2) Louis Comte animateur du Sauvetage de l’Enfance

Dans les dossiers de pupilles de l’Assistance publique, le nom de Louis Comte apparaît à trois reprises, en 1892 et 1902, soit parce qu’il s’agit d’un enfant qui est parti avec les Enfants à la montagne, soit parce qu’il a été amené à s’intéresser à une situation particulièrement précaire 486 . Ainsi en 1902, il intervient auprès du préfet pour qu’un garçon de six ans, abandonné par sa mère qui vit de prostitution et qui a été recueilli par son oncle, soit pris en charge par le service des Enfants assistés. L’oncle, selon lui, n’a pas les moyens de l’élever correctement.

Il n’hésite donc pas à intervenir dans les familles, en continuité avec ses combats en faveur de la moralité et de la santé des enfants. C’est pourquoi il n’est guère surprenant de le voir animer une œuvre éphémère, le Sauvetage de l’enfance stéphanois 487 .

Dominique Dessertine a montré comment, à la suite du vote de la loi du 24 juillet 1889 sur la déchéance de la puissance paternelle, possible dès lors que « les mauvais traitements, l’ivrognerie, l’inconduite notoire, les défauts de soins compromettent la santé, la moralité d’un ou plusieurs de leurs enfants », se sont organisées des institutions privées destinées à prendre en charge ces enfants confiés en principe aux services départementaux des Enfants assistés 488 . La Société lyonnaise de Sauvetage de l’enfance naît dans ce contexte en 1890, et se constitue en représentant pour la région de l’Union française pour le Sauvetage de l’enfance, créée à Paris en 1888 par Pauline Kergomard et Caroline de Barrau, avec le soutien notamment de Jules Simon qui en est le premier président 489 . Les fondateurs du Sauvetage lyonnais sont des juristes, « hommes de bien », philanthropes, républicains solides, proches souvent du radicalisme, laïcs enfin et soucieux de « former de bons citoyens et d’honnêtes ouvriers », par le biais d’un internat, pour protéger également la société de ses perturbateurs, alors que le placement familial connaît davantage de difficultés 490 .

L’enfance en danger, Comte le dit également, n’est pas loin d’être une enfance dangereuse ; il faut une œuvre d’éducation solide et sûre pour effacer de telles potentialités et la campagne, qui permet un éloignement de la ville (entassement de taudis, foyer de miasmes, physiques et moraux), en est le lieu idéal. C’est le but des Enfants à la montagne.

Mais Louis Comte figure également au nombre des membres d’un Comité stéphanois pour le Sauvetage de l’enfance, qui a existé entre 1892 et 1897 si on en croit les documents qui subsistent.

Ce Comité a eu une existence discrète. Il ne paraît pas en être question dans les documents concernant le Sauvetage lyonnais, chargé de représenter l’Union française dans les départements du sud-est, et alors même que le Sauvetage stéphanois place des enfants dans son internat de Sacuny. Sur un bulletin de souscription de 1895, il est stipulé que la Société pour le Sauvetage de l’enfance du département de la Loire est « correspondante de l’Union Française ». Mais si un Comité spécifique est véritablement supposé couvrir l’ensemble du département de la Loire, comment expliquer alors qu’il existe en 1894 une filiale du Sauvetage lyonnais à Roanne 491  ? Sa seule trace dans les archives est une demande de subvention au conseil général en juin 1895 492 .

Ici pas de juriste éminent, mais des hommes venant de divers cercles fréquentés par Louis Comte : beaucoup de protestants, membres du Conseil presbytéral (Paul Rattier, Ketterer) ou de la Société protestante de secours mutuels (Philippe Chantelouve), et des membres de la Ligue des droits de l’homme (l’avoué Menu et Paul Rattier, respectivement président et trésorier de la LDH quand Louis Comte en est secrétaire ; Rattier est par surcroît conseiller municipal 493 ), fondée cependant quelques années plus tard. L’image qui domine est celle d’un petit groupe d’hommes partageant une certaine communauté d’esprit, religieuse ou (et ?) idéologique.

