Action éducative de la Bible

La Bible, en tant que telle, est source d’actions éducatives diverses mais elle est, elle-même comme le produit d’une action éducative singulière. Joignant en son sein, pour le croyant, au moins, parole de Dieu, paroles humaines, part de Dieu, part de l’homme, elle est source de révélations multiples, révélatrices d’un plan divin de salut et de rédemption pour l’homme. Elle ouvre l’espace à un monde singulier selon une justification singulière dont témoigne le Saint-Esprit, et qui est obtenue par le Fils, annoncé lors de son baptême comme l’agneau de Dieu venu ôter le péché du monde. 2641 Cet espace pourrait rejoindre, mais sans doute pas seulement, ce que THÉVENOT et BOLTANSKI, 2642 ont appelé la cité inspirée selon le modèle de la Cité de Dieu de Saint AUGUSTIN. 2643

Un coup d’oeil sur l’évolution juive de la conception éducative, renforce la dimension d’incarnation et le dépassement de l’enclavement dans une cité céleste du message éducatif biblique. Par exemple, du temps de Jésus, tous les enfants juifs, de cinq à dix ans 2644 allaient à la synagogue, pour y recevoir un enseignement biblique. Toute la conception du monde tournait autour de la Bible.

‘La Loi divine et la sagesse sont le domaine privilégié que scrute la pensée juive. La quête d’un savoir qui a sa fin en lui-même, caractéristique des Grecs est une quasi-impossibilité pour Israël. Même les sciences élémentaires, nécessaires à la vie ne sont pas autonomes mais intégrées dans la perspective religieuse. Ainsi une astronomie rudimentaire permet de fixer un calendrier liturgique ; la géographie qui est plutôt une cosmologie met Israël au centre du monde ; les mathématiques servent aux calculs qu’on appliquent à la Bible et les nombres ont une valeur symbolique. D’autre part , à la différence des peuples voisins, les forces naturelles ne sont pas des sujets sacrés de pouvoir, ni des objets de tabou ou de crainte : simples créatures elles sont soumises au Créateur. En ce sens, la vision biblique a dégagé pour la connaissance humaine un champ libre de tout interdit. 2645

Certes, le Dieu de la Bible, YHVH, est hors la création, qui du coup se désacralise, se démythifie. Certes, YHVH ne peut pas être représenté, il ne peut être enclos dans les représentations humaines, dans les savoirs humains. Mais voici qu’il prend demeure parmi les hommes, sans se laisser enfermer dans les demeures humaines. Ceci est une singularité toute biblique. Salomon, qui vient de construire le Temple de l’Éternel selon la promesse faite à David, son père, fait déjà cette prière.

‘Mais quoi Dieu habitera-t-il véritablement avec l’homme sur la terre ? Voici les cieux et les cieux des cieux ne peuvent te contenir : combien moins cette maison que j’ai bâtie! Toutefois, Éternel, mon Dieu, sois attentif à la prière de ton serviteur et à sa supplication; écoute le cri et la prière que t’adresse ton serviteur. Que tes yeux soient jour et nuit ouverts sur cette maison, sur le lieu dont tu dis que là serait ton nom! Écoute la prière que ton serviteur fait en ce lieu. Daigne exaucer les supplications de ton serviteur et de ton peuple d’Israël, lorsqu’ils prieront en ce lieu! Exauce du lieu de ta demeure des cieux exauce et pardonne. 2646

À l’orée de ce siècle, en 1899, parmi les pionniers, précédant d’un demi-siècle le mouvement vers l’unité des chrétiens qu’allait concrétiser le Conseil oecuménique des églises en 1948, Henri NICK (1868 - 1954 ) pasteur réformé, tout à la fois très bibliste et très engagé, dans le Nord de la France au côté des plus pauvres, exprimait ainsi ce sentiment de dépassement qui l’assaillait et qui lui faisait mesurer comme bien insuffisantes les institutions chrétiennes et leurs dimensions par trop étroites.

Le Saint-Esprit, en tant que don de Dieu, donné gratuitement par Dieu, en Christ, se manifestant comme Père, à ceux qui le cherchent, ou qui le demandent, à ceux que Dieu, mystérieusement, singulièrement, a choisis, qu’il a élus, et qui témoigneront de lui, le Saint-Esprit, donc, le poussait à pressentir l’unité de l’église, en Christ. Il lui suffisait d’entendre la prière de Jésus s’adressant à son Père, avant son arrestation, 2647 pour ressentir aussitôt les divisions comme une souffrance intérieure.

Cette unité ne se trouvait pas encore accomplie sous ses yeux, mais néanmoins préexistait à la conscience qu’en avaient la grande majorité des hommes et des femmes de son temps, chrétiens des différentes églises. Il disait haïr ce qui, en lui-même, ne mettait en oeuvre rien d’autre que lui-même, empêchant l’accomplissement de l’oeuvre de Dieu

‘Je hais en moi-même et chez les autres le scepticisme sadducéen, et l’orgueil et l’hypocrisie pharisienne qui sont de tous temps et de toutes les Églises .’ ‘Paix à toutes les congrégations qui se réclament du nom trois fois béni, du sacrifice, de la Résurrection et du Royaume de Notre Seigneur Jésus-Christ.’ ‘À bas l’égoïsme ecclésiastique !’ ‘Que le Christ règne voilà le but, le seul. Et que le monde connaisse que nous sommes à lui car nous avons de l’amour les uns pour les autres.’ ‘La vraie concurrence consiste à se dévouer plus complètement pour l’amour du Christ. 2648

Les chrétiens formant un même corps, la souffrance pratiquement physique de la séparation précède même la conscience théologique claire de la nécessité de se retrouver, se réunir.

Nous tenons, dans l’exemple choisi, comme une illustration de l’oeuvre ou de l’action prophétique de l’Esprit-Saint dans le monde. Avec lui, naît une aspiration nouvelle, qui évolue se transforme, pas à pas, au fur et à mesure du chemin de l’histoire et fait naître des réalités nouvelles. Ainsi, après des siècles de luttes fratricides, le vingtième siècle aura-t-il été celui, sans doute, du frémissement d’un regain de l’aspiration unitaire. Et cette aspiration trouve en quelques personnes, quelques témoins, des éclaireurs, des initiateurs, le plus souvent, au départ, isolés, comme dans un premier temps, le grain porté en terre. Évidemment ceci ne tient pas au seul problème de l’unité de l’église. Et nous pouvons, depuis le commencement de l’histoire des églises en trouver maintes illustrations. N’en citons que trois, particulièrement visibles : la création des hôpitaux asiles et hospices, des écoles au sens moderne du terme, des mouvements revendicatifs politiques sans violence.

Le Saint-Esprit, à la Pentecôte, fit annoncer, à chacun, les merveilles de Dieu, dans sa langue, Parthes, Mèdes, Élamites, habitants de la Mésopotamie, la Judée, la Cappadoce, le Pont, l’Asie, la Phrygie, la Pamphylie, l’Égypte, le territoire de la Libye voisine de Cyrène, ceux qui sont venus de Rome, crétois et arabes. 2649 Et voici que l’action éducative de l’Esprit-Saint va se déployer comme une terre habitée (sens du mot oecuménisme). L’Évangile de l’église primitive se déploie à partir de cette visitation de l’Esprit parmi les peuples, faisant écho à la visite de l’Esprit-Saint à l’humble Marie, et venant faire désormais une demeure dans le coeur de chacun, dans la langue de chacun, la culture de chaque peuple.

  • Cette action éducative est fondée sur ce que nous pourrions nommer un “double témoignage intérieur” de l’Esprit-Saint.

Un premier témoignage est d’abord celui de l’annonce de la présence vivante du Christ dans l’écriture et dans le monde.

Un second témoignage qui est le plus souvent instantané au premier est celui de l’adoption par Dieu Père, en tant que fils, du chrétien, agrégé à l’alliance établie premièrement avec Israël, et, désormais ressentie dans son coeur comme étant accomplie aussi pour lui, personnellement.

Le témoignage intérieur du Saint-Esprit exprime, en effet, une rencontre entre les deux témoignages cités : le témoin dans l’écriture, et le témoin dans le coeur de l’homme. Il rend compte d’un accueil et d’un envoi, rendus possibles, dès lors, de l’un par l’autre, d’une communion possible, et, librement permise, et librement acceptée ou repoussée, d’une liberté, d’une grâce. Comme dans la communion rendue possible entre la parole écoutée, et la parole entendue, ou encore la parole transmise. Communion rendue possible entre le témoignage dans la Bible que Jésus accomplit selon les Évangiles, et la vie quotidienne du témoin en église, du témoignage de l’église, visible ou invisible.

Alors, cette action éducative se concrétise par l’envoi pour une annonce ... un témoignage partagé, multiplié, comme une nourriture intérieure rejoignant une nourriture terrestre et céleste, céleste et terrestre, une dimension sociale de partage, de communion, de multiplication des dons, ... à l’instar de l’eucharistie ou de la multiplication des pains.

Le fait de faire se joindre, se rencontrer, en effet, au moins symboliquement, mais encore davantage, à partir d’une invitation concrète, des hommes et des femmes, de toutes cultures, de toutes nationalités dans le geste de la Sainte-Cène, est significatif d’une double rupture au moins.

Rupture des représentations usuelles qui visent à montrer Dieu à partir d’images, réelles, virtuelles, intellectuelles : Dieu se faisant ici nourriture.

Rupture de la réalité du lien social unissant généralement les hommes en toutes sociétés en fonction de leurs généalogies, statuts et fonctions.

L’eucharistie et la multiplication des pains sont d’ailleurs des illustrations, s’ajoutant aux miracles de Jésus guérissant les maladies de ses semblables, de la prise en compte de tout l’homme, corps et esprit, que suppose l’évangile, et plus généralement le message biblique, et son action éducative. Le point de départ de cette action est sans doute dans cette manifestation de Dieu dans sa parole qui en elle-même, du fait même de son déploiement, prouve, exprime, et, s’appuie sur, la prise en compte nécessaire d’une altérité fondatrice.

Il n’existe, en effet, pas de langage, sans l’existence d’un autre, de l’autre. Le fait que soient centrées et montrées, dans la Bible, à partir de la Bible, la Présence de Dieu, sa révélation, sa manifestation, sur le don d’une parole, avant toute chose, signifie la prise en compte de l’homme comme séparé de Dieu, et invité par Lui, à réintégrer, retrouver, trouver, la communion au Père. La grâce divine, consiste à hisser l’homme depuis le rang de créature déchue, jusqu’à celui de fils, d’alter-ego du Père, en l’invitant à devenir héritier du royaume.

C’est à partir de ce point de vue que tout est bouleversé, que tout est déclenché de façon irréversible. En effet, l’homme visité perçoit bientôt, ou tout à coup, d’autres besoins qu’il ignorait. Les choses qui autrefois lui paraissaient importantes lui apparaissent souvent sans valeur, et vice-versa. Cette soif nouvelle, cette attitude nouvelle, ce regard nouveau, sont les vrais introducteurs à une action éducative qui sort alors des limites des sentiers battus et s’ouvre à des perspectives nouvelles qui vont transformer peu à peu le monde.

