c) une Inspection plutôt paternelle

Il n’apparaît pas à la lecture des dossiers qu’une différence de traitement ait existé entre les enfants des différentes catégories. Tous ont également droit à la sollicitude, parfois aux rigueurs, des membres du service d’Inspection.

C’est de l’inspecteur que dépendent nombre de petites décisions qui font la vie quotidienne des pupilles : accord pour fréquenter un club de sport, aller chez les Scouts (à la condition qu’aucune pression confessionnelle ne soit faite sur l’enfant) ou fréquenter les réunions de la JAC, utiliser une partie de l’argent déposé sur le livret de Caisse d’épargne pour acheter une bicyclette (dans ce dernier cas il est souvent réticent, l’achat d’une machine neuve lui paraissant une grosse ponction sur une somme destinée à assurer plus tard un peu de sécurité au pupille, et il faut revenir souvent à la charge pour le faire céder).

Ce sont également les membres du service d’Inspection qui assurent la correspondance avec les pupilles sous les drapeaux, service militaire ou guerre, demandent et donnent des nouvelles, envoient de petites gratifications 209 . On y lit souvent une affection réciproque.

L’inspecteur enfin peut faire jouer ses propres relations pour assurer une place à un enfant, placer une fille comme bonne ou un garçon comme employé ou ouvrier chez un de ses amis. On voit ainsi les noms de quelques personnages connus, des maires de Saint-Etienne par exemple, qui voient peut-être là une façon de soutenir le service. Il y a aussi ce cas dans les années 1940 d’un habitant de Saint-Galmier qui s’entremet de façon parfaitement désintéressée pour trouver des emplois aux pupilles et les proposer à l’inspecteur.

Il dispense aussi conseils, réprimandes et félicitations, directement au cours de ses visites ou par le truchement du maire. Il arrange parfois au besoin les affaires des uns et des autres, rédigeant ici une lettre de recommandation pour faciliter l’accès à un emploi public, essayant là, alors que le pupille paie en quelque sorte physiquement ses erreurs en s’engageant dans un régiment d’Afrique du Nord, de régler une affaire de dettes en faisant patienter puis transiger les débiteurs afin de ne pas totalement vider le livret de Caisse d’épargne.

Comme tuteur légal, c’est également lui qui à l’occasion doit accepter ou refuser un héritage familial, selon le gain à en espérer, voire réclamer les diverses allocations auxquelles l’enfant peut avoir droit, rente décès ou accident d’un des deux parents pour les enfants abandonnés, ou majoration de pension touchée par un père ou une mère déchu de ses droits de puissance paternelle au titre de ses enfants, mais opportunément oubliée. Il n’hésitera pas au besoin à saisir la Justice…

Il rappelle enfin, à l’occasion, les règles qui régissent le choix des placements, excluant par exemple, pour des raisons de moralité sans doute, tout ce qui pourrait ressembler à un mauvais lieu : café ou restaurant.

Une telle connaissance des enfants ne s’acquiert que par un contact régulier. Il est difficile de l’évaluer, mais le nombre d’inspections peut être une indication. Chaque pupille reçoit en moyenne la visite d’un membre de l’Inspection six à sept fois au cours de son passage dans le service, soit environ une fois tous les trois ans. Il ne s’agit que de moyennes 210 , et l’effet de distance 211 , en même temps que le nombre d’enfants à la charge du service, ne facilite évidemment pas les choses. D’où l’intérêt des relais locaux évoqués plus haut.

Sans doute à l’origine la norme était-elle de deux visites annuelles 212  ; la charge représentée par ces tournées, ajoutée aux multiples autres tâches de l’inspecteur, explique sans doute l’espacement des visites.

Il faut aussi dire un mot d’une catégorie de placements que l’on pourrait qualifier d’intermédiaires, quelque part entre placement familial et envoi en correction, et à portée disciplinaire. En effet, quelques entrepreneurs sont appelés à la rescousse lorsqu’une pupille donne des signes excessifs de dissipation, de mauvaise volonté au travail, et d’indépendance. Après quelques changements de places, si son attitude persiste, elle est envoyée dans ces entreprises.