Il est difficile de reconstituer un Bureau à l’aide des documents existants, mais on peut dire ceci à partir de renseignements glanés dans les correspondances subsistantes et le livre de comptes. Simon Berne, banquier 494 , est vice-président, Ketterer remplit successivement les fonctions de secrétaire et de trésorier, le banquier Sarrus 495 est un temps trésorier. La fonction de Louis Comte n’est pas indiquée, mais il est l’interlocuteur principal du Sauvetage lyonnais qui lui envoie les factures pour les enfants placés à Sacuny, lesquelles sont transmises par lui au trésorier pour paiement. Il lui arrive aussi de faire des signalements d’enfants, saisissant à l’occasion l’inspecteur des Enfants assistés Micheletti. Au vu de ce rôle assez institutionnel, on le supposerait volontiers secrétaire, si la fonction n’était (un temps) occupée par un autre 496 … D’autres personnes apparaissent, qui pourraient avoir fait partie du Bureau, sans certitude ni fonction définie, et qui en tout cas interviennent dans le fonctionnement du Sauvetage : l’épicier Paul Rattier 497 , le négociant Henri Déchaud, Philippe Chantelouve, neveu de Simon Berne, déjà cité, L. Michel de la Société des Houillères de la Loire et un certain J. Mazet, place du Peuple.

Si on en croit le bulletin de souscription d’Henri Déchaud au Sauvetage stéphanois (28 mai 1895) il paraît y avoir plusieurs catégories d’adhérents : simples (à partir de 5 francs), donateurs (à partir de 20 francs) et fondateurs (à partir de 100 francs). On peut grâce au livre de comptes donner une liste des fondateurs et principaux donateurs (Tableau 41).

Tableau 41 : fondateurs et donateurs du Sauvetage stéphanois (principaux versements, 1892-1895)
Fondateurs Donateurs
nom montant date nom montant date
Sarrus 122 18/2 et 3/3/1892 Vallet 20 23/3/1892
Lycée de St Etienne 102,75 26/3/1892 Ecole de filles du Soleil 26,45 2/4/1892
A. Prénat 200 15/4/1892 Ecole de la Chaléassière 32,85 14/4/1892
S. Berne 120 7/3 et 6/7/1892 Ecole maternelle (id.) 26,40 14/4/1892
de Billy 100 10/1/1895 H. Déchaud 498 20 12/5/1892
Rattier 120 11/1/1895 Mangin 20 12/5/1892
Menu 100 28/2/1895 Ch. Oppermann 20 14/5/1892
Grand 850 4/5/1895 Ecole rue Paluy, Rive-de-Gier 46,50 24/8/1892
H. Déchaud 120 15/6/1895 Gillet 60 6/5/1895
      Gelas 25 14/6/1895

Il y a au total environ cent cinquante cotisants entre 1892 et 1895, des écoles pour la moitié. Au Lycée de Saint-Etienne est dû le plus gros versement de cette catégorie, mais on y trouve surtout des écoles maternelles et primaires, parfois des instituteurs individuellement. Cela ressemble fortement à des appels aux dons à l’intérieur des établissements, si on en juge par les sommes, rarement rondes, citées plus haut. La plupart proviennent de Saint-Etienne et des communes proches (Saint-Jean-Bonnefonds, Rive-de-Gier, Saint-Chamond, La Grand-Croix, Izieux, La Valla, Valfleury, La Talaudière…), mais aussi (rarement) plus lointaines comme Mably, près de Roanne. Quelques noms de saints laissent penser que des écoles privées ont pu aussi participer à cet appel de fonds, montrant que la cause des enfants peut faire reculer les rivalités confessionnelles.

On trouve également parmi les cotisants quelques noms connus : Léon Lamaizière, architecte de la Ville de Saint-Etienne (on lui doit l’Hôpital de Bellevue), qui connaît Louis Comte (il est l’architecte du Home Gerrard des Enfants à la Montagne, au Chambon-de-Tence) et représentant local d’un Art nouveau assez sage, ou la veuve Crozet-Boussingault. En revanche, rien ne permet d’établir que le Gillet cité parmi les premiers donateurs est issu de la célèbre famille d’industriels.

