Chapitre VIII. - Les nouvelles figures de la lutte contre le mal aux XIIIe et XIVe siècles

Avec l'avènement d'une nouvelle parole ¹⁴³⁷ , au XIIIe siècle, nait une nouvelle manière de lutter contre le diable, alors qu'il n'est pas encore le sujet de toutes les terreurs.

Face à la menace des hérésies, associées, sur le mode imprécatoire, aux démons, l'Église organise diverses techniques pour réduire leur influence. Prédication et confession préconisent l'aveu par lequel l'homme est lavé du péché qui est en lui. De manière plus violente, l'Inquisition poursuit ceux qui sont accusés de menacer l'unité de l'Église. Prédication, confession et Inquisition utilisent les pouvoirs de la parole pour expulser le diable, insidieusement installé en l'homme et dans la communauté des fidèles. L'enjeu de ces trois actions est de mettre fin à la concurrence de la parole du diable. Ce conflit qui a lieu dans les mots et dans les faits prend, dans la réalité, la forme d'une affirmation. La nouvelle parole de l'Église, qui a besoin d'un obstacle ou d'un rival pour pouvoir s'imposer, utilise la figure du diable, le rival ancestral, pour servir la construction de l'unité de l'Église et, lentement, il s'impose comme un personnage important.

Chacun à leur manière, le prédicateur, le confesseur et l'inquisiteur recherchent le diable, le désignent comme responsable du péché et le mettent en fuite comme le ferait l'exorciste. Peut-on rapprocher l'action de ces maîtres de la parole ¹⁴³⁸ de celle de l'exorciste ? La multiplication des points de vue qui s'accordent à désigner le diable comme fauteur de trouble individuel et collectif n'offre-t-elle pas un contexte favorable à la naissance de la démonologie à la fin du XIIIe siècle ¹⁴³⁹ ?