Pour les garçons qui suivent la même voie, la solution choisie est le plus souvent l’envoi à Sacuny-Brignais 213 , plus rare en raison sans doute du caractère plus radical de ce placement. Deux cas seulement sont en effet cités de garçons placés dans une « usine-école d’apprentissage » de Saint-Priest près de Lyon en 1903 et 1904, avant que l’Inspection ne recoure assez systématiquement à Sacuny, au grand dam du manufacturier de cuirs et engrais concerné regrettant en septembre 1904 le placement de vingt pupilles à Brignais : « Vous n’ignorez pas que beaucoup s’y corrompent par le contact, et d’autre part ils ne sont pas habitués ou plutôt élevés à travailler » ; c’est du reste ce que disent ceux qui en sortent et rêvent d’y retourner : moins bien nourris que chez lui, ils n’y travaillent pas autant non plus ! Il est fait une fois au moins état de la sévérité du surveillant de cette usine, qui met en cellule et au régime du pain et de l’eau au moindre écart.

Pour les filles existent cinq recours industriels et clos : deux manufactures de tresses et lacets de La Terrasse-sur-Dorlay (Saint-Chamond), un moulinage dans cette même commune, une fabrique de dorures, fils d’or et d’argent près de L’Arbresle, et une manufacture de broderie mécanique à Néronde. Nous avons repéré treize jeunes filles bénéficiant d’un tel placement, mais il est dit par ailleurs qu’en 1915 le moulinage de La Terrasse-sur-Dorlay emploie sept pupilles. Pour la moitié, ces placements ont lieu entre 1914 et 1920. Ils peuvent précéder un envoi en correction.

Les détails qui apparaissent en font quelque chose d’assez proche de ces couvents-ateliers du siècle précédent 214 , mais le recours à de tels établissements jusqu’après la guerre de 1914 peut surprendre. Les extraits ci-dessous du règlement de la manufacture de broderie mécanique de Néronde donnent une idée des conditions de ces placements :

‘« Art 3- La jeune fille doit obéissance et respect aux jeunes filles de l’Ordre St-Charles, chargées de sa conduite et de son instruction ; elle s’engage à observer le règlement de la Maison.’ ‘ Art 4- L’engagement est de trois années entières et consécutives, non compris trois mois d’essai obligé comme apprentissage. Pendant sa durée, il n’est accordé de sorties que pour les cas graves et dûment constatés. Les demandes doivent être faites, par le père ou tuteur, au Directeur qui seul a le droit de les accorder. »’

En cas de maladie, la jeune fille reçoit de préférence sur place les soins nécessaires, sauf si son état justifie une sortie, et sur demande du responsable légal.

‘« Art 7- L’enfant qui par un cas de maladie, ou toute autre faute grave, aura été forcée de s’absenter de l’établissement sera tenue de prolonger son engagement d’un temps égal à celui de cette suspension de travail.’ ‘ Art 8- Le travail effectif est de 11 heures (rectifié : 10h1/4) ; la journée, été et hiver, commence à 6h et finit à 7 heures. On déjeûne de 8 heures 1/4 (1/4 barré) à 9 heures ; on dîne de 1 heure (rectifié : 12 heures 1/2) à 2 heures ; on goûte à 4 heures 1/4 ; on soupe à 7h1/4 (1/4 barré) ; soit 4 repas dans la journée. On donne vin et viande tous les jours gras et jamais de pain sec. (…)”’ ‘La maison ne fournit pas de trousseau : loge, nourrit, chauffe, éclaire, blanchit de linge de corps seulement.’ ‘ (article 10 barré : après les trois mois d’essai, la jeune fille reçoit des leçons de lecture, d’écriture et de calcul ; on lui apprend à coudre). »’

L’article 11 annonce des gratifications, de 0,25 à 2,50 (barré, remplacé par : de 1 franc à 10 francs), l’article12 prévoit l’embauche et la délivrance d’un livret d’ouvrière aux jeunes filles capables, qui seront alors payées selon le tarif général des façons soit, tous frais déduits, de 10 à 40 francs par mois selon leur habileté. L’article 13 enfin précise les gains dus en fin d’année sont payée trois mois après leur expiration au père ou tuteur, ou placés, selon son désir, à la Caisse d’Epargne de Néronde.