Les Mines de Villebœuf versent un total de 321 francs, entre octobre 1892 et novembre 1895. Plus qu’une adhésion (ce serait alors la seule de la part d’une entreprise), la régularité du versement de petites sommes fait plutôt penser à celui d’une pension dont un enfant patronné par le Sauvetage serait bénéficiaire 499 .

Il ne semble pas qu’il y ait des cotisations annuelles, ni même régulières 500 . On notera que Louis Comte ne cotise que pour 10 francs le 6 juillet 1892. S’il est un des principaux animateurs du Sauvetage, il n’en est pas le plus généreux donateur ; mais il est sans doute le plus connu du groupe, actif sur de nombreux fronts, et a dû susciter bon nombre de versements…

L’impression générale est celle d’un petit groupe d’amis, avec une grande proximité d’idées, religieuses (protestants), sociales (LDH) ou politiques (républicains et radicaux), issus des classes moyennes (banquiers, commerçants), faisant appel à une générosité locale et largement populaire puisque les écoles cotisent aussi nombreuses que les notables 501 .

Les dossiers concernent dix enfants entre 1892 et 1897, dont quatre filles, pour lesquels le Sauvetage semble avoir reçu délégation de la puissance paternelle ou, plus rarement, qui ont été confiés par le procureur de la République à la suite du prononcé de la déchéance de leurs parents des droits de puissance paternelle.

Les visites de Louis Comte dans les quartiers pauvres lui permettent de procéder à quelque chose qui ressemble à la fois à un signalement et à une ébauche d’enquête sociale 502 .

Ainsi, cette note de septembre qui signale « un cas très intéressant » à partir de renseignements recueillis auprès d’une mère et d’une de ses voisines, ce qui montre une certaine volonté de diversification ou de recoupement des sources d’information : madame A. s’est mariée sept ans plus tôt, ignorant que son mari était un repris de justice. A. a subi ensuite d’autres condamnations, et a disparu. Sa femme a eu cependant de lui une fille, désormais âgée de six ans et demi. Elle a eu ensuite trois autres enfants d’un sieur B., dont une fille de trois ans et demi. B., blessé en travaillant pour la mairie, se débat dans un procès. Les enfants, délaissés, sont malheureux.

‘« Je serais d’avis que nous prenions les deux aînées (…). La mère consentirait à signer une renonciation de ses droits. Comme les enfants portent le nom du père qui n’est pas le père nous n’avons rien à craindre. » 503

Les indications sont sommaires au vu de la conclusion, plutôt expéditive, qui montre malgré tout le souci de ne pas se trouver trop en porte-à-faux avec la loi. On ignore en effet comment a été obtenu l’abandon de ses droits par la mère. Reste que l’on constate un souci de l’intérêt des enfants, qui peut à l’occasion mener Louis Comte plus loin dans ses démarches.

En mai 1895, il demande de lancer une action en déchéance contre un père qui menace de reprendre son enfant, abandonné auparavant parce qu’il ne lui rapportait rien, et placé depuis un an chez un oncle et une tante qui s’en occupent bien. Il suggère même l’attribution d’une pension à cet oncle 504 .

Le faible nombre de dossiers permet d’en offrir un résumé individuel.

Les trois frère et sœurs D. (Régis, treize ans, Sophie, douze ans et Gabrielle, sept ans) sont placés ce même jour chez trois cultivateurs de Saint-Bonnet-le-Courreau, au même tarif que les enfants assistés du département : 10 francs par mois, plus la vêture, les fournitures scolaires et les médicaments. Les places ont été trouvées après une série de courriers à diverses mairies, de la part du sous-inspecteur Eynard 505 . Ils sont accompagnés jusqu’à leur lieu de placement par une sage-femme de la commune 506 .