  • La grâce du don de Dieu fait face à l’apologie du don de soi, et, le don de soi fait face à la technique. En effet, la grâce, le don gratuit, signifie que le mouvement premier, les moyens de son oeuvre, sont donnés par Dieu. Ce qui ôte tout mérite personnel à l’oeuvre du salut. Cependant pour que ce salut s’accomplisse, pour que l’oeuvre de Dieu s’accomplisse, il y faut bien la participation libre de la volonté de chacun qui n’est plus alors mérite mais réponse à une responsabilité.

L’action biblique reste donc en elle-même, un rapport au concret comme l’ont noté bien des auteurs contemporains et historiques du christianisme, mais davantage contemporains qu’anciens, peut-être à cause de l’actualité de la question, du fait, nous l’avons souligné, des tendances monopsychiques du développement des modes de pensées philosophiques et psychologiques, et d’actions sociales, à partir des pratiques dérivées de la sociologie, depuis ces deux derniers siècles.

Bien que l’annonce de l’évangile n’ait pas semblé entraver les développements technico-scientifiques des sociétés où elle s’est effectuée, bien au contraire, ce rapport au concret ne peut se réduire au seul terme technique. Il ne peut sans doute que le rejoindre pour le dépasser, le maîtriser, le dominer. En effet, la (ou le )technique suppose et s’appuie sur un projet de sûreté plus ou moins grande, quant au résultat attendu, à partir de la maîtrise de l’objet. Elle (ou il ) peut, à la limite, se passer de la prière du dialogue avec Dieu, ou alors, si elle (ou il ) inscrit un dialogue dans son champ, elle (ou il) ne vise, ou ne conduit inéluctablement qu’à le transformer en raisonnement dialectique.

Alors que, plus profondément, l’action du chrétien, de l’église, du (ou des )peuple(s) de Dieu, ne s’inscrit que dans cette prière constante qui, à chaque instant, comme dans les psaumes, remet tout entre les mains d’un Autre, pour retrouver la communion en la parole vivante. Cette action éducative de la Bible ne cherche radicalement pas au travers la relation la maîtrise d’autrui qui serait alors réduit à l’état objet, ni même la maîtrise déterminée en tout cas de façon absolue sans doute sur soi-même. Paul exprime fort bien cette tension dans ce passage de l’épître aux Romains :

‘Car je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas. Et si je fais ce que je ne veux pas, ce n’est pas moi qui le fais, c’est le péché qui habite en moi.’ ‘Je trouve en moi cette loi : quand je veux faire le bien, le mal est attaché à moi. Car je prends plaisir à la loi de Dieu selon l’homme intérieur ; mais je vois dans mes membres une autre loi, qui lutte contre la loi de mon entendement et qui me rend captif de la loi du péché qui est dans mes membres. ’ ‘Misérable que je suis ! Qui me délivrera de cette mort ? Grâces soient rendues à Dieu par Jésus-Christ, notre Seigneur ... ’ ‘Grâces soient rendues à Dieu par Jésus-Christ notre Seigneur ! ....’ ‘Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ. En effet, la loi de l’esprit de vie en Jésus-Christ m’a affranchi de la loi du péché et de la mort.”’ ‘Ainsi donc, moi-même, je suis par la l’entendement esclave de la loi de Dieu, et je suis par la chair esclave de la loi du péché ... 2650

Dans les annexes du document nous évoquons-nous même un passage d’un film “la colline aux mille enfants”, qui nous semble particulièrement révélateur de ce que dit Paul. Et ceci d’autant plus que l’exemple choisi pourrait bien être issu au plus près de la réalité effective de ce que nous savons par des proches l’ayant bien connu, du vrai caractère du pasteur Alain TROCMÉ.

‘Un film vu, il y a quelques mois, à la télévision “la colline aux milles enfants” 2651 reprend de façon un peu romancée l’aventure pendant la seconde guerre mondiale de ces enfants juifs sauvés par les habitants du Chambon sur Lignon, conduits par leur pasteur TROCMÉ. Au commencement de ce film, un match de basket, entre des jeunes du Collège Cévenol, est arbitré par le pasteur. Tout à coup, un élève sort du jeu, car, selon lui, le pasteur, mauvais arbitre, se laisse emporter par la colère. Le pasteur proteste de toute bonne foi. Lui en colère ? Lui mauvais joueur ? Allons donc ! Le match reprend donc, mais aux premiers rebonds de balle le pasteur se surprend à se laisser emporter encore. Il sourit alors tendrement en direction de l’enfant. 2652

L’action de l’église, des peuples de Dieu, des peuples de la Bible, des peuples chrétiens, ne vise, en fait, qu’à laisser agir l’oeuvre divine, qu’à rechercher la communion avec l’Esprit-Saint de Dieu pour accomplir avec lui son oeuvre. Au fond, c’est cette disponibilité à l’oeuvre, à l’action de l’Esprit qui est absente dans la technique autosuffisante, qui s’érige alors en fin des choses, rejoignant mais surtout prolongeant “la pensée suffisante en ses concepts” dont parle Maurice BLONDEL. 2653

La prise en compte de la technique (le technique) comme fin en soi s’est développée simultanément à la prééminence des états modernes. On pourrait parler, au singulier, de l’état moderne : ceux-ci se fondant progressivement dans celui-là, avec, de plus en plus pour vocation ultime et principale fonction, celles de prévoir, dominer, maîtriser, rejoignant alors les caractéristiques du projet de la technique (du technique). Gabriel MARCEL, dont la philosophie tentait de dire le christianisme à ses contemporains, voyait une connexion directe entre la technique en tant que fin, et le péché.

‘Cette connexion entre la technique et le péché s’éclaire étrangement si l’on songe d’une part, que seuls aujourd’hui les États sont assez riches pour financer les gigantesques laboratoires où s’élabore la nouvelle physique ; d’autre part, que dans un monde livré comme le nôtre à des impérialismes rivaux, ces mêmes États, ces Léviathans, pour employer le terme de Hobbes, sont inévitablement portés à exiger que ces recherches soient orientées vers tout ce qui peut accroître leur puissance dans les conflits à venir. Il faut déclarer en ce sens que l’étatisation de la science et de la technique est sans doute une des pires calamités de notre temps. 2654

Cette pensée formulée par Gabriel MARCEL et écrite en 1951, fait référence,- au-delà des deux grandes “ calamités idéologiques “ du temps, toutes deux fondées sur une démarche prétendue scientifique, le marxisme d’une part, et ses goulags dont on ne parlait pourtant alors encore qu’en catimini, entre initiés avertis, le nazisme d’autre part, et ses crimes dont la shoa -, à cette confiscation de l’expérience personnelle, et, du point de vue personnel, au profit d’un monopsychisme qui procède à partir de l’hypostase, bien que scientifiquement même abusive, de la pensée scientifique, interférant jusque dans la gestion de la recherche, des écoles, des hôpitaux, de l’économie, du politique, et du lien social. Autrement dit, un esprit de généralisation abstraite se substitue ici à l’universel perçu au sens biblique, et qui s’appuie toujours sur la rencontre personnelle, la conversion personnelle, le baptême personnel, la décision personnelle, la compréhension personnelle, l’action personnelle rejoignant par la communion de l’Esprit-Saint alors, l’église entière, passée, présente, à venir, et qui était, est, sera, à l’oeuvre dans le monde comme corps du Christ.

Il est clair, comme nous nous étions nous mêmes employés à le montrer lors d’un travail universitaire précédent 2655 que la Bible ouvre la porte à un chemin nouveau, qui de l’expérience personnelle, singulière, fait rejoindre l’universel. Le modèle grec est renversé qui part de la spéculation abstraite fut-elle, elle aussi singulière pour prétendre à une réalité universelle, méprisant dès lors tout ce qui se cantonnerait au niveau du domestique quotidien. Or, c’est justement dans le domaine domestique, ce quotidien que se déploie la parole adressée. L’effort de l’abstraction selon ce profil grec devient dès lors incontournable. Le profil juif y substitue le mouvement de l’incarnation. C’est tout le récit biblique qui en atteste depuis Noé, Abraham jusqu’au Christ, et l’église.Dès lors, il n’est point étonnant de trouver dans l’Apocalypse de Jean, cette opposition radicale entre le nombre de la Bête et le sang de l’Agneau de Dieu, le peuple des élus, le Fils de l’homme. 2656 Gabriel MARCEL anticipant sur l’approche même de cette thèse, voyait dans la prééminence du modèle grec de l’abstraction sur la révélation chrétienne, la cause et la source de bien des dérives du temps.

‘“Considérée sous son aspect dynamique, mon oeuvre philosophique se présente tout entière comme une lutte opiniâtre menée sans relâche contre l’esprit d’abstraction” 2657

Cette position peut rejoindre celle du philosophe Franz ROSENZWEIG du côté du judaïsme. Elle pourrait s’inscrire dans la logique d’une réhabilitation de l’apport biblique dans le phylum juif, dans lequel s’inscrit explicitement Jésus de Nazareth et son enseignement.

  • L’action éducative pour la vie, de la vie, par la vie, qui émerge de la Bible, ou, qui est directement objectivement exprimée dans la Bible, fait face aux théories “sur” l’éducation. Il ne s’agit donc pas seulement d’établir un rapport entre des pratiques que la Bible évoquerait et des théories qui seraient chargées de les dire et de les expliquer. Le projet de la Bible n’est pas d’expliquer à partir de concepts, mais d’adresser une parole à partir d’un engagement dans la vie, d’une marche par la foi. l’espace ouvert par la parole biblique n’est pas entre théories et pratiques mais entre gestes et pensées.

La rupture est donc d’un autre ordre, elle rejoint l’ensemble des dimensions de l’acte éducatif. Entre l’éducation, telle que la déploie la Bible, et la réalité théorique des discours sur l’éducation, nous avons signalé dans cet écrit, tout un panel, toute une série, de dichotomies successives qui rejoignent les parties précédentes de la thèse : langage, perspective et enjeu, la médiation, la relation, la relation au temps, l’enseignement lui-même.

L’accueil est fait, ici premièrement aux personnes, là premièrement aux concepts, modèles, idées. Dès lors, le langage de la Bible fait d’interpellations singulières, s’oppose, ou au moins se distingue radicalement des discours ciselés et enclos entre des théories et des pratiques ou encore chargés de justifier une cohérence en eux-mêmes, par eux-mêmes, depuis leur point de vue, en quelque sorte.

La perspective biblique est d’abord inscrite, comme, les préceptes de la loi donnée à Moïse, ou, la terre et la postérité nombreuse de la promesse faite à Abraham, ou encore, plus antérieurement, la succession non interrompue des jours, des nuits, du froid et de la chaleur, et des saisons, promise à Noé, dans la réalité effective, alors que la perspective de la théorie est de rejoindre une éternité supposée dans un monde virtuel : celui des idées.

L’enjeu de la Bible, se déploie dans la réalité entre gestes et pensées, entre pensées et prières, entre prières et pensées, entre vie et mort, entre terre et ciel, entre amour et raison, entre communion au règne de Dieu et déchéance, entre communion aux souffrances et joies des hommes et indifférence, voire mépris. Il n’est pas, non plus, du tout, ou, tout à fait, selon les théologies, celui qui s’exprime dans la théorie qui vise à la cohérence conceptuelle explicative à partir d’un prédicat.