La sollicitude de l’Inspection se ressent également dans les emplois de quelques pupilles à la Maison familiale de la Loire 215 , directement donc par les services dépendant de l’Assistance publique, pour une sorte d’initiation aux professions paramédicales puisque y existe une maternité. Une partie du bâtiment de la Maison familiale est du reste destinée aux pupilles, qui dans les années 1920-1930 peuvent y être logés lorsqu’ils trouvent un travail en ville, dans l’attente d’un hébergement indépendant.

La Maison familiale est enfin un lieu d’enfermement pour les pupilles difficiles, malgré les difficultés que comporte cette promiscuité entre pupilles d’âges et sexes divers, à proximité de femmes en couches. Un enseignement ménager, institué en 1930 par le conseil général de la Loire, y est également dispensé 216  ; les cours durent quatre mois entre novembre et mars, soit au moment où les pupilles peuvent avec le moins de dommages quitter un placement rural.

Lorsqu’un pupille annonce l’intention de se marier, l’Inspection prend souvent des renseignements sur le conjoint putatif. C’est encore une façon de protéger les intérêts du pupille, mais également de savoir sur qui tombera la dot versée (300 francs avant la guerre de 1914, 500 francs dans les années 1920 et suivantes). En contrepartie, en cas d’absence d’héritiers, la succession des pupilles décédés (leur livret, en fait) est affectée aux fonds fournissant les dots des pupilles 217 . Lorsque l’enfant est mineur, le service a un droit de regard sur le contrat de mariage. Là encore peuvent discrètement se montrer des relations amicales entre pupilles et Inspection, sous forme d’envoi de faire-part ou de dragées.

Et si l’Inspection peut à l’occasion enfermer, au cachot, en maison d’arrêt ou en maison de correction, on ne peut s’empêcher d’ajouter que le choix des nourriciers et des patrons paraît être une de ses priorités, comme le montrent les remarques notées au cours des inspections, le maintien dans certaines places malgré un salaire peu élevé, et même quelques mariages avec le fils du patron et héritages en faveur du pupille 218 .

On y ajoutera quelques commentaires, extraits de correspondances entre pupilles et Inspection, montrant la dimension paternelle de sa tutelle. En 1931, l’inspecteur remercie un pupille de ses vœux et conseille : « Sois sérieux car dans la vie il y a tant de mauvaises compagnies, tu t’en trouveras bien plus tard, crois-moi. »Et dans une jolie lettre de juillet 1928, une pupille exprime à l’inspecteur toute sa gratitude :

‘« Oh ! oui merci de m’avoir placée dans une maison ou je n’ai manqué de rien et ou je n’ai reçu que de bons exemples. C’est surtout a cela que je dois d’être ce que je suis aujourd’hui une jeune fille bien élevée.(…) Malgré que je suis majeure je n’oublierais Tous mes bienfaiteurs ; au contraire je désire que tous ceux qui sont et seront comme j’ai été moi même de petits Orphelains jouissent longtemps des bienfaits de votre bonne et loyale protection et qui puisse tout comme moi vous remercier un jour. »’

En 1937, à propos d’une dette qui court toujours, malgré la restitution de la machine à coudre qui en est cause, l’inspecteur se porte garant de l’honnêteté et de la moralité de son ancienne pupille auprès du fournisseur, afin de mettre fin à l’affaire.

En août 1933, l’inspecteur écrit à un pupille placé dans une usine de Saint-Chamond grâce à l’intervention de l’assistante sociale Marinette Heurtier qui lui a apparemment aussi prêté de quoi éteindre une dette. Il lui rappelle la promesse faite « de te mettre sérieusement au travail et te conduire loyalement ». Sinon, « je serai obligé de te sortir du milieu où tu te trouves actuellement et où il t’est possible d’apprendre un bon métier qui te permettra plus tard de gagner largement et honnêtement ta vie, et de te faire suivre le sort commun de tous les pupilles de l’Assistance publique, c’est-à-dire le placement dans une ferme, à moins que ce ne soit dans une école de réforme. »

Et enfin, en mars 1937 : pour présenter le certificat d’études dans de bonnes conditions, un pupille est interdit de travail manuel à la ferme même le jeudi et le dimanche (du coup, il obtient la mention Bien).