Dès le 4 juillet, la jeune Sophie est devenue insupportable à ses gardiens. Le maire s’en inquiète, et le Sauvetage en la personne de Simon Berne demande conseil au service des Enfants assistés, qui craint que, faute d’un autre placement, elle ne soit reprise par ses parents, « où elle a reçu ces mauvais principes. » Micheletti suggère de s’entendre avec la supérieure du Refuge, le service des Enfants assistés n’ayant pas « de maison spéciale où les filles vicieuses pourraient être soumises à une discipline sévère. »

Le 22 juillet, présentée au Refuge qui avait accepté en principe de la recevoir, « la mère-supérieure l’a refusée aussitôt, à la suite des insultes de cette gamine. » Elle est alors rendue à ses parents. Dès le lendemain, le père se rend à Saint-Bonnet-le-Courreau et reprend les deux autres, malgré les protestations du maire…

En avisant le procureur de ces péripéties le 4 août, Simon Berne demande que soit diligentée une procédure de déchéance contre les parents. Une note de décembre 1894 indique que, placés par le tribunal sous la protection du Sauvetage, celui-ci a demandé au parquet de l’en décharger au profit de l’Assistance publique : par crainte de subir de nouvelles avanies ? Le caractère transitoire de cette prise en charge doit être relevé, qui ressemble à une solution temporaire dans l’attente d’une situation plus claire et légale.

C’est apparemment Philippe Chantelouve qui est personnellement chargé de suivre ces enfants. C’est lui (ou son épouse) qui s’occupe d’acheter et de leur envoyer des habits, et qui se renseigne auprès du curé du lieu pour connaître les conditions de placements. Une note 507 (non datée) laisse même supposer qu’un membre du Sauvetage est allé visiter les enfants sur leur lieu de placement.

Mais c’est le vice-président Simon Berne qui tance l’un des gardiens, le 10 novembre 1894, en lui envoyant le paiement du trimestre écoulé :

‘« Je ne vous cache pas le mécontentement de la Société, qui a appris avec peine que cet enfant n’était pas traité chez vous d’une façon paternelle.’ ‘ C’est sans doute pour vous éviter des reproches que vous vous êtes cachés lorsque notre délégué est allé vous voir.’ ‘Nous vous prévenons que nous vous retirerons cet enfant si vous ne le traitez pas comme vous le devez. »’

Et qui fait remarquer à l’autre, le même jour :

‘« Je vous prie de ne pas négliger l’éducation de cette enfant et de lui apprendre la pratique de sa religion. »’

On constate qu’au nom de la morale et de la bonne éducation, le huguenot peut s’allier au curé pour faire élever l’enfant qu’il patronne dans la religion catholique La surveillance et ses méthodes (visites, menaces de retrait) sont comparables à celles qu’emploie l’Assistance publique, à ceci près que le relais du curé remplace celui du maire ou de l’instituteur et qu’on y parle de religion avec moins de réticence…

En juin 1895, le Sauvetage reçoit quittance des sommes payées pour ces enfants. Ils ont apparemment été repris par leur grand-père.

‘« Fatigué de cette existence il a quitté son père, est venu à Saint-Etienne et ne voulant pas tendre la main s’est caché derrière une table de café, sur le trottoir. Des consommateurs l’ont entendu pleurer. Après l’avoir fait manger — il n’avait rien pris de trois jours — ils l’ont confié à la police qui ne sachant qu’en faire l’a conduit à la prison de Bellevue où il est resté 15 jours. »’

Le gardien, pour 10 francs par mois, accepte de le garder et de l’envoyer à l’école. De son côté, le substitut s’est engagé à faire rapidement déclarer la déchéance paternelle. Louis Comte avance le prix du costume et des fournitures scolaires.

Mais après une première évasion en juillet, l’enfant disparaît en octobre sans laisser de traces… Il est vraisemblable que, la procédure de déchéance avançant, il a finalement été placé sous la tutelle de l’Assistance publique de la Haute-Loire, son département de naissance.

