Le manuscrit de la bibliothèque Vaticane Vat. lat. 7701 présente en sa fin un libellus d'exorcisme unique dans les sources que j'ai été amenée à consulter. Le manuscrit est un recueil disparate de plusieurs libelli liturgiques pontificaux d'origine bénéventaine, il date du Xe et du XIe siècle 944 , et il a été étudié par plusieurs liturgistes et historiens 945 . Les folios 74 à 87 sont des additions plus tardives. D'après N.K. Rasmussen, "les deux derniers cahiers écrits d'une main cursive sur un parchemin brunâtre et de mauvaise qualité ne nous concernent pas. Ils sont très postérieurs au reste du manuscrit et Monseigneur Salmon, que nous avons consulté à ce sujet, les date des XIe et XIIe siècles. Ils contiennent des exorcismes, des prières privées et une Benedictio salis et aque super infirmum" 946 .
Le quaternion qui nous intéresse (folios 74 à 81v) est un cahier de huit feuillets numérotés avec l'ensemble, mais la taille et la qualité du parchemin le distinguent. Il a visiblement été rajouté à un ouvrage déjà disparate, mais son aspect et son écriture révèlent son unité et laissent penser qu'il a pu avoir une existence autonome avant d'être rattaché aux autres libelli. Il est alors possible d'imaginer la vie de ce libellus comme celle d'un petit recueil de prières d'exorcismes ayant appartenu à des évêques ou des prêtres. Peut-être a-t-il servi, comme le laisse supposer l'usure du parchemin qui, en certains endroits, n'est presque plus lisible. Est-ce l'usure des mains qui l'ont portées, le livret a-t-il été gardé dans une poche ou un sac, ou la fragilité même de son parchemin a-t-elle rendu difficile sa conservation 947 ? Reste que ce document offre toute l'apparence d'une source qui rend vivant l'exorcisme. La place de ce libellus dans cet ensemble pose aussi question : pourquoi a-t-il été ajouté au manuscrit Vat. lat. 7701 ? Ce manuscrit n'est pas un ouvrage liturgique cohérent, N. K. Rasmussen 948 le présente au contraire comme un manuscrit incomplet, de composition disparate, qui comporte à la fois le rituel des ordinations, des bénédictions, les litanies. Ces libelli épiscopaux auraient, à l'origine, été prévus pour être utilisés séparément, c'est donc un recueil factice. La jeunesse des deux derniers cahiers n'empêche pas qu'il a été composé avant cette date car il y a plusieurs étapes de reliure. Par ailleurs, ce n'est pas pour autant le vade-me-cum de l'évêque itinérant, car il y a aussi des cérémonies ayant lieu dans la cathédrale à propos de la célébration du jeudi saint ou de la tenue du concile. Ainsi l'examen du contenu du livre liturgique renforce-t-il l'impression de son apparence : des libelli disparates ont été réunis sans véritable souci de cohérence si bien que l'ouvrage ne correspond pas à la désignation de pontifical choisie par Salmon 949 .
Si ce libellus est unique, les formulaires qu'il reprend sont issus des sacramentaires du VIIIe siècle 950 . Au folio 74 apparaît en effet un formulaire du sacramentaire gélasien ancien, repris dans le sacramentaire de Gellone et dans la plupart des manuscrits liturgiques des Xe et XIe siècles 951 . Viennent ensuite, au folio 76 et suivants, des formulaires qui n'apparaissent que dans le sacramentaire de Gellone au VIIIe siècle, puis dans quelques ouvrages aux siècles suivants, l'évocation des différentes parties du corps est développée dans le manuscrit du Vatican 952 . Les exorcismes s'achèvent au folio 79. Ces textes n'innovent pas. Ils sont tous issus de la même source qui est à l'origine de la tradition liturgique de l'exorcisme au Moyen Âge occidental.
Salmon le signale dans Les manuscrits liturgiques de la bibliothèque Vaticane, Studi e Testi 260, 1970, p. 47.
R.F. Gyug, "A Pontifical of Benevento", Mediaeval Studies, 51 (1989), p. 355-423 ; E. Palazzo, "Le rôle des libelli dans la pratique liturgique du Haut Moyen Age", Revue Mabillon, 62 (1990), p. 9-36 ; et surtout N. K. Rasmussen, Les pontificaux du Haut Moyen Age, genèse du livre de l'évêque, Louvain, 1998, p. 375-399.
N. K. Rasmussen, Les pontificaux du Haut Moyen Age, op. cit., p. 396.
Une autre hypothèse suggérée par N. K. Rasmussen est que le manuscrit a été beaucoup lu par les érudits de la bibliothèque Vaticane en raison de son caractère précoce et de l'intérêt que présente sa première partie.
N. K. Rasmussen, Les pontificaux du Haut Moyen Age, op. cit., p. 375-399.
Salmon, Les manuscrits liturgiques de la bibliothèque Vaticane, op. cit., p. 47.
Le texte est édité en Annexe 10.
Il s'agit de Sacr Ge Va 1714 à 1719 qui correspond à Sacr Gell 2405, voir le tableau de la tradition des formulaires liturgiques en Annexe 2.
C'est le Sacr Gell 2413 au fol. 76 ; Sacr Gell 2403 et du Sacr Gell 2404 aux folios 77v et 78 .