La médiation entre le théoricien et le praticien est dans le discours et la critique, la médiation selon le texte biblique, entre l’homme et la Parole de son Dieu, est dans le Christ, verbe fait chair. Autrement dit dans le don d’amour “fou” de Dieu Père pour le monde , allant jusqu’à donner pour qu’il vive et ne meure point, son enfant. 2658

La relation objectivée jusqu’à dans la prise en compte intersubjective est première dans la dimension théorique, la Bible, non seulement y substitue la relation de “je “ à “tu” mais encore le don de soi absolu de Dieu, se vidant dans la kénose de lui-même et appelant l’homme à faire désormais de même. Le regard plein de tendresse que nous venons d’évoquer entre le pasteur et le jeune élève est signifiant d’une relation éducative où le maître n’est pas le référent absolu. Il y a quelqu’un d’autre que signifie implicitement ce sourire complice. Ou plutôt il s’ouvre alors un espace pour que quelqu’un d’autre puisse entrer, et manifester une présence faite de pardon, de tendresse.

La relation au temps s’inverse, nous l’avons dit : Le temps est d’un point de vue strictement théorique, une des données incontournables, à partir duquel il est possible de spéculer jusqu’à imaginer des géométries virtuelles, des réalités relatives. Le temps dans la Bible, tout au contraire, pourrait-on dire, n’est qu’un instrument,. Il a un début et une fin, il est enclos dans une parole qui se déploie en lui et lui donne un sens. Et ceci, est une dimension intrinsèque au texte, à sa lecture, dès le livre de la Genèse jusqu’à l’Apocalypse, dimension intrinsèque à la réalité de la vie par la foi, depuis le temps de l’écriture biblique jusqu’à aujourd’hui, et pour celui qui croit en cette parole, dès aujourd’hui jusqu’à la fin des temps, l’accomplissement dernier.

Enfin, l’enseignement biblique est celui de l’institution nouvelle de l’homme autrefois déchu et chassé du jardin. Entre la théorie et les pratiques s’instituent des domaines scientifiques, des sciences, des institutions éducatives mêmes, selon le modèle grec. L’enseignement biblique, quant à lui, institue pour finir des pierres vivantes, dans l’église, de Jésus-Christ, sur le fondement des apôtres et avec Jésus pour pierre d’angle. 2659

  • L’Action de Dieu se déploie dans et par l’Esprit-Saint, son témoignage intérieur et extérieur, la consolation, l’incarnation ... Le témoignage de l’Esprit-Saint agit dans deux sens. Il se donne à lire, à comprendre, à se recevoir lui-même, procurant, par son action, une lisibilité, accordée à celui qui l’accueille. Il se manifeste, par ailleurs, selon une visibilité que chacun peut constater.

L’Esprit-Saint n’est cependant totalement ou même partiellement lisible que par l’Esprit-Saint seul : le moment de la Pentecôte, n’est témoignage que pour ceux qui y reconnaissent une parole de Dieu. Pour d’autres témoins de la même manifestation extérieure, les disciples, parlant des merveilles de Dieu dans leurs langues, ne sont, tout simplement, qu’en état d’ébriété et pleins de vin doux. 2660

L’Esprit-Saint, encore, s’il procède sur un registre “je” à “tu”diamétralement opposé de celui de la technique qui elle va de “je” à “ça”, conduit paradoxalement à une fin apparemment sinon semblable, au moins, à première vue, toute aussi concrète sur le monde. C’est ce qu’exprime l’incarnation. L’incarnation est à la fois oeuvre de l’Esprit-Saint prenant chair de Marie, et témoignage de l’Esprit-Saint signifiant que Jésus est Fils de Dieu dans le coeur du disciple.

Entre tout homme et Dieu, entre tout homme et son prochain, l’Esprit-Saint accomplit le sens même de la médiation christique. 2661 . L’Esprit-Saint est alors le témoin intérieur à chacun et dans l’écriture selon une relation nouvelle avec Dieu, de Père à fils 2662 , et le témoin extérieur à partir d’une parole prophétique 2663 d’une relation nouvelle entre les hommes, de frère à frère, relation rendue possible en Jésus. Son oeuvre, proclamant la Seigneurie du Christ crucifié 2664 , est de consoler 2665 l’homme brisé, déchiré et tendu entre, d’une part, ce qu’il voudrait obtenir et d’autre part, ce qu’il est tout juste capable, ou dans la plus ou moins grande incapacité, d’accomplir. 2666 L’Esprit-Saint, répercutant les paroles du Christ, envoie enfin dans le monde, construire à partir de ses dons, l’église, 2667 pour témoigner, pour baptiser 2668 , pour rendre à une identité nouvelle, 2669 rendre les morts à la vie, 2670 soulager ou guérir, 2671 servir 2672 , dans et pour une communion aux joies aux peines 2673 . L’Esprit-Saint invite encore à parler, entendre, tout partager 2674 .

Certes, technique et Esprit-Saint conduisent bien, tous deux, à agir, à transformer le monde et les personnes. Mais à partir de là, il y a opposition. Si la technique se nourrit d’abstractions théoriques, l’Esprit-Saint se nourrit d’incarnation divine. Le premier mouvement part de l’homme et cherche à encercler le réel réduit à l’état d’objet, pour le dominer à partir de la pratique, le second mouvement part de Dieu et cherche à témoigner d’une Présence vivante à partir d’une parole donnée et entendue.

L’Esprit-Saint souffle, d’après les paroles de Jésus rapportées dans l’écriture, où il veut, et supposant une prise en compte directe et principale de l’altérité. 2675 Le Saint-Esprit s’oppose à l’abstraction, à la stricte spéculation intellectuelle qui se développe sur un registre monique d’agrégation du réel à l’objet (modèle, idée, concept ). Le Saint-Esprit se distingue radicalement alors d’un système théorique d’explication du réel, tel que celui qui supporte tout progrès technique.

Le Saint-Esprit, selon le texte biblique, vient de Dieu et descend vers l’homme, traverse ses gestes et ses pensées, il traverse l’homme tout entier, qui en vit et qui entre en communion d’église avec lui, par lui, avec Dieu et d’autres hommes. L’homme renouvelé vit donc dans l’Esprit-Saint qui le conduit à prier Dieu, à prier selon l’Esprit-Saint, à régner par lui, avec le Dieu de la Bible vivant et personnel avec qui l’homme dialogue, qu’il aime dans l’Esprit-Saint tout autant qu’il est aimé de Lui, qu’il sert dans l’Esprit-Saint, tout autant qu’il est servi par Lui.

La (ou le) technique part évidemment du mouvement de l’homme vers la matière, ou vers autrui, ou lui-même, regardés dès lors momentanément au moins comme objets. La technique, lorsqu’elle rejoint son sens premier, selon l’étymologie grecque, d’art, de métier, peut tenter de rejoindre un dieu, une transcendance, mais à partir de l’homme. Ceci participe d’une conception grecque du monde où les dieux ont leur siège dans la nature. La technique, pour ne pas asservir ou avilir l’homme, et finir par lui imposer une fin aveugle, sa propre fin, de réduction du monde à l’état objet, a pour vocation, obligation absolue, d’être commandée, conduite vers une finalité, sinon totalement maîtrisée et comprise, et dirigée par l’homme. Tout se complique lorsque nous constatons que la technique acquise, conquise, comme le métier, se rend visible à travers son objet, en masquant sa source. Tel est le cas de celle que nous utilisons sans en connaître forcément les principes de fonctionnement. Tel est le cas également de celle que nous concevons ou améliorons, sans connaître les principes théoriques qui sous-tendent la pratique et l’amélioration de l’efficacité constatée.

Dès lors, la technique inscrite entre la théorie qui la sous-tend, et la pratique où elle s’exprime, peut exercer une emprise fascinatrice pour l’homme ignorant du processus de son développement, qui explique son fonctionnement. À l’inverse, l’Esprit-Saint ne connaît pas l’ésotérisme, il est reçu comme une grâce, un don gratuit, à l’opposé du mérite et du métier, et il donne la lumière et la clarté, l’intelligence et la compréhension du témoignage qu’il énonce à quiconque le reçoit consciemment. L’Esprit-Saint qui prend chair d’une vierge, pour donner naissance à Jésus, 2676 manifeste donc son action par une création nouvelle, dont il témoigne par avance pour le croyant.

Naît alors une opposition, une distinction, entre : la technique destinée à être maîtrisée par l’homme désirant devenir maître des choses qui l’entourent, et le Saint-Esprit, invitant l’homme à le maîtriser, lui-même, 2677 à ne pas craindre l’objet ou la création, et à tout maîtriser de lui, ou d’elle, jusqu’à sa propre personne. 2678 Or, justement le Saint-Esprit lui-même est bibliquement l’expression même de Dieu qui ne se laisse maîtriser que par celui qui aime. Les langues de feu descendant sur chacun des disciples à la Pentecôte 2679 , rappellent que le prochain n’est pas à maîtriser mais à aimer comme Dieu l’aime. Le Saint-Esprit invite chacun personnellement à devenir maître du monde autrement.

Cette opposition pouvant alors devenir complémentarité dans le domaine strictement spécifique de la relation à l’objet, nous aide sans doute à comprendre que l’irruption d’une référence au Saint-Esprit, à partir de l’irruption du christianisme dans l’histoire, a insufflé tout indirectement une force, une direction nouvelle aux développements des techniques. Mais au fur et à mesure que celles-ci se développent, la tentation de ne pas vouloir ni voir ni comprendre les limites inhérentes à leur nature même, se font plus grandes. Alors, la transformation du monde par la technique peut être mythifiée.

La référence à l’Esprit-Saint fait perdre à la technique son caractère attractif de fascination magique, ou d’entreprise prométhéenne. Par le simple fait que, ni Dieu, ni la liberté du prochain, n’est radicalement plus en jeu dans la relation à l’objet, la technique trouve un nouveau champ d’investigation, en même temps qu’elle s’allège de tabous et de paralysies.

Sans doute, est-ce lorsqu’elle a voulu aller trop loin dans cette démythification, la transformant en diabolisation, que l’église est apparue dans l’histoire comme un frein au développement des sciences et des techniques. Sans doute est-ce lorsqu’elle rappelle que la science et la technique doivent être soumises à une conscience, à l’esprit de l’homme, à l’esprit de Dieu, à l’Esprit-Saint, qu’elle se rapproche du message biblique originel.

Le Saint-Esprit peut alors orienter l’esprit de l’homme jusque dans le choix du domaine et des objectifs de ses recherches techniques ou scientifiques. Pour prendre un exemple parmi tant d’autres : la technique de l’alphabet braille 2680 n’aurait pas vu le jour sans la conscience de quelqu’un pour qui l’homme aveugle n’est pas destiné à la cécité, n’est pas pour Dieu un homme différent des autres hommes, n’est pas handicapé à cause de son péché ou de celui de ses ancêtres, participe à la fraternité nouvelle qu’ouvre le Christ. Ce n’est qu’à partir d’une telle soif de justice, d’un tel regard posé sur le monde, qu’un tel alphabet a pu voir le jour. Or, cette conscience, cette soif de justice, cette représentation du monde, ayant permis à l’alphabet braille d’être recherché et trouvé puis employé, incluant les aveugles dans la communauté des hommes, nous semblent, et ceci est pratiquement aujourd’hui reconnu, trouver ses sources historiques et concrètes dans la Bible. 2681 Il reste que par définition, de telles filiations restent bien difficiles voire impossibles, à démontrer parfaitement.