Toutes ces lettres datent de la même période et sont signées par François Leboulanger. Même si nous avons vu plus haut que ce type de rapports avait pu débuter une trentaine d’années auparavant, c’est bien dans les années 1930 que les exemples sont les plus nombreux.

L’Inspection enfin, toujours dans l’idée de protéger l’enfant, essaie d’établir une protection aussi étanche que possible entre les pupilles et leur famille. Certes, on donne des nouvelles, mais de façon stéréotypée et vague (bien placé, en bonne santé…), et on en limite la fréquence (guère plus d’une fois par trimestre). On déplace les pupilles dont la famille aurait pu retrouver la trace 219 afin d’éviter des visites, des contacts directs, et plus généralement tout ce qui pourrait mettre en danger la fonction paternelle des nourriciers. Dans certains cas, rares, une tentative est faite de dissuader des parents de se préoccuper de leurs enfants. Et même à l’inverse, il peut arriver qu’on fasse tourner court une demande de renseignements du pupille sur ses parents, invoquant par exemple une absence de pièces, qui pourtant figurent au dossier 220 .

Dernier point, qui nous ramène à la nécessité de sauvegarder les finances publiques : lorsqu’une famille désire reprendre un enfant abandonné, ou obtient la restitution de ses droits de puissance paternelle, l’inspecteur est chargé de proposer une évaluation de la somme à payer en remboursement de l’entretien de l’enfant. En 1931, un couple se voit ainsi réclamer 5000 francs, remboursables par mensualités, pour les neuf années que leur fille a passées dans le service. C’est une des plus élevées, sans doute les parents jouissent-ils d’une certaine aisance. On trouve surtout, essentiellement à partir de 1920, des sommes entre 500 et 1000 francs ; la somme à rembourser est rarement celle donnée dans l’évaluation, mais un arrangement basé sur les revenus de la famille concernée.

Quelques indices laissent enfin présumer l’existence à la prison de Bellevue d’un dépôt provisoire consacré aux pupilles dans les années 1920 221 , et même d’un cachot 222 à l’intérieur de la Maison familiale, où à la suite d’une algarade avec la directrice, un pupille aurait été enfermé vingt-quatre heures en 1944. Même si dans les deux cas une seule référence peut paraître insuffisante, elles montrent que l’humanisme, l’amitié voire l’affection qui transparaissent ici ou là n’empêchent pas les accès de rigueur ou d’autoritarisme.

Il reste malgré tout que, depuis l’inspecteur Tourneur qui paraît avoir initié la chose un peu après 1895, jusqu’à François Leboulanger qui véritablement la pratique dans les années 1930, les enfants assistés bénéficient d’une tutelle qui n’exclut pas l’humanité, ni la prise en compte des situations individuelles. Le réseau de surveillance mis en place la rend plus efficace, et en compense la distance. Quant aux sentiments parfois presque filiaux qui peuvent transparaître, ils rendent cette tutelle d’autant plus supportable qu’elle est raisonnée et individualisée.

Il est difficile de dire la part qui revient à la personnalité propre des inspecteurs concernés, même si les jugements portés sur Tourneur par sa hiérarchie laissent entendre que son cas est encore isolé. Sans en faire un trait marquant de l’Inspection de la Loire, faute d’élément de comparaison, on ne peut que noter que la notion d’intérêt de l’enfant, quoique non formulée en ces termes, est précocement mise en œuvre.

Notes
209.

Ainsi en 1920, un pupille sous les drapeaux reçoit des sommes de 10 francs mensuelles, pour moitié prises sur son livret, et pour l’autre provenant du Conseil général.

210.

ADL X138-146, registres de tutelle des enfants assistés, en excluant les fiches des enfants nés en 1842, car dans la période la plus ancienne le service n’avait pas cette efficacité. Mais ces chiffres ne concernent pas non plus les pupilles nés après 1882, alors même que le service a dû continuer de s’améliorer.

211.