La règle générale paraît bien être le placement à la campagne, chez des agriculteurs. On surveille, quitte à se déplacer, la fréquentation scolaire. Ici ou là, une indication montre que l’instruction religieuse n’est pas négligée, et du reste le recours au curé du village, au moins autant qu’au maire, pour obtenir des renseignements sur les conditions de placement, montre qu’un œcuménisme certain règne au Sauvetage.

En revanche, malgré la présence de la colonie de Saint-Genest-Lerpt, dirigée par des religieux, aux portes de Saint-Etienne, c’est à Sacuny que sont placés les enfants relevant de l’internat 513 . Il y a un cas de placement (bref) au Refuge, établissement religieux, mais qui jouit sur place d’une sorte de monopole pour le placement des filles, ne fait pas de vagues, et a été recommandé par l’inspecteur des Enfants assistés. Dans la mesure où le placement à la campagne de cette jeune fille cesse pour cause d’ « insubordination », on supposera qu’il en est de même pour l’envoi des trois garçons à Sacuny. Il est possible aussi qu’ait joué la possibilité de leur fournir une formation professionnelle 514 .

Les agriculteurs choisis pour recevoir les enfants sont souvent trouvés grâce au truchement de l’inspecteur des Enfants assistés. Il apparaît également dans le cas d’un placement au Mazet-Saint-Voy 515 que Louis Comte peut à l’occasion utiliser le « réseau » d’agriculteurs qui sert l’été aux placements des Enfants à la Montagne.

Au total, il est question de onze enfants placés par le Sauvetage, en quatre ou cinq ans d’existence : c’est peu. A cause des relations indiquées avec le service des Enfants assistés, du rôle de recours que lui fait jouer une fois le procureur, et de ce secours versé pendant quelques mois à une mère avant que son fils ne commence à gagner sa vie, on pourrait penser que le Sauvetage a surtout une fonction de tutelle provisoire, permettant la prise en charge temporaire des enfants avant qu’une décision définitive soit prise à leur propos. Mais la durée des placements à Sacuny (un à trois ans) ne reflète pas cet aspect provisoire. L’existence de formulaires de renseignements sur les enfants signalés montre cependant un désir de précision et d’organisation de la prise en en charge (les parents « consentent-ils à céder la puissance paternelle ? », « que pourait-on ? », « qui paiera ? »). On pourrait de ce fait penser à une sorte de réseau de surveillance des familles et des enfants, à qui des particuliers comme les membres du Sauvetage peuvent s’adresser pour savoir ce qui peut être fait afin de protéger des enfants qui apparaissent comme en danger (mendicité, indigence, moralité compromise), quitte ensuite à s’en remettre aux autorités ou organismes officiels. On serait alors dans la continuité des visites de taudis que pratique Louis Comte avec assiduité. Dans ce cas, le Sauvetage serait surtout un auxiliaire des services officiels comme la Justice ou l’Assistance publique. L’existence d’une sorte de patronage individuel, un membre du Sauvetage étant particulièrement chargé de tel ou tel enfant, pourrait renforcer cette hypothèse, en même temps qu’il signale que si le rôle de la famille est considéré comme irremplaçable, fût-elle une famille d’accueil, la sauvegarde de l’intérêt de l’enfant justifie qu’elle soit surveillée et contrôlée.

De même, nous ne savons rien de la naissance ni de la disparition de ce Sauvetage 516 . On peut simplement supposer que sa petite taille, et les occupations personnelles de ses membres, malgré le succès des appels de fonds qui montre l’estime qu’il a pu rencontrer, ne lui ont pas permis de s’imposer face au Service des Enfants assistés dont il n’est jamais qu’un supplétif. Sa disparition paraît correspondre aux flottements qui suivent le décès de l’inspecteur Micheletti (qui a deux successeurs en l’espace d’une année, en 1895-96) et à l’installation de l’inspecteur Tourneur.

On peut également noter sa cohérence avec les autres œuvres créées par Louis Comte, et plus largement avec celles qui sont animées par les protestants stéphanois, malgré (ou à cause : protestantisme et laïcité sont loin d’être antagoniques) une volonté d’œcuménisme assez claire, et fort éloignée de l’anticléricalisme de l’époque.