Revenons donc sur quelques métaphores bibliques du Saint-Esprit. La colombe créature de Dieu, et l’huile de la lampe, objet domestique de la vie quotidienne des hommes des temps bibliques, le feu, rappel de YHVH, qui consume sans se consumer apparaissant à Moïse, Dieu lui-même donc, manifesté désormais comme Père, le souffle rappel de la respiration vitale, ou ce murmure doux et léger rappelant l’existence d’une parole qui ne s’impose pas par la force mais qui ne peut-être entendue ou comprise sans être attentivement écoutée, en disent autant de directions fondatrices.

Comme la colombe vivante, descend du ciel lors du baptême de Jésus, ou encore, est lâchée par un homme, Noé, en direction de la création, dans l’espérance d’une réponse qui viendra par elle, le Saint-Esprit est un témoin paisible d’une communion possible entre Dieu et l’homme, point de vue de Dieu et point de vue d’homme, communion, nous disent et répètent les textes, en esprit et vérité.

Comme l’huile, essentiellement invisible et cachée, à l’intérieur de la lampe produit la lumière visible, le Saint-Esprit est source de la lumière dont il constitue la réserve potentielle. Le Saint-Esprit exprime la veille, dans la prière, l’espérance, un témoignage, par la lumière donnée qui ne brille pas pour elle-même, d’un monde autre, du royaume de Dieu. Ce royaume de Dieu est donc témoignage, dans un monde gouverné par un “esprit du monde “ et les rapports de force, de la venue du royaume, du règne des rapports d’amour agapê, du don gratuit, de justice et de vérité.

Comme le feu, dont la maîtrise caractérise l’homme et le distingue des animaux de la création, et dont la combustion produit un changement d’état, consume réchauffe éclaire et purifie, le Saint-Esprit est à la fois lumière, et purificateur pour l’homme qu’il console, et réchauffe par l’intérieur en lui témoignant une présence, celle d’un feu qui consume sans consumer, Dieu lui-même.

Comme le souffle évoque la vie, cette autre combustion vitale qu’est la respiration, le Saint-Esprit est vie, traverse la vie des hommes, donne la vie, envoie dans la vie, pour la vie.

Comme le murmure doux et léger évoque la parole confidentiellement annoncée, le Saint-Esprit réveille l’enfant endormi au coeur de l’homme, l’appelle par son nom, le baptise, c’est à dire le fait naître nouvellement, le met en route, si celui-ci veut bien l’entendre, prendre le temps d’écouter.

Le fait que le Saint-Esprit ouvre à une béance, à une tension, à une soif, nous paraît bien plus significatif de son action que toute approche de type théorique. Cette béance, cette conscience de l’insuffisance personnelle de chacun, est sans doute ce que l’évangile de Jean veut dire lorsqu’il évoque par la bouche du Christ, la conscience, la conviction du péché que révèle le Saint-Esprit. Ces paroles font directement suite à celles qui annoncent la venue d’un consolateur. La consolation précède la conviction de péché qui n’en est qu’une conséquence. 2682

‘Cependant, je vous dis la vérité : il vous est avantageux que je m’en aille, car si je ne m’en vais pas, le consolateur ne viendra pas vers vous, mais si je m’en vais, je vous l’enverrai.’ ‘Et quand il sera venu, il convaincra le monde en ce qui concerne le péché, la justice et le jugement ; en ce qui concerne le péché, parce qu’ils ne croient pas en moi ; la justice (ce qui est juste, la justesse, la justification) 2683 parce que je vais au Père et que vous ne me verrez plus ; le jugement, parce que le prince de ce monde est jugé. 2684

Une tension entre le désir d’une relation juste, selon la justesse d’une relation avec Dieu, et soif de justice, traverse l’homme converti, l’histoire de l’église. La justesse exige une tension espérant tout de Dieu, et n’attendant rien d’autre que le retour du Christ. La soif de justice exige de se mettre à l’oeuvre pour oeuvrer pour la justice. Deux chansons du Père Aimé DUVAL (1918 - 1990), tant elles semblent, mais à première vue seulement, dire tout autre chose l’une et l’autre, montrent bien cette tension double comme des messages contraires.

‘Le Seigneur reviendra !
Il l’a promis
Il reviendra la nuit qu’on ne l’attend pas
Le Seigneur reviendra !
Il l’a promis
Ne sois pas endormi cette nuit-là.
Dans ma détresse, je crie vers lui :
Mon Dieu serait-ce pour cette nuit ?
Le Seigneur reviendra
Ne sois pas endormi cette nuit-là. 2685
Qu’est-ce j’ai dans ma petite tête
à rêver comme ça le soir
d’un éternel jour de fête
d’un grand ciel que j’voudrais voir ...
(....) ,Et voici que Jésus m’a surpris :
“Que fais-tu là à m’attendre mon ami ?
Ton ciel se fera sur terre avec tes bras. 2686

Une tension théorique, entre justice, qui se rapporterait aux principes, et justesse, qui se rapporterait à leur application, n’est pas d’origine juive. Elle plonge ses racines dans une conception grecque de la justice conçue à partir d’une théorie politique. Les psaumes, les prophètes montrent dans la Bible que l’homme juste est tout simplement celui qui pratique la justice. Il n’y a pas tant contradiction entre les deux chansons du Père DUVAL qu’une réelle complémentarité, car elles disent deux points de vue à deux moments qui traversent la vie d’un homme chrétien, vivant, jouant sa foi, au quotidien. Elles expriment par leur contradiction à quel point tout se joue dans l’incarnation, non dans la théorisation.

L’abandon d’un enjeu strictement idéel, théorique, de type grec, pour l’enjeu de la rencontre personnelle avec Dieu, avec Christ, révèle que les deux chansons du Père DUVAL ne se contredisent, en fait, qu’en apparence, elles disent de fait deux expressions d’un même témoignage. La première expression est celle qui espère le règne de Dieu, qui attend donc le retour du Christ. La seconde expression est celle qui se tient prête à répondre à l’appel du Christ, pour se mettre au travail, comme les ouvriers des différentes paraboles de Jésus. Du coup, en prolongement d’analyse, nous confirmons que les contradictions apparentes qui ont divisé historiquement les théologies des uns et des autres, ne sont bien souvent rien d’autre que des oppositions secondaires d’écoles, tant qu’elles ne touchent pas vraiment le fondement de la foi : le Christ mort et ressuscité pour tous, ou, au moins tous ceux qui en acceptent le don. Lorsqu’on veut systématiser théoriquement le message biblique, l’évangile, on ne peut faire autre chose que de le réduire. La théorie a pour inéluctable produit de figer l’existence humaine et divine, dans une essence par principe et définition, impossible à atteindre. Ce fut la philosophie de Sören KIERKEGAARD (1813 - 1845 ) 2687 qui affirma fort bien ces choses, au moment historique où grandissait la domination l’hégémonie du scientisme philosophique.

L’église corps du Christ, naît d’une relation vivante entre des personnes, vivantes, unies les unes aux autres, par un sentiment d’amour les liant, au Fils, au Père, par le Saint-Esprit, et non dans l’attachement commun, une adhésion commune, à un principe théorique, fut-il théologique. Ceci est un point fondamental à saisir pour comprendre ce qui unit les différents évangiles, ce qui fonde le christianisme primitif, ce qui constitue son essence même. Paul l’exprime déjà dans quelques passages fort connus adressés à l’église de Corinthe de la première génération.

‘Je vous exhorte, frères, par le nom du Seigneur Jésus-Christ, à tenir tous un même langage, et à ne point avoir de divisions parmi vous, mais à être parfaitement unis dans un même esprit, et dans un même sentiment.’ ‘Car mes frères, j’ai appris à votre sujet, par des gens de Chloé, qu’il y a des disputes au milieu de vous. Je veux dire que chacun de vous parle ainsi : Moi, je suis de Paul, et moi d’Apollos ! et moi, de Céphas! et moi de Christ ! Christ est-il divisé ? Paul a-t-il été crucifié pour vous, ou est-ce au nom de Paul que vous avez été baptisé ? Je rends grâce à Dieu de ce que je n’ai baptisé aucun de vous, excepté Crispus et Gaïus afin que personne ne dise que vous avez été baptisés en mon nom ! J’ai encore baptisé la famille de Stéphanas; du reste, je ne sache pas que l’aie baptisé quelque autre personne. 2688

Le sens du baptême, rappel de la mort et de la résurrection du Christ, est mentionné par Paul pour signifier le caractère du message de l’évangile exprimé dans l’incarnation, non dans les pensées seules, les idées devenues les théories, mais dans le concret du corps ( chair et esprit ), de chacun.

‘Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? Si quelqu’un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira ; car le temple de Dieu est saint, et c’est ce que vous êtes.’ ‘Que nul ne s’abuse lui-même; si quelqu’un parmi vous pense être sage selon ce siècle, qu’il devienne fou, afin de devenir sage !’ ‘Car la sagesse de ce monde est une folie devant Dieu. Car il est écrit : Il prend les sages à leur propre ruse. 2689 Et encore : Le Seigneur connaît les pensées des sages, il sait qu’elles sont vaines. 2690 Que personne donc ne mette sa gloire dans les hommes ; car tout est à vous, soit Paul , soit Apollos, soit Céphas, soit le monde, soit la vie, soit les choses à venir. Tout est à vous, et vous êtes à Christ, et Christ est à Dieu. 2691

Nous avons évoqué le témoignage de l’Esprit-Saint, dans l’écriture, son témoignage dans le coeur de l’homme converti, le témoignage dans le monde, nous pouvons regarder cette triple dimension selon un autre angle encore. Le baptême, que Paul évoquait, comme signe de l’appartenance à Christ, dans le précédent passage de la même épître aux Corinthiens, fait rejoindre, cette triple dimension, tout à la fois, dans le rappel implicite mais néanmoins évident du déluge, et donc du premier pas dans le cheminement de l’alliance, 2692 la mort et la résurrection proprement dite du chrétien, 2693 marchant à la suite du Christ, l’obéissance aux paroles mêmes du Christ qui annonce le baptême au nom du Père du Fils et du Saint-Esprit, par un ordre donné aux disciples, comme une occasion de devenir disciple, donc d’agir dans et pour le monde, à sa suite. 2694

L’Esprit-Saint témoigne, en effet, selon une triple dimension de la présence de la personne de Jésus, d’abord dans l’écriture que la personne unique 2695 du Fils accomplit, 2696 dans la vie du chrétien, ensuite, où son enseignement est répercuté, 2697 et, sa vie donnée pour le salut du monde, 2698 dans l’histoire universelle des hommes où tout ne prend sens, selon l’écriture, qu’en lui seul. 2699

L’action de l’Esprit-Saint est alors d’introduire dans la communion d’esprit, au Fils et au Père, 2700 communion avec les acteurs principaux de la Bible qui ont agi selon la foi 2701 , patriarches, prophètes, témoins, communion avec l’église, visible ou invisible, aujourd’hui dans le monde, 2702 comme à l’église, invisible ou visible, depuis le commencement. 2703

Cette communion s’opère en une personne, en Christ, qui en est le chemin, celui qui y conduit, celui qui en donne le but, et l’origine. Le Christ n’est donc pas réductible dans le concept. Ce fut la grande erreur, la grande limite, de la philosophie de HEGEL que d’avoir confondu cette personne avec un système théorique. Il nous faut sortir d’une lecture grecque pour entrer dans la seule lecture possible du Nouveau Testament tel qu’en lui-même, tel qu’il se justifie lui-même explicitement, c’est à dire à partir d’une lecture sinon intégralement juive tant ce mot contient d’ambiguïtés (entre judaïsmes anciens, contemporains du Christ, ou de la rédaction des évangiles, ultérieurs à cette rédaction, judaïsmes modernes, ou orthodoxes etc ...), du moins intégralement biblique.

