rançon pour tous.

Notes
845.

Ésaïe (Isaïe) VII 9

846.

Jean XIV 5 à 7 op. cit.

847.

1 Jean III 14 .

848.

Luc IX 48 à 50 ; Jésus reprend par ailleurs, pour dire qu’un royaume ne peut être divisé contre lui même, et, pour au contraire dénoncer l’oeuvre du diviseur, du mal, cette notion que “quiconque n’assemble pas avec lui disperse. “

Matthieu XII 30 ; Luc XI 23

849.

Lire la version de Marc, en Marc IX 38 à 40, du même texte que celui de Luc IX 48 à 50 cité juste précédemment.

850.

I Corinthiens IV 12 à 14