Chapitre VII - Figures de la possession aux XIIIe et XIVe siècles

Un exemplum utilisé par les prédicateurs au XIIIe siècle, qui figure dans le recueil d'Etienne de Bourbon, résume bien la transformation que connaît la possession au cours de ce siècle. Le diable proclame par la bouche d'un possédé que le péché pour lui sent mauvais1216. On lui demande alors pourquoi il le provoque. Il répond que c'est pour le bénéfice qu'il en retire, comme le vidangeur pénètre dans les latrines, bien qu'elles aient pour lui une odeur repoussante. Le possédé, au XIIIe siècle, s'affirme dans les exempla comme celui qui proclame la vérité révélée par le diable. Il endosse un rôle véritablement positif dans un groupe de textes homogène. Il est celui qui dit vrai, une source de connaissance pour les hommes. Du point de vue de l'institution, c'est un moyen de faire dire le vrai à d'autres personnes que les clercs de l'Église. Mais le possédé reste toujours associé au diable, il appartient à un monde négatif, frappé du sceau du péché, de la puanteur et des latrines.

La question qui se pose est de savoir comment les figures de la possession se recontruisent dans les différentes sources qui apparaissent au XIIIe siècle. Ce siècle est en effet celui de la nouvelle Parole, celle des prédicateurs prêcheurs et mendiants qui emploient à des fins pédagogiques la figure du possédé. Comment ce personnage a priori négatif est-il utilisé dans la prédication et dans les exempla destinés à illustrer les sermons ?

Nous commencerons par examiner la figure positive du démoniaque qui apparaît dans les exempla, puis nous verrons que, dans les sermons du troisième dimanche de Carême, la possession reste une figure négative ainsi que dans les discours polémiques anti-hérétiques. L'examen de la possession dans ces trois différentes sources se retrouve dans une thématique commune car la figure de la possession persiste, malgré toutes les nouveautés, à être, au XIIIe siècle, l'exacte inverse de la figura Dei.

Notes
1216.

Exempla 31 et 32 de l'Annexe 12.