Le penseur juif Abraham HESCHEL (1907 - 1972 ) exprime ce rapport biblique intrinsèque à la Bible, entre foi et raison, inhérent à la culture biblique, entre ineffable et rationnel par ces propos :

‘Le sens de l’ineffable est un effort intellectuel issu du plus profond de la raison ; c’est une source d’intuition cognitive. (...) ’ ‘L’usage de la raison est indispensable à la compréhension et au culte de Dieu, et la religion sans raison s’atrophierait à son tour.’ ‘(...)’ ‘Sans la raison nous ne saurions comment appliquer les intuitions de la foi aux problèmes concrets de la vie.’ ‘Le culte de la raison par sa témérité dénote un manque d’intelligence. Le rejet de la raison, par sa couardise, dénote un manque de foi. 2704

L’irruption du Saint-Esprit lors de la Pentecôte chrétienne rejoint ce rapport à l’ineffable, omniprésent dans la culture juive, en lui donnant, non seulement la place centrale, mais encore en modifiant la relation entretenue avec lui : l’ineffable, en se révélant aux hommes par trois personnes vivantes du Père, du Fils et du Saint-Esprit, n’est plus tant à sonder qu’il est lui-même la source de toute parole de tout témoignage d’une paternité nouvelle, d’une fraternité nouvelle. 2705 Paul exprime fort bien dans l’épître aux Corinthiens, comment le mystère de la croix, expression de la Pâque de Dieu, dont le Saint-Esprit témoigne, et dont le chrétien rend témoignage à son tour, est un scandale pour la pensée juive contemporaine du Christ, comme elle est folie dans une perspective grecque.

‘Car puisque le monde, avec sa sagesse, n’a point connu Dieu dans la sagesse de Dieu, il a plu à Dieu de sauver les croyants par la folie de la prédication Les Juifs demandent des miracles et les Grecs cherchent la sagesse : nous, nous prêchons Christ crucifié, scandale pour les Juifs, et folie pour les païens mais puissance de Dieu et sagesse de Dieu pour ceux qui sont appelés tant Juifs que Grecs. Car la folie de Dieu est plus sage que les hommes, et la faiblesse de Dieu est plus forte que les hommes. 2706

Les Grecs sont à la source du développement ultérieur de la philosophie occidentale où la raison spéculative se construit, à partir des philosophes, sur une différenciation historique progressive de plus en plus radicale, entre les mythes irrationnels des épopées lyriques, et l’élaboration d’une raison systémique et suffisante en ses concepts. En effet, les dieux des Grecs, ou le dieu des philosophes émergent du chaos originel et naturel. Ils sont issus du monde, 2707 ce qui ne permet pas de penser la parole créatrice ou la manifestation par une parole créatrice d’un Dieu incréé, hors de la création, tel que la Bible le révèle. Les paroles du Christ que nous citons à la suite, vues sous cet angle grec qui ne peut approcher le divin qu’au travers des concepts, et de la virtualité, ne sauraient être qu’un tissus de contradictions. Vues sous un angle strictement juif, elles ne sauraient être que scandaleuses : un homme ne peut-être le chemin la vérité et la vie, et de plus, pour tous les autres, mais seul YHVH.

‘Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. Si vous me connaissiez vous connaîtriez aussi le Père. Et dès maintenant, vous le connaissez et vous l’avez vu . 2708 (...) Nul ne peut venir à moi ; si le Père qui m’a envoyé ne l’attire ; et je le ressusciterai au dernier jour. Il est écrit dans les prophètes : ils seront tous enseignés de Dieu. 2709 Ainsi quiconque a entendu le Père et a reçu son enseignement vient à moi. Ce n’est pas que personne ait vu le Père, sinon celui qui vient de Dieu ; celui-là a vu le Père. 2710

Jésus est donc d’abord celui qui conduit au Père, et nul ne peut aller au Père, s’il ne vient par lui. Réciproquement : nul ne peut aller à lui, Jésus, si cela ne lui est donné par le Père. Nous tenons dans ces propos l’ineffable caractéristique d’une communion d’esprit que seule une référence au Saint-Esprit peut donner. Alors, les deux assertions loin de conduire à une situation de détermination conduisent à l’émergence d’une liberté : la liberté donnée par la grâce.

L’ineffable, d’un point de vue juif, est devenu, dans le point de vue chrétien, l’expression même de la grâce, puisque tout est grâce, le don du Christ, comme le don d’être disciple.

Le “Notre Père” est un exemple nous semble-t-il de l’oeuvre de Jésus, de l’oeuvre de l’Esprit-Saint tel qu’il émerge du Nouveau Testament. La prière vise à la création nouvelle, oeuvre de l’Esprit. La sciences et les techniques, visent à transformer le monde. La transformation n’est pas création nouvelle, puisque la transformation part de l’effort de l’homme pour agir sur le monde.

L’aspiration à la création nouvelle donne l’intelligence du projet de Dieu Père pour l’homme, permettre l’action de l’Esprit de Dieu sur la création. La théorie, la pratique, la technique donnent à l’homme d’accomplir son projet d’action sur le monde. Mais l’Esprit-Saint ne veut pas agir sans l’homme, d’où la tension historique et nouvelle selon la question de BONHOEFFER reprise par Georges HOURDIN, “Comment vivre avec Dieu dans un monde sans Dieu ?”. 2711

La tension chrétienne, pour comprendre et rendre à la raison des hommes, le mystère de la révélation, dès lors depuis l’origine va devoir se déployer sur deux registres :

  • Le registre spéculatif grec progressivement visité puis transformé par les valeurs chrétiennes de fraternité universelle, évacue l’ineffable au rang des choses subalternes, et a pour objet la compréhension du mode naturel ...
  • Le registre de la révélation juive biblique centré sur la compréhension du mystère et l’étude des écritures a pour objet l’accomplissement de la révélation et de la volonté divine.

Le premier registre se développe à partir de la première tension, entre théories et pratiques, mues par le pouvoir des concepts. Il débouche sur l’intellection, le développement des sciences.

Le second registre permet l’émergence d’une seconde tension, entre gestes et pensées, mue par l’action du témoignage de l’Esprit-Saint. Il débouche sur l’émergence d’une conscience nouvelle sur l’action chrétienne, le développement et la pratique de la charité, l’expression concrète de l’église, des églises et des oeuvres chrétiennes, poursuivant l’oeuvre du Christ dans le monde.

  • Quelle lisibilité pédagogique intrinsèque ?

Nous pourrions, par simple énumération, montrer déjà, tout à la fois, l’expression directe d’une singularité, et d’une lisibilité pédagogique de source intrinsèque à la Bible. Soulignons en quelques termes, à titre de simple évocation, sans prétention exhaustive, évidemment intenable :

  • La distinction spécifiquement biblique, entre la parole et les écritures, nous ouvre à la rencontre entre le temps présent, où la parole s’énonce, donne la vie, est comprise, et, l’histoire, qui se déroule du passé à l’avenir, toujours à partir d’un présent mobile dans le temps maîtrisé par Dieu seul, et qui se déploie justement là où les écritures s’accomplissent. La parole annonce les écritures qui l’annoncent elles-mêmes, et accomplit les écritures, les incarne jusqu’à se faire chair et vivre, selon l’expression même de l’évangile de Jean, parmi les hommes. C’est au présent d’une parole alors que se rencontre, l’éternité, la vie éternelle, que précisément les écritures annoncent.
  • La prophétie est cette parole venue de Dieu, et, donnée par la bouche ou le geste du prophète et qui, nous l’avons souligné, est vraie, selon la Bible, tout autant pour hier, pour aujourd’hui, que pour demain. La prophétie fait entrer dans le temps de Dieu, la perspective de Dieu. Les écritures peuvent contenir des paroles prophétiques, elles peuvent même être lues entièrement comme parole prophétique, mais à la condition d’être entendues comme parole de Dieu aujourd’hui maintenant par qui les reçoit , les parcourt, les étudie, les transmet en s’y confiant comme telle. Alors prophétie et divination s’opposent radicalement. La divination pose Dieu comme objet et le convoque, à partir de l’inquiétude de l’homme, la prophétie traverse l’homme comme malgré lui, à partir de l’inquiétude, si l’on peut dire, du point de vue de Dieu. Jonas est alors l’exemple type du prophète.
  • L’exil, le désert, et la mise l’épreuve d’un peuple, d’hommes, singuliers, leur mise à l’écart provisoire, ou définitive, mais toujours radicale, jalonnent toute l’histoire de la révélation. Ils expriment que la séparation est nécessaire entre l’homme et son prochain, l’homme et ses projets, pour ne pas sombrer dans la fusion qui n’apporte que l’annihilation de la personne et la disparition de l’altérité. Pour s’ouvrir à l’éducation de Dieu qui conduit à la communion qui appelle chacun par son nom et qui suppose une altérité de corps, et de réalité effective, pour une vie dans un même Esprit, l’Esprit de Dieu, l’Esprit-Saint. De plus, la conscience de la radicale distance entre l’homme naturel livré à lui-même et Dieu, est nécessaire pour que la parole de Dieu s’exprime et permette la rencontre, le dépassement de soi, le don de soi-même. Se trame alors un mouvement, éducatif qui va, à l’instar du témoignage de Job, ou, des premiers disciples, de l’espérance dans l’épreuve à la sanctification.
  • La promesse biblique s’exprime intrinsèquement comme venant de Dieu et se dirigeant vers des hommes singuliers, un peuple singulier. Cette promesse, à partir de ce point de départ singulier, rejoint tous les autres hommes, elle a un caractère universel. Elle est un moteur. C’est elle qui, une fois énoncée, engage progressivement Dieu, toujours fidèle à sa parole, ou mieux dit, fidèle dans sa parole pour toujours, à s’approcher de plus en plus de l’homme, jusqu’à s’incarner lui-même en Jésus. La promesse est donc encore autre chose que la finalité qui serait inscrite ou calquée sur le modèle grec. Elle est un moyen pédagogique de Dieu, pour mettre l’homme en marche et lui dévoiler, au temps venu, la fin de son projet pour lui. La création nouvelle dont Jésus est le premier-né.
  • Le chemin du parcours de la révélation biblique va de révélation de la promesse à celle de la loi, puis de la révélation de la loi à celle, dans la perspective chrétienne en tout cas, de la grâce. La loi fait rejoindre la double dimension d’un double rapport : à la justice devant les hommes, à la justesse de relation de l’homme devant Dieu. La grâce approfondit encore ces deux dimensions. La révélation de la primauté de la grâce revient à dire que la grâce est première et dernière, qu’elle précède tout autant qu’elle succède à la loi accomplie par Jésus, don gratuit de Dieu pour l’homme.
  • Dieu s’adresse à l’homme, aux hommes, par une parole claire et intelligible. C’est le don de la loi à Moïse qui en atteste, avec l’ensemble du Pentateuque. Entre le projet de Dieu pour l’homme exprimé par le don de la promesse, et la mémoire de l’histoire, s’ouvre le chemin d’une pédagogie biblique. La parole des prophètes veut redire et retrouver l’esprit dans lequel la loi fut énoncée. Jésus enfin porte en lui, la promesse accomplie, la mémoire transfigurée, de l’histoire biblique, de l’histoire humaine. Comme lors de la rencontre de la transfiguration, avec Moïse et Élie. Lorsque ce chemin est par trop bouché, Dieu parle par des rêves, les songes et les visions. L’homme répond communie exprime sa foi par le psaume, le cantique, la guerre et la paix, l’espérance dans la joie, la soif de repentance, l’instruction, la louange, le proverbe, la maxime, la sagesse et la crainte de Dieu, la repentance et soif de la justice ou la quête de la justesse, la bénédiction et même la malédiction, la prière, la conversion, la liberté et l’obéissance, la tentation et l’amour, le pouvoir de servir, la parabole et la comparaison ou la métaphore, le miracle. Le miracle étant l’expression même de l’accomplissement précis de l’oeuvre de Dieu qui se fait signe. Il annonce la réalité autre, la finalité dernière que révèlent précisément le Nouveau Testament et le message du Christ : le Royaume.
  • Quelle visibilité pédagogique extrinsèque ?