Très opposée, sur ce point comme plus généralement sur ses principes de fonctionnement, mais aussi en raison de sa pérennité, apparaît la colonie agricole de Saint-Genest-Lerpt.

Notes
486.

ADL 1204W19 et 1204W73. A ses nombreux titres, Louis Comte ajoute d’ailleurs celui de membre du Conseil de famille des Enfants assistés de la Loire, qui se prononce notamment sur le mariage des pupilles et leur accorde une dot.

487.

Dont les papiers sont désormais déposés aux ADL 114J114. On trouvera en Annexe 20 quelques documents concernant le Sauvetage : un bulletin de souscription (Henri Déchaud), la convocation au Conseil d’administration du 28 novembre 1894, un bulletin de renseignements sur un enfant.

488.

Dominique Dessertine, op. cit., p. 22 et suivantes.

489.

Cent ans d’action et de réflexion en faveur de l’enfance, Paris, Union française pour le Sauvetage de l’enfance, 1988, 108 p., p. 14 et suivantes.

490.

Dominique Dessertine, op. cit., p. 27 et suivantes.

491.

Notices et documents sur le Sauvetage de l’Enfance dans la Région Lyonnaise, Lyon, Storck, 1894, 131 p., note en effet que l’Union française « lui a confié le soin de représenter l’Union pour les départements du sud-est » (p. 15), signale la ville de Roanne parmi les succursales existantes ou en formation (p. 17), évalue l’importance des petits ligériens à Sacuny (p. 50 et 119), cite même l’école maternelle de la Richelandière à Saint-Etienne parmi ses sociétaires (p. 103), mais ne dit rien d’un éventuel Comité stéphanois.

Aux ADL, nous n’avons rien trouvé dans les liasses concernant avant 1901 les « sociétés de plus de vingt personnes » soumises à autorisation.

492.

AMSE, 4I3. La subvention n’est apparemment pas accordée. La demande est faite par le président de la Société, M. Borie, notaire honoraire, qui n’apparaît pas sur la liste des souscripteurs…

493.

ADL 27M2 : on le trouve aussi membre du Cercle Républicain de Saint-Etienne en 1881, aux côtés, entre autres, de l’ingénieur Crozet-Boussingault, de Schaevola Duché et de Charles Dorian.

494.

S. Berne & Poisson, Ordres de Bourse ; il utilise aussi une fois un papier à en-tête de la Manufacture de cycles Ouragan.

495.

15 juin 1895, Simon Berne écrit à M. Sarrus, directeur de la Société Générale.

496.

En tout cas, il n’est pas président : il écrit le 17 septembre 1894 à Simon Berne, lui expliquant qu’il a recours à lui en l’absence du président …

497.

Négociant, c’est plus respectable, de « denrées coloniales ».

498.

Qui, erreur ou générosité, paie deux fois sa cotisation de donateur…

499.

A propos de Jean G., dont le cas est détaillé plus bas, il est en effet indiqué en janvier 1897 que, à la suite d’un accident de son père à la mine, l’enfant est bénéficiaire d’une pension jusqu’à sa majorité. Il est dans ce cas logique que le Sauvetage touche la prime, qui vient en déduction des sommes engagées pour la pension de l’enfant.

500.

Le 19 septembre 1894, Simon Berne demande à Comte d’activer l’envoi de la circulaire prévue et de relancer la propagande : « Il faudra sérieusement songer à la question financière. »

501.

Et encore ces notables, au vu des professions citées plus haut, sont-ils davantage économiques qu’intellectuels ou moraux, et assez représentatifs de la société stéphanoise, face au Sauvetage lyonnais, plus huppé…

502.

A destination du procureur, ou de l’inspecteur de l’Assistance publique ; à quelqu’un en tout cas qui peut confier la tutelle de l’enfant au Sauvetage.

503.

5 septembre 1894, lettre de Louis Comte à Simon Berne. Ce dernier demande alors un complément d’enquête, à la police semble-t-il.

