15 L’obstacle de l’interposition herméneutique

L’herméneutique, bien que présente dans la tradition ancienne et spécifiquement dans la tradition biblique, est aujourd’hui une science en vogue qui se définit elle-même comme la science qui cherche à entendre les règles du sens ouvert et explicite ou caché et implicite des récits et des actes, leur contenu didactique, leurs présupposés philosophiques, théologiques, éthiques, culturels, leur règle de composition interne, en fonction de leur procédure d’élaboration, ou, de leur destinataire.

La rupture entre foi ou évangile et herméneutique est de l’ordre de celle qui sépare l’existence de la représentation de l’existence, la vie de la représentation de la vie.

La foi, comme en témoignent nombre de rencontres du Christ, est en réalité une plongée dans l’aujourd’hui de Dieu, l’herméneutique est originairement une spéculation sur les arrières pensées, le sens caché, conscients ou inconscients, d’un texte. Aujourd’hui, son centre d’intérêt, s’est déplacé du texte vers l’action. Il reste qu’elle lit, et lira toujours, par définition l’action comme un texte, un discours.

L’herméneutique réduirait toujours bien, comme malgré elle parfois, donc, l’évangile au texte, l’esprit à la lettre, la parole à un discours parmi d’autres discours, alors que la foi, au contraire chercherait et trouverait l’esprit de la parole dans le discours apparent, puisqu’elle vit de cette seule parole qui la suscite et qu’elle recueille comme venant de Dieu, elle exprime l’évangile dans la vie, et non seulement la vie dans l’évangile, l’évangile dans l’existence, et non seulement l’existence dans l’évangile.

Autrement dit : il naît de la prière et de la foi, une réciprocité inhérente à la nature de la révélation et de l’évangile, entre texte de la révélation biblique et vie personnelle intime, entre parole et engagement personnel et communautaire d’église, une réciprocité dont l’herméneutique, par définition, ne peut rendre compte en dehors d’en faire un constat partiellement aveugle.