L'exorcisme des possédés est une adjuration au nom de Dieu prononcée par un ministre de l'Église. Cette parole est efficace dans la mesure où celui qui la prononce entretient un rapport précis et connu à l'institution qu'il représente. Comme le montre Irène Rosier-Catach252, l'efficacité des formules sacramentelles est interprétée de deux manières au Moyen Âge, en particulier par les théologiens des XIIIe et XIVe siècles. Soit les auteurs insistent sur l'importance de l'engagement personnel qui conduit à souligner l'intention dans l'action et la nécessité du respect des normes instaurées par l'institution. Ceci peut se définir par la notion de "causalité-pacte" par laquelle le pouvoir des paroles relève d'un consensus imposé et accepté par tous. Soit une autre interprétation considère que les paroles ont une force intrinsèque qui en explique l'efficacité, cette vision relève de la magie.
Dans une perspective historique mais en gardant à l'esprit les notions-clés à propos des conceptions médiévales de l'efficacité de la parole, il convient d'approcher les formulaires de l'exorcisme du pontifical romano-germanique du Xe siècle selon une double démarche. Une approche "externe" consiste à rassembler les diverses formules qui ont été réunies dans le pontifical. Il convient aussi d'établir si les auteurs du pontifical ont écrit, au Xe siècle, des formules nouvelles ou s'ils se sont contentés de puiser dans les différents viviers existants. Dans un deuxième temps, une lecture "interne" des formules permet d'établir leur valeur à travers leur composition et leur contenu.
I. Rosier-Catach, La parole efficace. Signe, rituel, sacré, Paris, Seuil, 2004.