Un cheminement et une pédagogie par la vie et pour la vie

Le cheminement par la foi va de la foi à la loi, dans l’ancienne alliance, de la loi à la grâce de la foi, dans la nouvelle alliance. ¹⁵⁵² La foi d’Abraham, la mise en route de la marche par la foi, est comme la condition première, qui précède chronologiquement, et accompagne, la révélation de la loi à Moïse, au Mont Sinaï, qui précède également et accompagne même la venue du Christ. La foi permet même sa reconnaissance comme fils de Dieu. La foi, dans la perspective chrétienne, est donc antérieure et comme supérieure à la loi, en ce qu’elle seule donne sens à ce qui sans elle ne serait que lettre morte. ¹⁵⁵³ La foi prédispose également à accueillir le don du Christ, don gratuit d’un amour divin. ¹⁵⁵⁴

La loi, parole de Dieu, source d’eau vive,¹⁵⁵⁵ pour le peuple d’Israël, qui la répercute dans son histoire, histoires humaines, simultanément uniques et collectives, plurielles et singulières, pourrait se comparer, bien que l’image n’en soit pas directement biblique, mais comme inspirée par la lecture biblique qui évoque souvent puits et citernes, à une citerne que l’on laisse se remplir d’eau de pluie,¹⁵⁵⁶ dans les pays du Proche-Orient, pour servir de réserve pour l’irrigation de la terre, une fois la sécheresse venue. On peut d’ailleurs aussi comparer le don de la loi à un puits qui, quant à lui, ¹⁵⁵⁷ puise directement à la source souterraine. La loi est indispensable à la vie d’Israël, comme une réserve, une source d’eau, une pluie bienfaisante. La citerne, comme le puits, sont les résultats de deux oeuvres. Celle de Dieu, qui fournit la source, ou qui fait tomber la pluie. Celle de l’homme qui doit creuser, ou bâtir, puis continuer d’entretenir la construction, pour en maintenir étanches et dégagés murs et parois.

‘Cieux soyez étonnés de cela;
Frémissez d’épouvante et d’horreur dit l’Éternel.
Car mon peuple a commis un double péché.
Ils m’ont abandonné, moi qui suis une source d’eau vive.
Pour se creuser des citernes, des citernes crevassées
qui ne retiennent pas l’eau. ¹⁵⁵⁸ ’

La citerne devient alors très symbolique : Joseph y fut jeté, ¹⁵⁵⁹ Jérémie également. ¹⁵⁶⁰ Elle peut devenir prison par celui qui en fait un instrument de jugement pour son frère. Et le livre de l’Apocalypse parle de l’abîme comme d’un puits. ¹⁵⁶¹ Si nous ne gardons de la loi, que la part humaine, et c’est là tout le sens des épîtres de Paul, nous ne trouverons que l’abîme et la mort.

Le sermon sur la montagne, sorte de raccourci de l’enseignement, tout exotérique, à l’opposé de tout ésotérisme, et donc exposé à tous, du Christ, s’adressant à la foule, exprime sans doute mieux que toute autre parole de Jésus, cette notion d’accomplissement qui n’est pas abolition, mais dépassement, et retour au sens premier, comme le passage d’une graine à un fruit. ¹⁵⁶²

À Mériba, l’eau jaillit directement du rocher : Jésus est la source d’eau ; l’Éternel fait jaillir les sources d’eau au coeur du désert. ¹⁵⁶³ Alors, le lien entre les deux alliances, qui donne sens, selon les uns et les autres, juifs et chrétiens, à toute la Bible, est dans le fait que la source de la Torah ¹⁵⁶⁴ , comme celle de la vie, est dans la Parole vivante de Dieu qui, comme une source, donne et renouvelle la vie.