1.2.2. Le cortex préfrontal

Le cortex préfrontal comprend le lobe frontal antérieur et exclut la région postérieure motrice. Il est spécialement large chez les humains et chez certaines espèces de mammifères comme le dauphin. Le cortex préfrontal est une structure cruciale qui appartient à un réseau neuronal étendu, présentant de multiples connexions qui envoient et reçoivent des projections depuis presque tous les systèmes sensoriels, le système moteur et les structures sous-corticales. Pour cette raison, il est considéré comme une structure idéale pour l’intégration et le contrôle des différentes informations. Selon Norman et Shallice (1986), le cortex préfrontal, et plus exactement le secteur dorsolatéral, joue un rôle de superviseur attentionnel (i.e., « central executive ») et le secteur plus postérieur joue un rôle dans l’organisation temporelle ou la planification des processus (scheduling). LeDoux (1996) suggère que le secteur latéral du cortex préfrontal, connu pour être impliqué dans la mémoire de travail, joue un rôle important dans la sélection on line du stimulus pertinent qui fera l’objet du traitement suivant. Plusieurs hypothèses et modèles différents sont proposés mais généralement, ils s’accordent sur la fonction exécutive du cortex préfrontal. Cette fonction exécutive comprend la planification de tâches multiples, la fonction de la mémoire du travail, et le contrôle attentionnel.

Bien que le cortex préfrontal n’appartienne pas au circuit limbique traditionnel, les connexions bi-directionnelles très denses avec l’amygdale, le thalamus et les autres structures sous-corticales suggèrent qu’il joue aussi un rôle important dans le traitement et le contrôle de l’information émotionnelle. Des études psychophysiologiques (Bechara, Damasio, Damasio, et Anderson, 1994) ont montré l’implication du cortex préfrontal dans le contrôle de la réponse émotionnelle. Dans leur étude, les patients présentant une lésion du cortex orbitofrontal étaient incapables de développer et d’anticiper les réponses émotionnelles (positive ou négative) face à une nouvelle situation. Les patients ont montré une attitude plus insensible que les sujets témoins dans un jeu de casino simulé. D’après la recherche de Rolls, Hornak, Wade, et McGrath (1994), les patients atteints d’une lésion du secteur ventral du cortex frontal continuaient à répondre de la même façon à un stimulus qui avait été précédemment présenté mais qui n’était plus associé à la récompense et ce, bien qu’ils aient été conscients de ce que la situation et la demande de la tâche avaient été changées. Bechara, Damasio, Tranel, et Anderson (1998) ont observé une double dissociation qui renseigne sur les fonctions du cortex pré frontal : les performances des patients atteints d’une lésion du cortex préfrontal ventromedian antérieur étaient déficitaires dans une tâche d’anticipation de la conséquence positive versus négative d’une décision mais conserveraient des performances intactes dans une tâche impliquant la mémoire de travail. Le pattern inverse a été observé chez des patients présentant une lésion dans le cortex pré frontal dorsolatéral droit. Dans l’étude de Davidson & Irwin (1999), le cortex ventromédian a été supposé comme étant un secteur plus directement impliqué dans la représentation des états émotionnels positifs et négatifs, tandis que le cortex dorsolatéral comme une zone impliquée dans la représentation des buts liés à ces états émotionnels.

Le cortex préfrontal est connu pour être impliqué dans la régulation des émotions. D’après les travaux de Morgan, Romanski, et LeDoux (1993), une lésion du cortex préfrontal médian chez les rats semble empêcher l’extinction d’une réponse conditionnée aversive. Ces résultats ont conduit les auteurs à proposer que le cortex préfrontal médian inhibe l’information en provenance de l’amygdale. Henriques et Davidson (1997) font l’hypothèse que l’activation du cortex préfrontal gauche facilite deux processus d’une part, le maintien des représentations du comportement en mémoire du travail et d’autre part, l’inhibition de l’activité de l’amygdale. Par conséquent, les structures du cortex préfrontal jouent des rôles importants car elles évaluent, intègrent, et contrôlent les informations émotionnelles en provenance des systèmes sensoriels primitifs tout en impliquant des représentations plus abstraites en mémoire.