La lisibilité suppose un acte de foi du lecteur, la visibilité suppose simplement, la “bonne foi” du témoin qui se contente de relever ce qu’il voit. Nous pourrions élargir à l’infini notre énumération en y introduisant des éléments visibles par tous des pédagogies juives et chrétiennes.

Nous ne citerons là, à titre de simple évocation, et pour illustrer notre propos, que quelques uns de ceux qui poseraient sans doute le moins de problèmes de reconnaissance théologique, par l’ensemble des églises chrétiennes ou dans la tradition juive, et, qui sont objectivement visibles de tous. Les existences et survivances des “peuples” juifs et chrétiens sont une première réalité visible. Elles ont traversé l’histoire d’Israël, aujourd’hui retrouvé, et des églises. Ces réalités ne sont objectivement lisibles, compréhensibles, que parce que la Bible existe. Ces réalités qui n’auraient objectivement pas vues le jour en dehors de l’existence première du texte fondateur qui les suppose et supporte, en supportent et supposent, à leur tour, bien d’autres, tant en christianisme qu’ en judaïsme.

Citons donc en vrac, en christianisme : disciples et apôtres, travail et repos, apocalypse et les révélations, la brutale ou progressive conversion, les quatre évangiles dont trois synoptiques, les épîtres, le témoignage, le pardon, le sacrifice, la prière, le “Notre Père”, les complies, l’intercession, calendriers annuels de lectures bibliques quotidiennes, les engagements auprès des pauvres, et pour la justice, la consolation dans l’épreuve, l’humilité recherchée, la tension vers la joie, le baptême, les miracles et les guérisons, les cantiques, les musiques, chorales, les choeurs d’enfants, le diaconat, les années diaconales, pour les jeunes des églises réformées, le martyr, l’imposition des mains, la visite des malades, des isolés, des prisonniers, les congrégations, associations caritatives, églises, communautés, les catéchismes et les catéchèses, la prédication, chansons de gestes, drames liturgiques, et mystères théâtraux comme ceux du Moyen-Âge, les processions et pèlerinages, l’art iconographique, l’action de grâce au moment des repas, crèches et santons, cantiques et musiques, la confession, l’absolution, le crédo, la relation aux saints, l’autorité des Pères de l’église, monachismes et anachorètes, liturgies, et anamnèses, confession des péchés, et louanges, annonce du pardon de Dieu, le pardon au prochain, l’eucharistie ou Sainte-Cène, les réunions publiques d’évangélisation, messes, et cultes, l’offrande, la création d’hospices et le don de la charité, l’ouverture d’écoles pour tous, les charismes et ministères reconnus, les temps liturgiques spécifiques, le jour de repos situé le premier jour de la semaine au jour de la résurrection, le dimanche, temps de Noël, de Pâques, de Pentecôte, de l’ascension, de la transfiguration, conciles, les missions, les réveils et le mouvement oecuménique, l’expression de la parole biblique, des cultes et liturgies, en toutes langues ...

De même, en judaïsme : le sabbat, la consécration et les voeux prononcés dans le jeûne et la prière, prière du Shema, deux fois par jour, matin et soir, et, la Amida, prière quotidienne debout des dix-huit bénédictions, chants, danses, les fêtes principales, de Rosch Ho-Shana (Chana), les dix jours de Tichri depuis Rosch Ho-Shana, le jeûne de Gedalia jusqu’au Yom Kippour, les fêtes de Soukkot ou des tabernacles, la fête de Hanoukka (hanuka), des bougies et des cadeaux pour les enfants, précédant, la journée du jeûne d’Esther et la fête des Purim, celle de Pessah, avec son repas du séder, et la bénédiction du kidush prononcée avec le vin, la fête des semaines, Shavuot, l’épreuve de la Shoa, la renaissance contemporaine de la langue hébraïque, l’aliya montée vers Jérusalem, le retour après deux mille ans en terre promise, l’étude de la Torah et du Talmud, la Michnah, la codification de la tradition orale publiée en l’an 200 en Palestine, la Baraïta, qui est en général comprise comme l’enseignement tanaïtique oublié par les compilateurs de la Michnah, la diaspora, les deux Talmuds, celui de Jérusalem, (entre 220 et 375) et celui de Babylone (entre 220 et 449), la kabbale, l’alyah, les midrashim de la halakhah, et ceux de l’agada, les maîtres tanaïtiques des deux premiers siècles de l’ère chrétienne, maîtres amoraïques, des débuts du troisième au début du sixième siècles, entre la date de clôture de la Michnah, et celle du Talmud de Babylone, les responsum, les maîtres savora’im de Babylone, entre le VI° siècle et le milieu du VII° siècle, les maîtres geonim des académies babyloniennes de Soura et Poumbedita, entre 750 et 1050, les maîtres rishonim, ( anciens), entre les milieux des XI° au XV ° siècle, les maîtres aharonim (modernes), à partir du XVI° siècle, les rabbis (maîtres), les hassidim (justes), la figure exemplaire du Talmid Hakham (le savant en matière religieuse), le drash (exiger, rechercher enquêter), l’exégèse biblique, la gimatria et le notarikon, les aphorismes des maîtres,le Bar Mitzvah (fils du commandement) au moment où le garçon entrant dans sa treizième année pourra lire la Torah à la synagogue, et où il sera soumis aux 613 mitsvot, l’ensemble des commandements de la Loi transmise à Moïse dans le Pentateuque, les synagogues, les maisons d’étude, (beth midrash) , académies, consistoires, beth (beit) din (tribunal rabbinique).

Cette longue énumération, bien que radicalement et volontairement très incomplète, rappelle une évidence : cette visibilité suppose un fondement, moins apparent mais néanmoins essentiel, pour expliquer le lien entre ces différents termes disparates.

La visibilité pédagogique ne devient lisible que lorsqu’elle passe par une consécration à Dieu, mais celle-ci reste plus ou moins, sinon cachée, du moins, voilée à autrui, et peut-être même à soi-même. Sans doute était-ce, du temps du Temple, l’une des significations du voile (ou des voiles), séparant le lieu, sinon de la présence divine, du moins de l’expression de celle-ci, de celui de la prière humaine en quête de rédemption. Toute fusion entre la volonté de l’homme et celle supposée de YHVH était dès lors signalée comme impromptue.

La Bible ne montre jamais, non plus, autrui, spontanément en tout cas, dans une transparence absolue, hormis sous le regard de Dieu 2712 , ou, encore dans la perspective chrétienne, de Jésus 2713 , ou enfin, sous le regard de l’Esprit-Saint qui introduit dans la communion avec le Père et le Fils, et qui domine sur, et discerne, les différents esprits. 2714

Que ce soit en christianisme ou en judaïsme, la consécration renvoie, le maître et le disciple, le prédicateur et son auditoire, face à une transcendance autre qu’eux-mêmes, YHVH, ou, le Christ. L’effet démiurgique se trouve ainsi en principe inexorablement renversé, ou, en tout cas amoindri.

Il en va de même pour la technique pédagogique, même si, une fois habitée de cette consécration finalement toujours initiale, elle devient tout autre chose qu’un moyen, traversée qu’elle est, en elle-même, par le trouble d’une interrogation essentielle qui suppose à tout coup, la réponse toujours libre d’autrui et de Dieu.

La technique donc, si tant est qu’on puisse encore utiliser ce mot devenu soudain bien impropre, non seulement ne répondrait jamais au précepte bien connu, “la fin justifie les moyens”, mais encore, rejoignant sur ce point la pensée de GANDHI (1869 - 1948), ne séparerait plus la fin des moyens. Il ne peut y avoir, en pédagogie d’inspiration biblique, chrétienne ou juive, de technique “froide” prétendue neutre, et élevée en tant que telle au pinacle. On ne convoque pas “le dieu” biblique, on l’interroge, on le loue, intercède auprès de lui, le prie, dialogue avec lui. Le respect de la distance entre le pédagogue et Lui, rejoint et permet le respect de la distance entre le pédagogue et son élève.

C’est en cela qu’on rompt ici avec “l’idolâtrie idéologique” de type comportementaliste, scientiste, comme avec la croyance de type magique. Il ne pourrait y avoir de “technique” éventuelle que celle qui retrouverait en amont et en aval, ses propres limites, et respirerait donc avec la prière d’une consécration. Cette consécration qui, d’ailleurs, ne produit pas d’assurance absolue de réussite du projet humain (encore que la foi donne parfois celle-ci, mais par une parole extérieure, non sous l’effet d’une méthode Coué), reste à reproduire dans chaque situation, à chaque instant. Elle promet davantage, la réussite du projet divin, le don de la paix, sa paix. Cette consécration vise à permettre au souffle divin de bénir l’existence toute confiée en lui. La consécration reçoit l’assurance de la présence de YHVH, ce qui est sans doute mieux que toute réussite d’un projet humain qui n’est peut-être pas celui qui s’avère, en dernier bout de compte, être bon ou souhaitable.