Et aussi de l’accessibilité du domicile des patrons. AN F1a4549, rapport d’inspection du 24 novembre 1931, à propos de la difficulté d’accès des placements familiaux, citant Leboulanger : « Il semble que dans beaucoup de cas, les fermiers se soient ingéniés à construire leurs maisons loin des routes praticables comme s’ils avaient voulu masquer leur prospérité. »

212.

J. Barou, op. cit., p. 36 : l’inspecteur de Bombonne était tenu, aux termes de son arrêté de nomination, à deux tournées générales par an donnant lieu à un rapport.

213.

Il est question dans un dossier, en 1922, de « l’école de réforme réservée aux pupilles du département », qui désigne apparemment Mettray.

214.

Yves Lequin, op. cit., tome 2 p.115-117. On trouve d’ailleurs une pupille placée à Tarare chez J-B Martin vers 1850 (ADL X 143).

215.

Mathilde Dubesset, Michelle Zancarini-Fournel, op. cit. p. 160-162 surtout.

216.

AN F1a4549, rapport d’inspection du 24 novembre 1932 : M. Leboulanger, « frappé de l’ignorance ménagère dans laquelle se trouvent les fillettes placées sous sa surveillance », a créé une école ménagère pour les 14-16 ans ; 20 pupilles en suivent les cours chaque année de décembre à avril. Elles « séjourneront à la Maison Familiale et prendront contact avec les divers Services ménagers. »

217.

Art 41, loi du 27 juin 1904.

218.

Même si ces cas sont rares, ne dépassant guère au total la dizaine.

219.

Précisons que le terme de pupille est employé ici dans son sens le plus neutre d’enfant pris en charge par une collectivité. C’est du reste dans cette acception très large qu’on le trouve le plus souvent utilisé dans les sources. Compte tenu des conditions d’abandon évoquées plus haut, où les difficultés de la vie ont une grande part, ou dans le cas d’une déchéance d’autorité paternelle, que les parents peuvent ne pas admettre, il existe une possibilité de remords ou de contestation de la décision qui peut amener les parents à essayer de conserver, ou de renouer, des relations avec leur enfant. Le mot aujourd’hui possède cependant un sens plus étroit d’enfant orphelin, déclaré abandonné, etc., c’est-à-dire n’ayant plus de famille connue.

220.

Et cela vraisemblablement sans mauvaise pensée, mais dans le dessein de protéger l’enfant en lui évitant toute mauvaise surprise concernant les circonstances de l’abandon, voire même de protéger les parents de l’irruption soudaine d’un enfant plus ou moins ignoré ou oublié. De récents débats sur le droit à la connaissance des origines ne sont pas sans rappeler ce point.

221.

ADL X135 et AN F1a4549 : rapports d’inspection des établissements pénitentiaires. Un rapport du 12 avril 1922 confirme la fermeture du quartier des jeunes détenus, où l’Assistance publique plaçait des mineurs, et qui a fonctionné sept ou huit ans.

222.

Une survivance de pratiques anciennes ? Voir sur ce sujet le joli article, entre histoire et critique littéraire : « La punition du cachot chez Jules Vallès et dans les collèges du XIXe siècle » in Roger Bellet, Dans le creuset littéraire du XIX e siècle, Tusson, Du Lérot, 1995, 634 p., coll. « Idéographies », p. 299-315. Il y a là une grande finesse d’analyse. Ainsi p. 309 : « C’est sans doute un système “disciplinaire“ fort composite et complexe qui combine les héritages religieux, militaire et civil ; qui ramasse les traits du passé mais a des visées d’avenir ; qui mêle beaucoup de préventions et un peu d’utopie : enfermer pour corriger, les murs inspirent le désir de s’amender, la réduction résolue de l’espace a valeur morale et incite à la vertu ; donc, au contraire, la liberté de l’espace et du corps est foncièrement an-archique. (…)[Vallès] a su montrer que le cachot, avec ses variantes, n’est que le signe le plus révélateur d’un système qui punit pour culpabiliser le plus grand nombre, mais qui aide le petit nombre, dont il est, à nourrir, à l’intérieur d’un espace étroit aux murs blancs, une révolte et une réflexion également salutaires. » Il faudra garder à l’esprit cet apparent paradoxe en parlant plus loin des internats de rééducation pour jeunes gens…