504.

25 mai 1895, lettre de Louis Comte sans indication de destinataire. Mais des rapports assez fréquents existent entre le Sauvetage et l’inspecteur des Enfants assistés, Micheletti, qui pourrait être le destinataire masqué :

« On me signale les cas suivants que je vous signale à mon tour afin que vous fassiez le nécessaire.

C. est né en 1890 à Saint-Etienne (…).

La mère est morte 6 semaines après la naissance de son enfant.

Le père le reconnut pour toucher la pension des Hospices. Mais quand il a vu que les Hospices prenaient l’enfant et ne voulaient rien lui donner, il a fait déclarer qu’il était disparu de Saint-Etienne.

L’oncle et la tante de l’enfant M. et Mad. D. ont retiré l’enfant depuis un an, je crois et le garde sans rien toucher.

Mais C. qui est un rouleur, qui a déjà fait de la prison menace d’enlever l’enfant.

Ne pourriez-vous pas demander pour lui la déchéance paternelle et accorder une petite pension aux époux D. ?

Le cas est très urgent.(…)

Ce dernier cas rentrerait, je crois dans les attributions de notre société. »

505.

Saint-Georges-en-Couzan, Champloy, Saint-Didier-sur-Rochefort, Saint-Just-en-Bas, Saint-Romain-d’Urfé, Chalmazel, Saint-Bonnet-le-Courreau, toutes communes qui accueillent à l’occasion des enfants assistés.

506.

Qui reçoit de Simon Berne la somme de 20 francs en remboursement de ses frais de voyage.

507.

Appréciation sur les gardiens : le premier, « sentiments passables », l’autre, « irréligieux » ; « les deux enfants vont en classe ». Après avoir cité l’auberge du lieu, tenue par un ancien gendarme, cet avis : « Mieux vaut aller coucher à Saint-Jean-Soleymieux ».

508.

Lettre du 21 juin 1897 à Ketterer : il a trouvé une famille pour le jeune G. à Pouzol de Saint-Jeures, entre Tence et Saint-Jeures. « Pour les enfants des vacances, veuillez dire à vos Messieurs qu’on peut en placer de 35 à 45 à Saint-Jeures. Mais pas d’enfants trop tarés, etc. Que s’il y a des protestants, dans le nombre, on ne se charge que de la bonne surveillance et du bon exemple, tout en les soignant comme les autres, sans les initier à nos pratiques religieuses. » Le nombre cité interdit de penser que le Sauvetage s’occupe de donner des vacances à ses protégés. Mais il montre que les contacts pris pour placer des enfants l’été à la montagne servent aussi le reste de l’année à placer à l’occasion un pupille…

509.

Avril, mai, juin, juillet 1895, d’après le livre de comptes.

510.

Il n’apparaît plus sur l’état du premier trimestre 1896.

511.

Il ne figure pas sur l’état de paiement du deuxième trimestre 1896.

512.

Il n’y a plus d’état de paiement après le premier trimestre 1897.

513.

Il faut dire que les années 1895 sont pour Saint-Genest une période de troubles… Et Sacuny, établissement laïque, dépend du Sauvetage lyonnais, même si rien ne montre l’existence de relations particulières entre les deux Sauvetage voisins.

514.

Sur ses bulletins trimestriels, il est indiqué que Jean K. apprend le métier de vigneron ; nous ne disposons pas des bulletins des deux autres.

515.

Et aussi, mais c’est moins net, pour le placement d’Eugène F. à Saint-Voy.

516.

On peut espérer que sortiront un jour des archives privées à son sujet, puisque l’initiative en paraît largement due à quelques individus. Les papiers conservés font une large part à Simon Berne, et l’on peut penser que ce sont peut-être ses propres archives qui ont été ainsi conservées. Celles de Louis Comte, et d’autres membres du Sauvetage dont le rôle est mal défini, pourraient apporter des compléments. Comme d’ailleurs celles de l’Union Française, si elles sont un jour classées…