Matthieu XXI 23 à 27. “Moi non plus je ne vous dirai pas par quelle autorité je fais ces choses ...” Lundi 14 Décembre 1998 Commentaire radiophonique Antoine CABALLÉ R.C.F. Saint-Étienne 94,7

‘Jésus se rendit dans le Temple et, pendant qu’il enseignait, les prêtres et les principaux sacrificateurs s’approchèrent et lui dirent “Par quelle autorité fais-tu ces choses, et qui t’as donné cette autorité ?’ ‘Jésus leur répondit : Je vous adresserai une autre question et, si vous m’y répondez, je vous répondrai par quelle autorité je fais ces choses.’ ‘Mais ils raisonnèrent ainsi entre eux : Si nous répondons : Du ciel , il nous dira : Pourquoi donc n’avez-vous pas cru en lui ?’ ‘Et si nous répondons des hommes, nous avons à craindre la foule car tous tiennent Jean Baptiste pour un prophète.’ ‘Alors ils répondirent à Jésus, nous ne savons. Et il leur dit à son tour : Moi non plus, je ne vous dirai pas par quelle autorité je fais ces choses.’

Nous commençons la troisième semaine du temps de l’avent, mais, curieusement, le texte qui est proposé à notre lecture aujourd’hui, dans l’évangile de Matthieu, est situé dans un tout autre temps. S’agirait-il d’une erreur de notre calendrier ? Nous approchons, en effet, du temps de la Pâque juive et de celui de la Passion du Christ. Jésus vient de renverser les tables des marchands du temple, de guérir des malades, d’être chanté et reconnu par des enfants, de parler sévèrement à un figuier qui ne portait pas fruit, et qui aussitôt se dessécha, et voici donc qu’il enseigne dans le temple ... lorsqu’il est interpellé par les sacrificateurs et les anciens autrement dit par les gardiens du temple qui viennent lui poser une question apparemment bien innocente, et tout à fait légitime.

‘“Dis-nous par quelle autorité fais-tu ces choses et qui t’a donné cette autorité ? “’

Les enfants n’ont pas eu besoin de poser cette question, pour crier dans le Temple : “Hosanna au Fils de David ! “ Les aveugles et les boiteux n’ont pas non plus posé cette question. Ils ont constaté leur guérison. Les collecteurs juifs de l’impôt romain et les gens de mauvaise vie, de mauvaise réputation, n’ont pas eu besoin de démonstration semble-t-il pour reconnaître en Jésus, celui qui devait venir.

Mais ces gardiens du Temple, qui eux sont de bonne réputation, ne semblent pas avoir bien compris, et ils ont besoin d’une explication supplémentaire. Car ces hommes qui posent la question de l’autorité de Jésus sont eux-mêmes porteurs d’une certaine autorité religieuse reconnue. À moins qu’ils ne veuillent contraindre Jésus dans ses derniers retranchements, le sonder, voire le contraindre au à dire qu’il est contre le Dieu d’Israël.

Toutes les paroles de Jésus dans les évangiles vont dans d’autre sens, il dit et répète qu’il ne fait rien de lui-même, il ne fait que la volonté de son Père, d’autre part il vient tout juste d’enseigner les disciples en disant :”Tout ce que vous demanderez avec foi dans la prière, vous l’obtiendrez.”

Jésus ne semble pas vouloir répondre en tout cas directement à la question qui lui est posée, et par la question qu’il retourne, il renvoie en quelque sorte les autorités qui le questionnent à leurs études.

‘“Si vous me dîtes, d’où venait le baptême de Jean, du ciel ou des hommes, je vous répondrai.”’

Et voici nos inquisiteurs démasqués, comme pris à leur propre piège. Ils devront choisir entre s’attirer les reproches de la foule, et perdre une part de leur bonne réputation, de leur autorité, s’ils répondent “des hommes”, ou au contraire, subir en retour la question de Jésus : ”alors pourquoi ne l’avez-vous pas suivi ?” s’ils répondent “du ciel” . Ils préfèrent donner une réponse d’extériorité très propre, voire très honnête et tolérante, “nous ne savons “. Mais Jésus leur répond alors que lui non plus ne leur dira pas par quelle autorité il agit.

Sans doute faut-il pour entendre la parole de Jésus passer d’un catalogue de croyances, à la foi confiante et simple. Sans doute faut-il sentir sa faiblesse, et sentir le besoin d’une rédemption. C’est le sens même de ce baptême qui précéda le ministère du Christ et que Jean annonça.

Les gardiens du temple, étaient sans doute attachés à la forme religieuse, au qu’en dira-t-on, en oubliant le sens de la révélation que Jésus venait accomplir, et où Dieu a toujours voulu parler premièrement au coeur. Le projet de Dieu est de nous sauver. Mais pour que nous puissions être tirés de la mort vers la vie, encore faut-il que nous ayons conscience de notre faiblesse, et que nous ayons besoin de lui.

Avons-nous besoin de sentir l’amour de Dieu dans nos vies, dans le monde, ou au contraire, sommes nous trop pleins de nous mêmes et de nos bonnes oeuvres ? Si nous retournons au fond de nos coeurs si nous nous laissons sonder par le souffle du Dieu vivant, nous entendrons la voix de Jean Baptiste qui criait dans le désert “Aplanissez les chemins du Seigneur ...” et nous pourrons accueillir le don de Dieu. Oui, ce texte qui parle du temps de Pâque est bien un texte qui peut être tout aussi bien lu au temps de l’avent. Celui qui vient est aussi celui est déjà venu, il est aussi celui dont l’autorité n’a pas besoin de se justifier, puisqu’elle est la justification même de toute chose, de toute vie, la justification de l’espérance qui nous traverse aujourd’hui. Que tout en nous se prépare à accueillir celui qui vient. Qu’il nous prépare lui-même à l’accueillir. Puisqu’il vient mais qu’il est déjà venu.