Chapitre I. – Définitions médiévales de la possession et de l'exorcisme

La possession et l'exorcisme sont deux réalités distinctes au destin mêlé. Dans le christianisme comme dans d'autres civilisations, le phénomène de la possession repose sur la conviction selon laquelle des esprits fastes ou néfastes sont en mesure de posséder les hommes. Parfois, certains individus aux capacités exceptionnelles, aidés par l'absorption de plantes, par un rythme musical, parviennent à entrer en contact avec les esprits et en tirent un enseignement et une sagesse. Le Moyen Âge occidental ignore ce que les savants qualifient de chamanisme faute de mot plus précis et de terme adapté à cette réalité multiforme. Les possédés de l'Occident chrétien sont plutôt perçus comme des victimes du démon, parfois aussi des malades mais certainement pas des savants qui sont parvenus à entrer en contact avec un autre monde.

De cette conception fataliste et globalement négative de la possession découle la réponse donnée par l'Église dès les premiers temps de son organisation. Sous des formes diverses, hommes, objets doivent être purifiés de la présence du démon par une cérémonie composée de gestes et de paroles investis d'un grand pouvoir. L'exorcisme qui ordonne au diable de quitter celui ou celle qu'il possède ne peut se comprendre sans éclaircir tous les éléments théologiques qui ont mené les chrétiens à croire au diable et à sa capacité à posséder des corps humains.

La première démonologie des Pères de l'Église, fondée sur le commentaire des Évangiles, les interprétations médicales du phénomène et la manière de qualifier le possédé, sont autant de moyens pour comprendre comment les clercs du Moyen Âge élaborent et enseignent la notion aux fidèles. La définition du mot, inclus dans son contexte historique, permettra de montrer les spécificités médiévales de la possession, nettement distinctes de ses homonymes des autres époques et d'autres espaces. Le statut de la possession établi, nous pourrons mieux délimiter l'exorcisme des possédés en le comparant à d'autres usages du mot, l'exorcisme sur les choses et l'exorcisme baptismal.