La place qu’occupaient les sacrifices dans l’histoire biblique, celle qu’occupent les voeux dans la tradition juive, nous rappellent cette importance permanente de la consécration et des prémices. La consécration est toujours initiale, car elle suppose toujours un nouveau commencement, même et surtout, lorsqu’elle se situerait au coeur de l’action, dans le prolongement d’une action passée, dans l’accomplissement de la volonté exprimée d’entrer dans celle de Dieu.

Cette consécration initiale permet donc, entre maîtres et élèves, l’irruption possible de la présence autre de Dieu. La pédagogie n’est, dès lors, pas une action directe ou indirecte, d’un maître sur un élève, ce qui relèverait de la maïeutique, mais une prière active pas toujours explicite, mais toujours présente jusque dans les gestes, les paroles, et les pensées, du maître pour l’élève et pour lui-même, invitant implicitement l’élève, à son tour, à prier pour son maître.

La pédagogie consiste donc en ouvrir l’espace au Tout Autre, ou le tout proche, 2715 afin qu’Il agisse Lui-même, et transforme les situations, parle à l’un, parle à l’autre, au maître à l’élève.

En judaïsme, la prééminence du maître, manifestée dans la “responsa”, signifie, alors aussi, simultanément, que la qualité de la question est tout aussi vitale que celle de la réponse.

En christianisme, le maître pourrait devenir en bout de compte l’enfant 2716 , comme le Messie lui-même annoncé par Ésaïe sous les traits d’un enfant 2717 . Ce centre posé, non sur un contenu théorique, ni sur une pratique rituelle, ni sur un récit allégorique, mais en la personne vivante de l’enfant, et sur son attitude est renforcé par les paroles de Jésus, 2718 ou encore par celles de l’évangéliste Jean adressant sa première épître à ceux qu’il appelle ses enfants bien aimés, ou encore les enfants bien aimés de Dieu. 2719

Le contenu juridique de la loi, selon la halakah, ou, encore l’allégorie d’après les récits, la aggadah (aggada), vision juive exotérique issue du pharisianisme, son commentaire rabbinique, ne sont plus les donnes premières de la lecture chrétienne, telle qu’elle apparaît au premier siècle, pas plus que la vision teintée d’hellénisme qui certes marquera les Pères de l’église, des siècles suivants, d’un PHILON D’ALEXANDRIE (-20 environ 45 ), 2720 relisant la Bible à partir des catégories de la philosophie grecque, recréant tout une symbolique, dont naîtra, directement ou indirectement, deux à trois siècles plus tard, la tradition kabbalistiques, d’un judaïsme ésotérique.

La pédagogie chrétienne originelle, telle qu’elle se déploie dans le Nouveau Testament, n’a pas d’autre intention en bout de compte que de permettre l’action de consolation et d’unification de l’Esprit-Saint pour conduire et l’élève et le maître, sur les chemins d’une communion d’église, en quête du Royaume que seul le coeur de l’enfant peut accueillir. 2721

Cette place centrale accordée à l’enfant, à l’esprit des enfants, va plus loin que toute figure, elle nous paraît même relever historiquement d’une singularité. Elle ne considère pas la pédagogie en dehors d’un témoignage, d’une annonce. En fait, il s’agit, dans la perspective du christianisme originel, d’une visitation de la terre par le ciel, visitation manifestée en Christ, parole faite chair, par Jésus, en Jésus, 2722 le serviteur souffrant, 2723 dont l’Esprit-Saint rend témoignage dans l’annonce de l’espérance de son retour prochain, 2724 en Christ triomphant, lors de la Parousie. 2725

Notes
2641.

Jean I 29

2642.

BOLTANSKI Luc, THÉVENOT Laurent op. cit. Paris 1991 ; (pp 107 à 115). On peut penser que toutes les cités définies par THÉVENOT et BOLTANSKI à partir d’un principe de justification propre sont toutes marquées par l’action éducative de la Bible. Tout autant la cité de l’opinion, que la cité domestique, que la cité civique. Sans doute également en répercussion de la répercussion, dans les mondes industriels, ou marchands. Nous avons tenté de le montrer tout au long de notre thèse, d’une manière certes indirecte, et qui mériterait d’être développée.

2643.

AUGUSTIN (Saint ) “La cité de Dieu”

2644.

DICTIONNAIRE du Nouveau Testament” Xavier LÉON-DUFOUR Seuil Paris 1975 ; (page 65).

2645.

In ibidem; (page 67).

2646.

II Chroniques VI 18 à 21

2647.

Jean XVII 21 “Ce n’est pas pour eux seulement que je prie mais aussi pour ceux qui croiront en moi par leur parole afin que tous soient uns comme nous sommes un ; moi en eux et toi en moi, afin qu’ils soient parfaitement un et que le monde connaisse que tu m’as envoyé et que tu les as aimés comme tu m’as aimés.”

2648.

Écrit le 2 Août 1899, au début de son ministère à Fives, par le pasteur protestant Henri NICK ( 1868 - 1954 )

ROSER Henri (et des collaborateurs) “ Monsieur Nick, cinquante ans d’une vie dans le faubourg ouvrier de FIVES - LILLE - 1897-1954” Éditions de la M. P E Clichy ; 1982 ; (page 77 ).

2649.

Actes I 9 à 11

2650.

Romains VII 19 à Romains VIII 2

2651.

“La colline aux milles enfants “ Film TV 1994 réalisation Jean Louis LORENZ ; rediffusion le 06 01 95 sur FR3

2652.

Reprise du passage des annexes du document page 53 Matthieu V 21 à 26 Sur la colère “raca” Le jeudi 13 Juin 1996 Commentaire radiophonique Antoine Caballé R.C.F. Saint-Étienne 94,7

2653.

BLONDEL Maurice “Le problème de la philosophie catholique” Bloud &Gay Paris 1932 (8° édition ); (223 pages).

2654.

MARCEL Gabriel “ Les hommes contre l’humain” éd. La Colombe Paris 1951 ; Fayard presse 1968 ; (206 pages)

-N. Édit. Uni. en 1991 ; (171 pages) ; (à la page 63).

2655.

CABALLÉ Antoine “ Autodidactie aujourd’hui, ? Une question singulière posée à la modernité. De l’institution à la traverse, de la traverse à l’institution. À partir des notions d’universalité et de singularité.” Mémoire de Maîtrise en Sciences de l’Éducation - Université Louis Lumière Lyon 2. 1993 ; (175 pages). CABALLÉ Antoine “ Annexes” Autodidactie aujourd’hui, ? Mémoire de Maîtrise en Sciences de l’Éducation - Université Louis Lumière Lyon 2. 1993 ; (106 pages).

2656.

Apocalypse XI 7 à Apocalypse XXI

2657.

MARCEL Gabriel “ Les hommes contre l’humain” éd. La Colombe Paris 1951 ; Fayard presse 1968 ; (206 pages)

-N. Édit. Uni. en 1991 ; (171 pages) ; (à la page 7).

2658.

Jean III 15

2659.

Éphésiens II 19 à 22

2660.

Actes II 13

2661.

Hébreux VIII 1 à Hébreux XII 29

2662.

On peut se reporter à l’étude remarquable de PREISS Théo

“Le témoignage intérieur du Saint-Esprit” cahiers de la théologie protestante ( numéro 13) éd. : Delachaux Niestlé Neuchâtel 1946 ; ( 39 pages) ; on peut lire particulièrement l’épître de Paul aux Romains, et plus particulièrement le chapitre VIII et la première épître de Jean qui insistent suer l’oeuvre de l’Esprit de Dieu en l’homme qui le fait “enfant de Dieu”.

“ Et vous n’avez pas reçu un esprit de servitude mais vous avez reçu un esprit d’adoption par lequel nous crions : Abba ! Père”. (Romains VIII 15 ) “Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand ; car le témoignage de Dieu consiste en ce qu’il a rendu témoignage à son Fils. Celui qui croit au Fils de Dieu a ce témoignage en lui-même ; celui qui ne croit pas Dieu le fait menteur, puisqu’il ne croit pas au témoignage que Dieu a rendu à son Fils. Et voici ce témoignage, c’est que Dieu nous a donné la vie éternelle, et que cette vie est dans son Fils. Celui qui a le Fils de Dieu n’a pas la vie. Je vous ai écrit ces choses afin que vous sachiez que vous avec la vie éternelle vous qui croyez au nom du Fils de Dieu.” (I Jean V 9 à 13 )

2663.

( ...) car ce n’est pas par une volonté d’homme qu’une prophétie a jamais été apportée mais c’est pousser par le Saint-Esprit que des hommes ont parlé de la part de Dieu. (II Pierre I 21 )

2664.

Actes II 22 à 36 ; (un passage du discours de Pierre à la Pentecôte ) ; Romains VI 1 à Romains VII 25

2665.

Jean XIV 16 à Jean XVI 33

2666.

Romains VII 19 à 26

2667.

Hébreux II 4 ; I Corinthiens VI 4 ; I Corinthiens XII

2668.

Matthieu III 11 à 17 ; Matthieu XXVIII 19 ; Luc III 6 ; Marc I 8; Jean I 33

2669.

Ézéchiel XI 19 ; Jean III 1 à 21 (rencontre de Jésus avec Nicodème) ; Romains VI 1 à 14

2670.

Ézéchiel XXXVII 1 à 14

2671.

Actes III 1 à 11 ; Hébreux XI 34 ; I Corinthiens XII 28

2672.

Matthieu XXIII 11 ; Luc XVII 10 ; Philippiens III 3

2673.

Romains XII 15 à 16

2674.

L’Esprit-Saint se manifeste par des verbes d’action. Quelques exemples choisis dans le Nouveau Testament :

parler (ou prophétiser ) devant la foule favorable ou hostile comme Pierre et Étienne ; (Actes II 8 ; Actes VI 10 ) ;

entendre ce que l’Esprit dit aux églises (Apocalypse II 7 ) ;

vendre et partager à chacun selon ses besoins comme l’église primitive après la Pentecôte (Actes II 45 )

2675.

Jean III 8 (paroles de Jésus à Nicodème).

2676.

Matthieu I 18 ; Luc I 25

2677.

I Corinthiens XIV 22

2678.

Galates V 23 ; II Timothée IV 5

2679.

Actes II 3“ Des langues semblables des langues de feu, leur apparurent séparées les unes des autres et se posèrent sur chacun deux.”

2680.

Annexes (pp 260 à 274) la pièce de théâtre écrite par les élèves du CE2 de Montplaisir et nous-même au cours de l’année scolaire 1996-1997, à partir du livre : DAVIDSON Margaret “Louis Braille - l’enfant de la nuit “ Gallimard Paris 1983 ; (88 pages). Traduit de l’américain par Camille FABIEN et illustré par André DAHAN. Titre original “Louis Braille the boy who invented books for the blind” Scholastic Book Services 1971.

On peut également lire l’ensemble des lettres à la classe écrites en cette même année scolaire 1996 - 97; (pp 221 à 259).

2681.

Pour ne prendre que l’exemple des aveugles. Nous pourrions en effet tout aussi bien choisir d’autres formes d’handicap ou de souffrance, tant on voit bien l’intérêt que porte très tôt la Bible à ces hommes qu’elle refuse de voir comme des exclus, et à qui elle promet très tôt une espérance que Jésus accomplit au travers de ses multiples guérisons. Lorsque les disciples de Jean Baptiste emprisonné viennent voir Jésus pour savoir s’il est bien celui qui doit venir ou s’ils doivent encore attendre, Jésus un autre, Jésus lui fait répondre : “Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et ce Que vous voyez : les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et la bonne nouvelle est annoncée aux pauvres. Heureux celui pour qui je ne serai pas une occasion de chute. (Matthieu X 2 à 6 )

2682.

