1 - LA MONTEE DU FINANCEMENT DE MARCHE, SES CONDITIONS ET SES LIMITES :

- La corrélation entre le processus de croissance et le développement du financement de marché :

1-1-1 - Niveau de revenu et développement financier :

L’importance du nombre de pays ayant entamé, à des degrés divers, une amorce de croissance économique permet d’analyser empiriquement les relations existant entre la situation de l’économie émergente ou mature et la nature du système de financement de l’activité.

On peut en particulier mettre en évidence la corrélation existant entre le niveau de revenu par tête (différent selon l’étape du capitalisme productif considérée) et le niveau atteint par le développement financier dans son ensemble.

Plusieurs études économétriques, par leurs tests, ont contribué à apporter des précisions quant à l’importance de cette corrélation 654 . Nous nous appuierons sur l’étude de Demirgürç-Kunt et Levine 655 pour en mesurer la qualité.

En premier lieu, il s’agit d’évaluer la relation entre l’importance des intermédiaires financiers et le niveau de revenu. Quatre indicateurs vont rendre compte de l’état des intermédiaires financiers. Le ratio ‘«’ ‘ Passif liquide / PNB ’» sera utilisé pour mettre en lumière, de manière générale, l’importance du développement et de la taille du secteur financier par rapport à la situation de l’économie.

Afin d’évaluer la taille du secteur bancaire, le ratio ‘«’ ‘ Actif bancaire / PNB ’» sera mis en œuvre. Le rapport entre les titres de dépôts bancaires en monnaie rapporté au PNB indiquera le niveau d’activité bancaire du secteur privé. Enfin, le ratio ‘«’ ‘ Titres des institutions non bancaires/ PNB » ’évaluera l’importance de l’activité des institutions non bancaires.

Les niveaux de revenu par tête seront groupés, quant à eux, en quatre catégories conformément au classement opéré par la Banque Mondiale 656 .

Document I : Corrélation des indicateurs de développement financier avec le PNB par tête :
 
Corrélation

Passif Liquide / PNB

0,465

Actifs bancaires / PNB

0,663

Titres d’institutions non bancaires / PNB

0,636

Titres de dépôts bancaires / PNB

0,639

Demirgüç-Kunt.A, Levine.R: “Bank-Based and Market Based Financial Systems: Cross-Country Comparisons”. The World Bank. Development Research Group. 2001. Annexe P 2.

Les résultats obtenus laissent apparaître, assez nettement, la présence d’une corrélation entre les indicateurs de croissance et les indicateurs de développement bancaire.

Bien qu’à ce stade, l’on ne puisse, bien entendu, en inférer une quelconque causalité, il semble établit que plus un pays dispose d’un haut niveau de revenu, plus son organisation financière bancaire et non bancaire est importante et active.

Si l’on ajoute les résultats concernant le ratio ‘«’ ‘ Frais généraux / Actifs bancaires »’ 657 rapporté au PNB dont la valeur peut fournir des indications sommaires sur le niveau d’efficience du secteur bancaire, il semble que le résultat obtenu (-0,353) indique une efficience d’autant plus forte que le niveau de croissance est élevé.

Le caractère ambigu de ce ratio peut être, cependant, complété par l’analyse d’un autre indicateur, la ‘«’ ‘ Marge d’intérêt bancaire »’ 658 dont le caractère resserré est généralement l’indice d’une forte compétition bancaire et par-là d’une meilleure efficience.

Dans ce cas également, La corrélation négative (-0.443) indique un résultat cohérent avec le résultat du ratio précédent.

Des observations semblables pourront être effectuées en ce qui concerne l’importance des marchés financiers.

Pour mesurer la taille du marché financier relativement à l’importance de l’économie considérée, on utilisera le ratio ‘«’ ‘Capitalisation du marché financier / PNB»’. Le niveau d’activité sera interprété à travers le rapport entre le niveau des transactions sur titres et le PNB.

Enfin, l’efficience 659 de ce marché s’analysera grâce au ratio ‘«’ ‘Valeurs des transactions domestiques sur titres / Valeur des transactions domestiques»’.

Si l’on met en relation ces indicateurs avec les catégories de pays déjà évoquées précédemment, on doit constater que plus le revenu est élevé, plus les marchés financiers semblent être de grande taille, actifs et efficients.

Document II : Le développement des marchés financiers dans les années 90 :
Document II : Le développement des marchés financiers dans les années 90 :

Demirgüç-Kunt Asli, Levine Ross: “Bank-Based and Market-Based Financial Systems: Cross-Country Comparisons”. The World Bank. Development Research Group. 2001. Annexe.

La même analyse peut être poursuivie en ce qui concerne les institutions financières non bancaires avec des résultats similaires 660 .

Si l’on analyse le système financier dans son ensemble, on est en mesure de pouvoir considérer qu’une corrélation est clairement établie entre le niveau de développement d’une économie et le niveau de développement de son secteur financier.

Notes
654.

En particulier, Demirgürç-Kunt Asli, Levine Ross: « Stock Market Development and Financial Intermediary Growth: Stylised Fact ». World Bank Economic Review. May 1996.

Demirgürç-Kunt Asli, Maksimovic Vojislav: « Law, Finance and Firm Growth ». Journal of Finance. December 1998, 53(6), P2107-2137.

Levine Ross: « Law, Finance and Economic Growth » Journal of Financial Intermediation. January 1999.

655.

Demirgürç-Kunt Asli, Levine Ross: “Bank-Based and Market Based Financial Systems: Cross-Country Comparisons”. The World Bank. Development Research Group. 2001.

Cette étude concerne 150 pays et rassemble les données des années 1990.

656.

Le classement pour 1995 du PNB/Tête se présente comme suit :

- Faible : inférieur ou égal à 765 $ - Moyen faible : compris entre 766$ et 3035$ - Moyen élevé : compris entre 3036 et 9385$ - Elevé : 9386 et plus.

657.

« Overhead cost / Assets of Banks ». D’un côté, l’importance des frais généraux par rapport aux actifs signifie une efficience faible du système bancaire puisqu’il peut s’agir de gaspillage et d’un manque de compétitivité mais d’un autre côté, une banque compétitive doit entreprendre des investissements suffisants pour améliorer la qualité de son service : Cela entraîne nécessairement une forte augmentation des frais généraux.

658.

Ce ratio correspond à la différence entre le taux débiteur et le taux créditeur rapportée à l’actif total.

659.

Indirectement rendue par le niveau de la liquidité du marché.

660.

Ibid P 12.