La conviction de péché sans consolation est l’oeuvre accusatrice du malin, de l’ennemi de Dieu. Zacharie III 1 ; Jean V 45 Apocalypse X 2

2683.

C’est nous qui ajoutons ces termes proches les uns des autres pour enrichir la signification et nous rapprocher du sens du mot justice pour les juifs contemporains de Jésus.

2684.

Jean XVI 7 à 11

2685.

“Le Seigneur reviendra “1961 Cantépi Paris in DUVAL Aime Révérend Père “Recueil de 38 chansons “ Disques SM ; Père DUVAL Boîte postale 263 Nancy France 1972 ; (chanson numéro 9 )

2686.

“La petite tête “1963 Cantépi Paris in Ibidem Nancy France 1972 ; (chanson numéro 7 )

2687.

On peut se reporter particulièrement à “Crainte et tremblement” oeuvre écrite en 1843 et dont Georges GUSDORF écrit :

“Les confuses relations humaines ne prennent sens que devant Dieu, et devant Dieu, elle se trouvent mises en question par ce que l’homme n’est plus le maître des significations.”GUSDORF Georges “Kierkegaard “ Seghers Paris 1963 ; (page 51).

2688.

I Corinthiens I 11 à 13

2689.

Paul cite ici Job V 13

2690.

Paul cite ici le psaume XCXIV 11

2691.

I Corinthiens III 16 à 23

2692.

I Pierre II 18 à 22 ; II Pierre III 5 à 8 ; Genèse VI 8 à Genèse IX 17

2693.

Matthieu III 11 à 12 ; Marc XVI 16 ; Luc III 16 à 17 ; Actes XIX 1 à 7 ; Romains VI 3 ; Galates III 27

2694.

Matthieu XXVIII 19

2695.

Jean attire particulièrement l’attention sur Jésus fils unique de Dieu : Jean I 14 à 18 ; Jean III 16 à 18 ; I Jean IV 9 à 12.

Paul reprend ce thème, en comparant le Christ, seul, par qui la grâce et la justice sont rendues possibles, au seul Adam par qui le péché est devenu la condition de l’homme. Le Christ seul réparant la faute du seul Adam : Romains V 12 à 21 ; Luc XII 8 à 9

2696.

“ Dans la perspective biblique “ accomplir “ dit plus que “faire”; c’est mener “ à son achèvement “ (grec teleô) idée parfois retenue pour la Parole de Dieu ou les Écritures (Luc I 45; XVII 31 ; XXII 37 ; Actes XIII 29 ; Romains IX 28 ; Apocalypse XVII 17 ) ou encore à propos de la passion de Jésus. (Luc XII 50 ; Jean XIX 28 ). C’est surtout remplir “plèrô “au sens de “combler une attente “ d’où résultent la conformité, la fidélité, et l’adéquation exacte entre le contenu et le contenant : l’accomplissement est semblable à la prophétie. Accomplir c’est aussi “porter à sa perfection “ : le contenu semble désigner quelque chose de supérieur au contenant ; l’événement dépasse la prédiction comme la réalité l’ombre.

Le même verbe sert à dire que des personnes sont remplies de l’Esprit ( Luc I 15 ; 41, 67 ; IV 1 ; Actes II 4 ; IV 8 ; VI 3 à 5 ; VII 55 ; IX 17 ; XI 24 ; XIII 9 ; Éphésiens V 18 ; Actes V 3 ) ou de Satan (Actes V 3 ) ou de vertus ( Luc II 40 ; Luc V 26 ; Actes II 28 ; III 10 ; VI 5 ; 8 ; IX 36 ; XIII 52 ; Romains XV 13 ; II Corinthiens VII 4 ; Philippiens I 11 ; Colossiens I 9 ; II 10 ; IV 12 ; II Timothée I 4 ) de vices (Luc IV 28 , Luc VI 11 ; Actes V 17 ; XIII 10 ; XIX 28 ; Romains I 29).”

DICTIONNAIRE du Nouveau Testament” Xavier LÉON-DUFOUR Seuil Paris 1975 ; (page 96 ) ; au mot : accomplir.

2697.

II Corinthiens I 21 à 22 ; I Jean II 20 à 27 ;

2698.

Ésaïe IX 1 à 6 ; Ésaïe XII 1 à 6 ; Malachie IV 5 à 6 ; Luc I 67à 80 ; Luc II 29 à 32; Jean III 16 à 17 ; Jean XVII

2699.

Nous avons là l’expression de la grande originalité chrétienne, qui explique la différence entre les deux traditions qui, dès lors vont se séparer : la tradition juive s’appuie sur la lecture interprétative historique du texte, et son évolution, et le christianisme originel, au moins celui du premier siècle, voire des trois à quatre premiers siècles, s’appuie, comme toute orthodoxie chrétienne réformée romaine orthodoxe ou évangélique sur une lecture exclusive de la Bible, à partir de l’accomplissement en Christ seul. LACOCQUE André et RICOEUR Paul “Penser la Bible “ Seuil Paris 1998 ; (456 pages).

2700.

Est évocatrice de ce sens pris en Christ de l’écriture entière, la façon dont Philippe annonce le Christ à Nathanaël qui justement, selon les paroles de Jésus (Luc I 47 ), est un “israélite exempt de fraude” : “Nous avons trouvé celui de qui Moïse a écrit dans la loi et dont les prophètes ont parlé, Jésus de Nazareth, fils de Joseph.” (Luc I 45 ).

On peut se reporter également au discours de Pierre à la Pentecôte s’adressant aux juifs en visite Jérusalem pour dire qui est le Christ, (Actes II 14 à 47 ) au discours d’Étienne devant le sanhédrin (Actes VII ), à la rencontre entre Philippe et l’eunuque Éthiopien (Actes VIII 26 à 40 ), où Philippe explique le sens du passage qu’il est en train de lire (Ésaïe LIII 7 ) : le serviteur souffrant est Jésus, et c’est de lui dont parlait le prophète .

2701.

Hébreux XI 1 à Hébreux XXII 2

2702.

Jean XV 12 à 17

2703.

II Pierre I 2 à 4

2704.

HESCHEL Abraham “Dieu en quête de l’homme” Titre original : “God in search of Man . A philosophy of judaïsm (Farrar Strauss & Cudahy New York 1955) Seuil Paris 1968 ; ( page 28).

2705.

CORMIER Philippe “Généalogie de personne” Préface de Jean Luc MARION Critérion Paris 1994 ; (238 pages).

2706.

I Corinthiens I 20 à 25

2707.

BABUT Daniel “La religion des philosophes grecs, de Thalès aux stoïciens.” PUF Paris 1974 ; (216 pages).

2708.

Jean XIV 6 à 7

2709.

Job XXXVI 22 ; Ésaïe II 3 ; Ésaïe LIV 13 à 14 ; Jérémie XXXI 33 à 35; Michée IV 2 ; Hébreux VIII 10 ; Hébreux X 16

2710.

Jean XIV 44 à 45

2711.

HOURDIN Georges “Le vieil homme et la vie “ Desclée De Brouwer Paris 1999 ; (p 93 ).

2712.

Psaume XC 8 ; Psaume XXXIII 13 ; Job XII 22 ; Job XXVIII 11 ; Job XXXIV 22 ; Ecclésisaste XII 16 ; Ézéchiel XXVIII 3 ; Daniel II 22 ; Mathieu IV 22 ; Matthieu X 26 ; Luc VIII 17 ; Luc XII 22 ; I Corinthiens IV 5 ; Hébreux IV 13

2713.

Matthieu VIII 8 ; Matthieu IX 4 ; Matthieu VIII 16 ; Matthieu XIII 35 ; Marc II 8 ; Luc V 22 ; Luc VI 8 ; I Corinthiens II 10

2714.

Ésaïe LXIV 3 ; Matthieu X 20 ; Romains VIII 16 ; I Corinthiens II 10 à 16 ; I Corinthiens VI 17 ; I Corinthiens XII 10 ;

2715.

On peut se reporter aux deux commandements qui résument la loi, selon Jésus : aimer Dieu avant toute chose (le Tout Autre) et le prochain (le tout proche) comme soi-même. (Mathieu XXII 37 ).

2716.

Matthieu XI 16 à 1 9 ; Matthieu XVIII 2 à 5 ; Matthieu XIX 13 à 15 ; Marc IX 36 à 37; Marc X 15 à 16 ; Luc VII 31 à 35 ; Luc IX 46 à 48 ; Luc XVIII 17 ; Jean XIII 33 . La première épître de Jean s’adresse à “mes petits enfants “

2717.

Ésaïe IX 5

2718.

Matthieu XVIII 1 à 9 ; Marc IX 33 à 37 ; Luc IX 46 à 48

Matthieu XIX 13 à 15 ; Marc X 13 à 16 ; Luc XVIII 15 à 17

2719.

I Jean I I 1 ; I Jean I I 18 ; I Jean II 28 ; I Jean III 1 et 2 ; I Jean III 7 ; I Jean III 18 ; I Jean III 10 ; I Jean IV 4 ; I Jean V 2 ; I Jean V 21 (pour l’expression enfants ou petits enfants).

Cette expression d’enfants pour parler des chrétiens est également présente chez Paul :

Romains VIII 16 ; Romains VIII 21 ; Romains IX 8 ; ; Philippiens II 15 ; Hébreux XII 8

Jean emploie souvent l’adjectif “bien aimés” :

I Jean III 2 ; I Jean III 21 ; I Jean IV 1 ; I Jean IV 7 ; I Jean IV 11

Cet adjectif se retrouve dans tous les auteurs d’épîtres (Paul, Pierre, Jude ; Jacques).

2720.

PHILON D’ALEXANDRIE “Les Antiquités bibliques “ (textes contemporains du Christ) ; tome 1 ; édition de HARRINGTON Daniel ; traduit du latin par CAZEAUX Jacques ; PERROT Charles ; BOGAERT Pierre-Marie ; Cerf Paris 1976 ; (392 pages).

PHILON D’ALEXANDRIE “Les Antiquités bibliques “ ; (textes contemporains du Christ) ; tome 2 ; édition de HARRINGTON

2721.

Psaume VIII 3 ; Matthieu XI 16 à 19 ; Matthieu XI 25 ; Marc X 15 ; Luc XVIII 17 ; Jean I 12 à 13 ; I Jean III 7

2722.

Marc I 15

Matthieu XXV 43; Marc XIII 28 à 36 ; Luc XXI 28 à 38

2723.

Ésaïe LIII

2724.

Jean I 14

2725.

Zacharie IX 9 ; Matthieu XXIV 3 à Matthieu XXV 13 ; Marc XIII ; Luc XXI 8 à 38; I Corinthiens XV 22 à 26 ; I Thessaloniciens II 19 à I Thessaloniciens III 13 ; II Pierre I 16 (...)